Substantifs qui n'existent pas

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Anne
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Substantifs qui n'existent pas

Message par Anne »

Certains adjectifs n'ont pas de substantif correspondant.

Pour exprimer le caractère de ce qui est long, on a la longueur, mais pour ce qui est court ?
L'aspect rugueux se dit rugosité, mais l'aspect lisse ?
De même pour glabre, dru, privé, frustre, néfaste, et tant d'autres.

Comment expliquer qu'on ait eu besoin de créer des substantifs pour la plupart des adjectifs, mais que lisseté, courtesse, etc., n'apparaissent pas dans le dictionnaire ?
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Perkele
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Message par Perkele »

J'ai déjà lu glabreté.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Anne
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Message par Anne »

En effet, si glabreté ne figure pas dans mon Petit Robert, il est tout de même dans le TLFi.

Mais l'ôter de ma liste d'adjectifs sans substantif n'annule pas mon interrogation quant aux adjectifs restants.
groseille

Message par groseille »

Il me semble avoir entendu parler de bravitude, tantôt ( :roll: pas pu résister)
D'autant que, "lissitude" aurait été justifié, après tout, d'un certain point de vue, mais étant donné que "bravoure" existe...
J'ajoute avoir pris connaissance d'un dessin hilarant dans un journal satirique bien connu, montrant Raffarin devant sa TV où il entendait parler de bravitude, et s'exclamer, indigné : "c'est de la copiance !"
groseille

Message par groseille »

(...) s'exclamait, indigné (...) :oops:
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Jacques
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Message par Jacques »

Bravoure est synonyme de courage. Mais il n'y a pas de substantif correspondant à brave dans le sens de gentil ou vaillant, d'où l'improvisation malheureuse de l'auteur de cette « bravitude », qui a dû se trouver prise de court dans sa déclaration.
C'est un peu l'histoire de cette Roumaine qui visite une exposition de peinture, et s'exclame devant un tableau : « Comme c'est pythagore ! ». Alors quelqu'un lui glisse : « Vous voulez dire pittoresque ».
Oh, pythagore ou pittoresque, c'est synagogue !
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques-André-Albert
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Re: Substantifs qui n'existent pas

Message par Jacques-André-Albert »

Anne a écrit :Certains adjectifs n'ont pas de substantif correspondant.

Pour exprimer le caractère de ce qui est long, on a la longueur, mais pour ce qui est court ?
L'aspect rugueux se dit rugosité, mais l'aspect lisse ?
De même pour glabre, dru, privé, frustre, néfaste, et tant d'autres.

Comment expliquer qu'on ait eu besoin de créer des substantifs pour la plupart des adjectifs, mais que lisseté, courtesse, etc., n'apparaissent pas dans le dictionnaire ?
À court correspond la brièveté, mais cortece existait en ancien français. Lisse, auquel correspond le poli, n'existait pas en ancien français ; c'est le déverbal de lisser, ancien licier avec le sens de repasser.
Glabre n'est attesté qu'à partir de 1548, du latin glaber ; il n'a pas eu le temps de s'adjoindre un substantif, si je puis dire.
Dru, qui exprime la vigueur, la densité, vient du gaulois drutos, fort, exubérant, vaillant. L'ancien français l'utilisait aussi avec une connotation sexuelle, qui semble avoir existé dès l'époque gauloise, puisque le vieil irlandais ne connaît druth que dans le sens de lascif ; en ancien français, donc, la druerie c'était une humeur lascive.
Fruste aussi apparaît tardivement, à la même époque que glabre, ce qui peut expliquer l'absence de substantif, de même que néfaste.
groseille

Message par groseille »

Bravoure est synonyme de courage. Mais il n'y a pas de substantif correspondant à brave dans le sens de gentil ou vaillant, d'où l'improvisation malheureuse de l'auteur de cette « bravitude », qui a dû se trouver prise de court dans sa déclaration.
Si je peux me permettre, Jacques, ladite auteure a bien utilisé ce néologisme dans le sens de "courage", du moins est-ce ainsi que j'ai compris sa phrase relative à la conquête de la "bravitude" par celui qui arpente la grande muraille (je ne me souviens plus de la citation incriminée).
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Klausinski
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Message par Klausinski »

L’explication de JAA semble pertinente. S’il n’existe pas de nom équivalent, je crois que l’on peut substantiver un adjectif en le faisant précéder d’un article, ce que font beaucoup de philosophes. Est-ce une règle ou cela n’est-il valable que pour quelques mots ? Ne pourrait-on pas dire : « le privé de cette réflexion », « le néfaste d’une telle attitude », etc. Cela vous choque-t-il ? Je vous accorde qu’il est plus commun (et donc plus raisonnable aujourd’hui) de dire « le caractère ou la nature privée, néfaste, etc. de telle ou telle chose ».
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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Anne
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Message par Anne »

