Au final, à la base

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Jacques
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Message par Jacques »

cyrano a écrit :Au final c'est le genre de néologismes pour lesquels nous ne serons sans doute jamais d'accord : pour ma part, il ne me dérange pas.
Comment pouvez-vous justifier l'existence d'une expression fondée sur un mot qui n'existe pas ?
Le final, c'est une tolérance orthographique pour le finale (orthographe conseillée par l'Académie), morceau qui conclut une œuvre musicale. Cela et rien d'autre.
On ne peut pas l'intégrer à une expression qui signifie en fin de compte. Il n'y a aucun rapport.
Au final, si vous l'admettez, signifierait « à l'accord musical de fin ». C'est saugrenu.
Pour reprendre votre exemple : On avait cru faire une bonne affaire, mais au dernier accord musical on a perdu de l'argent.
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Islwyn
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Message par Islwyn »

Jacques a écrit :à Paris nous avons donné aux voies de circulation des noms de victoires : Eylau, Wagram, Friedland... eux ils ont choisi des noms de défaites : Waterloo, Trafalgar... C'est bien pour humilier la France, non ?
Je fais observer tout simplement qu'en hébergeant M. Chirac et sa dame à Buckingham Palace, la Reine Élizabeth fut assez sensible pour ne pas loger le couple français dans la chambre dite « Waterloo ».
cyrano
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Message par cyrano »

Je ne pense pas que au final soit emprunté au vocabulaire musical. C'est sans doute un raccourci pour: au [décompte, bilan...] final.

C'est en tout cas ainsi que l'expression est renseignée au Petit Robert: non pas sous le substantif masculin finale, mais bien sous l'adjectif. C'est peut-être pour cela que vous ne l'avez pas trouvée au Larousse. Le Robert n'indique pas qu'il s'agit d'un emploi critiqué (mais je sais que ce n'est pas un argument... :wink:).
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Herdé76
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Message par Herdé76 »

J'ai entendu dernièrement à la radio les résultats d'un sondage : quand on demande à un Français de citer une bataille navale il cite presque toujours Waterloo, qui a été une défaite française !!
Pourtant j'ai lu dernièrement dans une revue spécialisée que lors des batailles navales entre le Royaume-Uni et la France, le nombre de victoire et de défaites de chacun a été à peu près équivalent.
Le souvenir des batailles navales c'est comme la défense de la langue française !
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Islwyn
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Message par Islwyn »

Herdé76 a écrit :J'ai entendu dernièrement à la radio les résultats d'un sondage : quand on demande à un Français de citer une bataille navale il cite presque toujours Waterloo, qui a été une défaite française !!
Je ne m'étonne pas outre mesure. À la question « qui était la Pucelle d'Orléans ? », une étudiante anglaise répond avec une certaine hésitation : « La Bonaparte ?» :?
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Jacques
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Message par Jacques »

Herdé76 a écrit :J'ai entendu dernièrement à la radio les résultats d'un sondage : quand on demande à un Français de citer une bataille navale il cite presque toujours Waterloo, qui a été une défaite française !!
Pourtant j'ai lu dernièrement dans une revue spécialisée que lors des batailles navales entre le Royaume-Uni et la France, le nombre de victoire et de défaites de chacun a été à peu près équivalent.
Le souvenir des batailles navales c'est comme la défense de la langue française !
Il ne faut pas se laisser aller au complexe d'infériorité. :wink:
J'ai scrupule à vous contredire, mais Waterloo est une ville de Belgique à l'intérieur des terres. Pas de mer en vue. J'ai vu la plaine où s'est déroulée la bataille, aujourd'hui c'est une sorte de prairie, et ce n'est pas bien grand. Il y a là-bas une pyramide avec à son sommet un lion, sur laquelle on peut faire deux remarques :
1 – le félin a la tête tournée vers l'Angleterre, et le derrière vers la France. Pas sympa pour nous !
2 – au bas de l'escalier qui mène vers le sommet, il y a une pancarte qui indique : « Il est interdit de monter avec des frites ». SIC
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Jacques
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Message par Jacques »

cyrano a écrit :Je ne pense pas que au final soit emprunté au vocabulaire musical. C'est sans doute un raccourci pour: au [décompte, bilan...] final. :wink:).
Mais le mot final n'existe pas. Il y a un adjectif, mais pas de substantif. Comment peut-on dire au final ?
Il existe un mot, finale, d'origine italienne, avec une tolérance orthographique qui en fait final, et qui désigne, comme je l'ai dit, les derniers accords d'un morceau de musique.
Vous défendez un mot fantôme, un mot qui, s'il existait, serait synonyme de fin. Je ne crois pas à la théorie de l'ellipse, mais à une loufoquerie de journalistes, une de plus.
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Jacques
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Message par Jacques »

