Ô combien (savoir)…

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Claude
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Message par Claude »

shokin a écrit :[...] Je me pose la question parce que je dois le citer parmi les homophones au, aux, haut, hauts, eau, eaux, os, o, oh, etc.
Et aulx.
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shokin
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Message par shokin »

Aïe ! Je l'avais oublié, celui-ci !
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Klausinski
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Message par Klausinski »

shokin a écrit :Alors ne devrions-nous utiliser le mot ô que pour apostropher une personne. Ô mon fidèle client, voulez-vous que je vous prête une liasse ? Et y a-t-il virgule après ô ?
Voyez l'article du TLFi. On peut apostropher une personne mais aussi un objet ou un concept que l'on personnifie. « Ô » peut aussi se mettre devant un sentiment et c'est alors un procédé d'emphase : ô douleur, ô rage, ô désespoir. Il peut également se mettre devant un groupe nominal : ô la belle enfant.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
Marc81
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Re: Ô combien (savoir)…

Message par Marc81 »

Klausinski a écrit :Pour moi, on ne peut pas employer ici l'expression « ô combien » qui signifie « à un point extrême », car le mot « combien » a un rôle grammatical bien précis.
Combien n'a-t-il pas également un rôle grammatical précis dans :
- Ô combien d'actions, combien d'exploits célèbres Sont demeurés sans gloire au milieu des ténèbres ! (Corneille)
- Ô combien de héros indignement périrent ! (Voltaire)
- Ô combien j’ai pleuré de fois de n’être pas née laide, bête, sotte, orgueilleuse. (Diderot)
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Klausinski
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Message par Klausinski »

Si fait, Marc, mais ici, nous n'avons pas affaire au tour figé « ô combien » qui signifie à un point extrême. Je vois là une différence. On pourrait écrire : oh ! combien de…
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
Marc81
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Message par Marc81 »

Je vous rejoins... ô combien !
Curieusement, cette distinction n'est pas clairement précisée, à ma connaissance, dans les dictionnaires et les ouvrages de référence.
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Islwyn
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Message par Islwyn »

Zut ! Et moi qui écrivis l'autre jour « Ô les Bourguignons ! », j'aurais donc dû écrire « Oh les Bourguignons ! » ? Oh mais !
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Marc81
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Message par Marc81 »

Les deux graphies restent envisageables :
- Ô vous les Bourguignons qui êtes passés les premiers dans les Gaules... (vocatif, rare dans le registre courant)
- Oh ! (voyez-vous ça) les Bourguignons sont les premiers !
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Jacques
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Message par Jacques »

Klausinski a écrit :Si fait, Marc, mais ici, nous n'avons pas affaire au tour figé « ô combien » qui signifie à un point extrême. Je vois là une différence. On pourrait écrire : oh ! combien de…
C'est ce que j'ai signalé en citant le vers de Victor Hugo :
Oh ! combien de marins, combien de capitaines...
et à mon avis, dans les deux premiers exemples exemples de Marc, dont le premier ressemble singulièrement à celui d'Hugo, je pense que cet ô est une erreur orthographique, ce que confirme l'Académie française :
Ô, avec l'accent circonflexe, est une interjection qui sert à marquer diverses passions, divers mouvements de l'âme, etc. Ô temps ! ô moeurs ! Ô douleur ! ô regret ! Ô le malheureux d'avoir fait une si méchante action ! Ô le plaisant homme de prétendre que....
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Marc81
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Message par Marc81 »

Jacques a écrit :je pense que cet ô est une erreur orthographique
Pour ma part, je ne le crois pas (d'autant que la citation de Corneille se trouve ainsi orthographiée chez Littré).
L'explication, me semble-t-il, est à chercher ailleurs... en l'espèce, dans le Dictionnaire historique de la langue française : "Oh, anciennement ho, est une variante (1559) de ô."
Dans les faits, la première occurrence que je trouve de "Oh combien de" remonte à 1663. Avant cette date, seule apparaît la graphie "O combien de". Ensuite, les deux tours sont en concurrence.
Comme par hasard, les éditions privilégiant l'"ancienne" graphie dans les citations de Corneille (XVIIe), de Voltaire et de Diderot (XVIIIe) sont plus nombreuses que celles privilégiant la "nouvelle", quand c'est exactement l'inverse pour Hugo (XIXe) !
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Jacques
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Message par Jacques »

Ce qui compte pour l'appréciation, ce n'est pas la manière dont on écrivait un mot au XVIe ou au XVIIe siècle, mais ce qui se fait de nos jours. La question de départ concernait les pratiques actuelles. Si vous écrivez un mot de la même manière qu'on le faisait il y a quatre siècles, c'est une faute d'orthographe. Pour prendre un exemple simple, si dans une dictée vous écrivez fenestre et non fenêtre, on vous comptera une faute.
La phrase qui a servi de point de départ à ce sujet : Dieu sait ô combien elle me fait peur est fautive, même si en d'autres temps cela ait pu se dire.
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Marc81
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Message par Marc81 »

Il ne vous a pas échappé, cher Jacques, que nous en étions passés avec Klausinski à la construction Oh/Ô combien de.
Mon propos est simplement le suivant : si Littré (qui n'enregistre pas à ma connaissance de fenestre dans son Dictionnaire) prend soin de mentionner la citation de Corneille (Ô combien d'actions...), on est fondé à s'interroger sur le bien-fondé d'une hypothétique règle dont, comme je le disais à Klausinski, je ne trouve pas trace.

Voilà pourquoi il m'est difficile de balayer d'un revers de main la graphie Ô combien de dans l'usage actuel (même si j'avoue lui préférer Oh ! Combien de), en l'absence de toute caution ou presque (seul Hanse croit bon de préciser : "Devant une proposition, on doit employer oh !"... sans donner plus d'explication).
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Jacques
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Message par Jacques »

Mais Klausinski a appelé votre attention sur l'expression figée ô combien, synonyme de « dans une grande proportion », qui est affirmative, et ne doit pas se confondre avec l'exclamation interrogative, qui s'écrit aujourd'hui oh ! combien.
Je n'ai pas dit qu'on peut trouver fenestre dans Littré, à son époque on utilisait l'orthographe moderne. Ce n'était qu'un exemple non situé. Cette graphie figure dans les deux premières éditions du dictionnnaire de l'Académie (1694 et 1718), et laisse la place à la nouvelle dans la troisième (1740).
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Larousseôjolirobert
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Re: Ô combien (savoir)…

Message par Larousseôjolirobert »

Reprenant un antique fil de discussion portant sur la locution adverbiale "ô combien" et pour laquelle défile un interminable pataquès s'agissant de sa validité ou non dans la phrase : "Dieu sait ô combien elle me fait peur.", un impétrant propose, après moult réflexions savantes, le correctif suivant : "Dieu sait combien je le déteste" ! qui selon lui serait la seule forme recevable...
Une chose est sûre. Il ne frottera pas le lard divin !

Très drôle aussi, la proposition corrective d'un deuxième impétrant : "Une tournure acceptable serait : Dieu sait ô combien elle me fait peur, ô combien !"...
Ô combien l'expectative demeure, ô combien, quant à la, ô combien, pertinence de cette proposition, ô combien !!!
Leclerc92
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Re: Ô combien (savoir)…

Message par Leclerc92 »

Bonjour et bienvenue,
Au-delà du charmant amphigouri que vous nous offrez, je m'interroge, ô combien, sur le sens que vous donnez à impétrant.
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