Homophonie ?

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Islwyn
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Homophonie ?

Message par Islwyn »

Dans un livre sur la langue française d'aujourd'hui, un chapitre consacré au monosyllabisme et aux confusions qu'il peut provoquer répertorie comme homophones :

les sphères / laisse faire
sa toilette est faite / sa toile était faite
l'encrier / l'ancre (l'encre) y est.


Pour moi, il n'y a pas homophonie réelle si la distinction entre è et é est respectée.

J'ajoute que le livre fut publié en 1954, ce qui peut avoir une certaine importance.

Que pensez-vous ?
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Claude
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Message par Claude »

Vous avez raison, et pendant qu'on y est on peut ajouter des vers holorimes tels que (mon préféré) :

Cosette, hautaine, hardie, écrin touchant / Causait aux Thénardier crainte ou chants.
Dernière modification par Claude le sam. 14 mars 2015, 17:58, modifié 1 fois.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Je crois que la distinction entre é et è n'est pas une affaire de date mais de région d'origine.
J'ajoute que les accents toniques primaire et secondaires complètent la distinction, en particulier dans le deuxième exemple (syllabes accentuées en gras) : sa toilette est faite / sa toile était faite.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Manni-Gédéon
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Message par Manni-Gédéon »

Tout cela me rappelle un lointain souvenir de Jean Cocteau :

L'hôtel

La mer veille. Le coq dort.
La rue meurt de la mer. Île faite en corps noirs.
Fenêtres sur la rue meurent de jalousies.
La chambre avec balcon sans volets sur la mer
Voit les fenêtres sur la mer,
Voile et feux naître sur la mer,
Le bal qu'on donne sur la mer.
Le balcon donne sur la mer.

La chambre avec balcon s'envolait sur la mer.
Dans la rue les rats de boue meurent
(le 14 que j'eus y est);
Sur la mer les rameurs debout.
La fenêtre devant hait celles des rues ;
Sel de vent, aisselle des rues,
Aux bals du quatorze Juillet.


Et encore :

L'Oracle

Jean : qui a été plus aimé que moi ?
Athéna : Personne.
Jean : Qui a été plus haï que moi ?
Athéna : Personne.
Jean : Et toi que penses-tu de moi ?
Athéna : Je suis née grecque. Je suis l'aînée. Je suis le nez de l'année. Je suis le mur, l'art mûr, l'armure. Je suis la sève héritée. Je suis lasse et vérité. Je suis la sévérité. Je suis la cruelle crue elle. L'aile des rues et des ruelles. Mes mensonges c'est vérité. Sévérité même en songe. Je suis le mythe, la railleuse. La mitre à yeux, l'amie trahie. La lance affront, le front à lance. Je suis la moelle, je suis le sort. De moi l'art sort à ressort. Je dis : l'art meut l'arme des larmes. Le rail du mythe…
(elle s'arrête)
Jean : Et moi ? Que penses-tu de moi ?
(il pousse une pièce dans la fente.)
Oracle :
Tes cris, même sous les tortures
Sont cris écrits l'orgueil aidant.
La mer se change en écriture
Dès qu'on jette l'encre dedans.


Jean Cocteau, Opéra.

J'espère que ces extraits n'ont pas été altérés, car je les ai trouvés sur la toile.
(C'est ma sœur qui a le livre. Elle m'a montré ces textes quand j'étais adolescente.)
L'erreur ne devient pas vérité parce qu'elle se propage et se multiplie ; la vérité ne devient pas erreur parce que nul ne la voit.
Gandhi, La Jeune Inde
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Manni-Gédéon
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Message par Manni-Gédéon »

L'erreur ne devient pas vérité parce qu'elle se propage et se multiplie ; la vérité ne devient pas erreur parce que nul ne la voit.
Gandhi, La Jeune Inde
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Excellentes citations.

Le fait est, Islwyn, que je prononce identiquement « les sphères » et « laisse faire».
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Claude
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Message par Claude »

C'est donc les que vous prononcez n'est-ce pas ? Si oui, il doit en être de même avec :
Par les bois du djinn où s'entasse de l'effroi,
Parle et bois du gin ou cent tasses de lait froid.
Dernière modification par Claude le dim. 05 juil. 2015, 9:46, modifié 1 fois.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Oui ! En tout cas dans ma prononciation spontanée.
Je crois que je produis pour les et lai (dans laisse) quelque chose d'intermédiaire entre les deux sons recommandés.
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Islwyn
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Message par Islwyn »

André (G., R.) a écrit :Je crois que je produis pour les et lai (dans laisse) quelque chose d'intermédiaire entre les deux sons recommandés.
Je crois vous comprendre. J'ai toujours fait la distinction entre lé = les, parlé et lè = lait, lègue, mais je suis devenu de plus en plus conscient que dans la pratique ce dernier se rapprochait, sans y être identique, du , de sorte que la distinction entre les et lait s'estompait. Je persiste pourtant à les prononcer différemment. Comment autrement distinguer je voudrai de je voudrais ?
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Claude a écrit :C'est donc les que vous prononcez n'est-ce pas ? Si oui, il doit en être de même avec :
Par les bois du djinn où s'entasse de l'effroi,
Parle et bois du gin ou cent tasses de lait froid.
En écoutant soigneusement chacun parler, on pourra noter d'infimes nuances dans la prononciation des voyelles. Pour moi, dans l'exemple rapporté par Claude, « par les bois » [lébwa] possède un a plus fermé que « parle et bois ». En fin de vers, le [frwa] est identique, mais je dis plutôt [léfrwa] pour « l'effroi » et [lèfrwa] pour « lait froid ».
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Claude
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Message par Claude »

Jacques-André-Albert a écrit :[...] je dis plutôt [léfrwa] pour « l'effroi » et [lèfrwa] pour « lait froid ».
Curieusement, mon épouse originaire de la Nièvre prononce le contraire :
- [lèfrwa] pour « l'effroi », ce qui est normal puisque si je ne me trompe, le E se prononce toujours È devant une consonne double ;
- [léfrwa] pour « lait froid ». Ainsi, si elle me dit « Peux-tu me passer le lait ? », je m'imagine en train d'encoller le papier peint. :lol:
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