Islwyn a écrit :À la question « qui était la Pucelle d'Orléans ? », une étudiante anglaise répond avec une certaine hésitation : « La Bonaparte ?» :?
Je trouve que cela est navrant, car nous sommes là dans un degré d'inculture consternant.
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Anne
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Message par Anne »

Herdé76 a écrit :J'ai entendu dernièrement à la radio les résultats d'un sondage : quand on demande à un Français de citer une bataille navale il cite presque toujours Waterloo, qui a été une défaite française !!
Il est tentant d'associer la sonorité du nom du lieu (Waterloo, water l'eau) à la notion d'eau contenue dans la bataille navale.
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Message par cyrano »

Jacques a écrit :Mais le mot final n'existe pas. Il y a un adjectif, mais pas de substantif. Comment peut-on dire au final ?
De la même manière que, par ellipse, on dit par exemple le primaire, le secondaire... pour l'enseignement primaire et secondaire.

Les adjectifs substantivés sont nombreux: l'essentiel, l'utile et l'accessoire, le nécessaire, l'important...

Ce qui est particulier, ici, c'est que cette substantivation de l'adjectif s'est figée en une locution unique puisqu'on ne dit pas le final dans d'autres cas que au final. Je vous accorde bien volontiers que c'est un phénomène linguistique curieux et qu'à première vue, je ne trouve pas d'équivalent. Mais cette particularité suffit-elle pour condamner l'expression?
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Perkele
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Message par Perkele »

Herdé76 a écrit :J'ai entendu dernièrement à la radio les résultats d'un sondage : quand on demande à un Français de citer une bataille navale il cite presque toujours Waterloo, qui a été une défaite française !!
Pourtant j'ai lu dernièrement dans une revue spécialisée que lors des batailles navales entre le Royaume-Uni et la France, le nombre de victoire et de défaites de chacun a été à peu près équivalent.
Le souvenir des batailles navales c'est comme la défense de la langue française !
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Ne confondriez-vous pas avec Trafalgar ?
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Jacques
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Message par Jacques »

cyrano a écrit :Les adjectifs substantivés sont nombreux: l'essentiel, l'utile et l'accessoire, le nécessaire, l'important...
Avec un article défini seul, et pas un article associé explicitement ou implicitement à la préposition à.
Tous les exemples que vous prenez ont la même structure : un adjectif substantivé utilisé avec le ou la directement, sans préposition.
À l'accessoire, on pourrait toujours faire une réparation rapide – Au nécessaire il faut colmater cette fissure – À l'important il faut agir vite – À l'essentiel il faut parer à ce qui est le plus urgent...
Ces phrases vous conviennent-elles ?
L'accessoire peut toujours être remis à plus tard – Le nécessaire est suffisant pour le moment – L'important est de parer au plus pressé – L'essentiel est de ne rien oublier.
Et celles-là ?

Pourquoi vouloir introduire dans l'usage cette formule au final qui prête à polémique et prend des allures de barbarisme, alors que nous en avons d'autres qui ne présentent aucun caractère suspect et existent depuis longtemps ? Finalement, à la fin, en fin de compte sont d'usage courant et n'ont jamais soulevé de doute.
Je le répète, je ne vois pas d'ellipse dans « au final ». Ellipse de quoi ?
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Message par GB-91 »

Jacques a écrit :

Mais le mot final n'existe pas. Il y a un adjectif, mais pas de substantif. Comment peut-on dire au final ?
Il existe un mot, finale, d'origine italienne, avec une tolérance orthographique qui en fait final, et qui désigne, comme je l'ai dit, les derniers accords d'un morceau de musique.
Vous défendez un mot fantôme, un mot qui, s'il existait, serait synonyme de fin. Je ne crois pas à la théorie de l'ellipse, mais à une loufoquerie de journalistes, une de plus.