Klausinski a écrit :S’il n’existe pas de nom équivalent, je crois que l’on peut substantiver un adjectif en le faisant précéder d’un article, ce que font beaucoup de philosophes.
C'est ce que je fais dans la plupart des cas, mais en l'occurrence, j'ai eu besoin, aujourd'hui lors d'un cours, de parler de la brièveté d'une note (merci JAA :wink: , je ne le retrouvais plus, celui-là), et je ne me serais probablement pas fait comprendre en parlant du court de cette note.
Cependant, si brièveté convient pour parler d'une durée rythmique ou de tout intervalle de temps, je doute que cela puisse s'appliquer à un objet physique : peut-on parler de la brièveté d'un brin de paille ou d'un crayon ?
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TSOS
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Message par TSOS »

groseille a écrit :
Bravoure est synonyme de courage. Mais il n'y a pas de substantif correspondant à brave dans le sens de gentil ou vaillant, d'où l'improvisation malheureuse de l'auteur de cette « bravitude », qui a dû se trouver prise de court dans sa déclaration.
Si je peux me permettre, Jacques, ladite auteure a bien utilisé ce néologisme dans le sens de "courage", du moins est-ce ainsi que j'ai compris sa phrase relative à la conquête de la "bravitude" par celui qui arpente la grande muraille (je ne me souviens plus de la citation incriminée).
Je crois que groseille ne se fourvoie pas...

Mais que serait cette liste sans un "abracadabrantesque", n'est-ce pas?
:wink:

Édit: Ce mot n'est pas du tout un substantif, donc négligez mon message trop rapide.
Dernière modification par TSOS le jeu. 24 mars 2011, 0:35, modifié 1 fois.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Anne a écrit :Cependant, si brièveté convient pour parler d'une durée rythmique ou de tout intervalle de temps, je doute que cela puisse s'appliquer à un objet physique : peut-on parler de la brièveté d'un brin de paille ou d'un crayon ?
Le TLFI signale :
Rare. Caractère de ce qui est peu étendu dans l'espace :
1. ... lorsque nous rentrerons en France après sept mois de séjour dans la province, nous serons surpris de la longueur des jambes, chez les femmes de notre pays, par rapport à la brièveté du torse.
T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol, 1933, p. 302.
mais le dictionnaire de l'Académie ne retient que la brièveté dans le temps et la concision.
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Jacques
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Message par Jacques »

groseille a écrit :
Bravoure est synonyme de courage. Mais il n'y a pas de substantif correspondant à brave dans le sens de gentil ou vaillant, d'où l'improvisation malheureuse de l'auteur de cette « bravitude », qui a dû se trouver prise de court dans sa déclaration.
Si je peux me permettre, Jacques, ladite auteure a bien utilisé ce néologisme dans le sens de "courage", du moins est-ce ainsi que j'ai compris sa phrase relative à la conquête de la "bravitude" par celui qui arpente la grande muraille (je ne me souviens plus de la citation incriminée).
Non, elle a voulu louer la gentillesse des Chinois et la qualité de leur accueil.
Je suis choqué de votre emploi du mot auteure, car les linguistes européens ne reconnaissent pas de féminin à auteur et recommandent femme auteur, mais en outre c'est un barbarisme parce que les mots en -teur font leur féminin en -trice : agriculteur – agricultrice ; directeur – directrice ; acteur – actrice. S'il devait un jour se féminiser, il donnerait autrice.
L'Académie, en outre, ne reconnaît que cinq mots en -eur qui font leur féminin en -eure : majeur, mineur, inférieur, supérieur, prieur.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
groseille

Message par groseille »

C'était une faute, Jacques. Je ne suis pas à l'aise avec cette question de la féminisation des mots. Il semble qu'il ne soit plus assumé le fait que la langue française ne prévoit pas de genre "neutre." La question de la condition féminine est sérieuse, mais dans le langage j'ai un peu de mal à la prendre au sérieux. Je vais me reporter au sujet qui traite de cet enjeu, il me semble qu'il a été ouvert sur ce forum mais je n'ai pas pris connaissance de vos échanges sur ce point.
Quant à ce que voulait dire Mme Royal, je n'ai pas le temps de procéder à une recherche sur Google mais vous m'étonnez. J'avais retenu qu'elle avait prononcé une sentence un peu solennelle à l'occasion de son déplacement sur la muraille de Chine et que dans son intervention, elle évoquait les notions de "brave" et de "bravitude" en se rapportant à celle de courage ou de vaillance, et aucunement à celle de gentillesse ou de bonne volonté.
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Yeva Agetuya
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Message par Yeva Agetuya »

Je viens de découvrir la "vastitude" :

https://geocarrefour.revues.org/684

https://www.google.fr/search?q=vastitud ... e&ie=UTF-8

J'en étais resté à la vasteté :

https://www.google.fr/search?q=vastet%C ... e&ie=UTF-8

Il paraît que "vasteté" est plus français et que vastitude est un réfection sur le latin.

PS : le correcteur d'orthographe ignore "vasteté".
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