Soit. Mais alors, par quel mot allez-vous appeler le dernier échange d'un tournoi, d'un championnat, celui qui départage les deux meilleurs pour désigner le premier ? Au lieu de finale, nous devrons dire ultime échange ou dernière épreuve ? Par ailleurs, cet usage n'est pas exclusif chez les sportifs, je l'ai lu récemment dans un article concernant le choix d'un appartement où il était dit que la finale (du choix) revenait à celui le plus proche des commerces et des moyens de transport.
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Klausinski
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Message par Klausinski »

GB-91, la finale n'est pas la même chose que le final. Le mot féminin existe et il désigne ce dont vous parlez, le mot masculin quant à lui désigne ce dont parle Jacques. Le Grand Robert relève l'expression « en finale », à l'entrée du mot féminin :
Bourlinguer un cochon du boulevard de l'Hôpital à la rue Caulaincourt, s'enfoncer au pas de chasseur toute la traversée de Paris en plein noir, huit kilomètres au raccourci avec la montée de Monmartre en finale (…)
M. Aymé, le Vin de Paris, « La traversée de Paris », p. 30.

Pour au final, si l'on en croit Google livres, cette forme s'introduit vraiment dans la littérature générale à partir des années 1980. En voici quelques exemples.
— Chez Glucksmann, le mot n'a déjà plus son sens musical : Apparaît au final de la Recherche la condition de visibilité qui la gouverne dès le départ et que Proust nomme « beauté nouvelle », « idée du temps », idée de la mort. (La force du vertige, 1983)
— Chez le journaliste Serge July : Au final, le feuilleton de l'année 1986 : une « drôle d'année » comme on dit la drôle de guerre, parce que c'est celle du degré zéro de la politique. (La drôle d'année, 1987)
— Chez Luc Ferry, alors professeur d'université : sa méthode devait bien au final, avec l'évolution de l'état social, « sortir des écoles pour pénétrer dans la société. (Homo Aestheticus, 1990)

Je penche pour deux interprétations : ou la tournure a été consciemment empruntée au vocabulaire musical et fut d'abord une métaphore, ou la tournure a été lue dans un contexte musical et a été comprise dans un sens général. Il est même possible que les deux interprétations soient correctes.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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Jacques
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Message par Jacques »

GB-91 a écrit :Jacques a écrit :

Mais le mot final n'existe pas. Il y a un adjectif, mais pas de substantif. Comment peut-on dire au final ?
Il existe un mot, finale, d'origine italienne, avec une tolérance orthographique qui en fait final, et qui désigne, comme je l'ai dit, les derniers accords d'un morceau de musique.
Vous défendez un mot fantôme, un mot qui, s'il existait, serait synonyme de fin. Je ne crois pas à la théorie de l'ellipse, mais à une loufoquerie de journalistes, une de plus.

Soit. Mais alors, par quel mot allez-vous appeler le dernier échange d'un tournoi, d'un championnat, celui qui départage les deux meilleurs pour désigner le premier ? Au lieu de finale, nous devrons dire ultime échange ou dernière épreuve ?
Je ne comprends pas le sens de votre question. Vous me faites dire ce que je n'ai pas dit. Vous n'avez remarqué ni la différence de genre ni la différence d'orthographe. Le dernier match, le dernier échange, c'est la finale et personne ne le conteste. La finale avec un E et de genre féminin.
Le mot qui n'existe pas, le mot fantôme, c'est le final de Cyrano, celui qui est utilisé pour dire au final.
Une finale existe mais pas un final.

J'édite car, Klausinski, vous avez déposé votre commentaire pendant que j'écrivais le mien. Voilà enfin une explication qui tient et se présente de façon logique, raisonnable. J'admettrais volontiers que le terme musical a été sorti de son milieu habituel et s'est introduit dans le langage courant en gardant la même idée de chute, de conclusion ou d'apothéose. Et dans ce cas, on pourrait donc écrire au finale, ce qui serait préférable selon la recommandation de l'Académie.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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