Inversion du sujet dans la forme interrogative ?

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DenisDenis
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Inversion du sujet dans la forme interrogative ?

Message par DenisDenis »

Bonjour,

mon problème du jour, c'est de reconnaître s'il y a inversion du sujet ou pas dans les phrases interrogatives. Par exemple :

Quel animal a une trompe ?
Le sujet est "animal". Il n'y a pas inversion.
Quel animal mange un chat ?
Exactement la même forme de phrase, et ici le sujet est "chat". La réponse est "Un chat mange des souris".
Quel élève regarde le maître ?
Là, on ne sait pas si la question est "Quel est l'élève qui regarde le maître ?" ou "Quel est l'élève que regarde le maître ?".

Comment reconnaître lorsqu'il y a inversion du sujet ou pas ? Comment faites-vous intuitivement quand vous entendez une phrase de ce genre ?

Je me doute qu'une des réponses va être "c'est en fonction du sens", mais c'est une réponse qui ne me convient pas. Je traite le texte par informatique et l'ordinateur ne connait pas le sens commun. Pour lui un animal peut avoir une trompe comme une trompe peut avoir un animal.

Question subsidiaire à laquelle personne ne répondra, mais je me la pose quand même : comment et pourquoi une langue, forgée pendant des siècles, garde des formes ambiguës telles que celles-là, alors qu'il aurait suffi de choisir un ordre pour ne plus avoir de soucis ? En anglais, par exemple, il y a une seule forme possible pour les phrases interrogatives. L'ambiguïté aurait donc des avantages ?

Merci pour vos réponses éclairées
Leclerc92
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Message par Leclerc92 »

On retrouve en fait la même ambiguïté dans
Quel animal mange le chat ?
C'est le "bon" sens qui vous a permis de choisir mais on pourrait penser que la réponse était le crocodile, qui mange le chat.
Pour éviter cette ambiguïté, le français recourt à un truc très simple :
Quel animal le chat mange-t-il ?
Réponse, la souris.
Par quel animal le chat est-il mangé ?
Réponse, le crocodile.

Donc chaque fois qu'il y a une ambiguïté possible, on peut s'en sortir autrement.
DenisDenis
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Message par DenisDenis »

Leclerc92 a écrit :Donc chaque fois qu'il y a une ambiguïté possible, on peut s'en sortir autrement.
On peut s'en sortir si on pose soi-même la question. Pas si quelqu'un d'autre vous pose cette question sous une forme ambiguë. Et c'est de l'écrit, pas moyen de demander des précisions.

Je rappelle que je fais du traitement informatique de texte. C'est peut-être un peu ésotérique pour des littéraires, mais je n'ai pas le choix des questions qu'on me pose.
Leclerc92
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Message par Leclerc92 »

Je rappelle que je fais du traitement informatique de texte. C'est peut-être un peu ésotérique pour des littéraires, mais je n'ai pas le choix des questions qu'on me pose.
Oh la, ça va les chevilles ? :lol: Vous croyez que les littéraires sont juste des niaiseux ? Ne vous inquiétez pas, si vous vous exprimez en bon français, on doit pouvoir vous comprendre. Par ailleurs, pour votre gouverne, plusieurs d'entre nous avons fait des études scientifiques !

Mon message précédent répondait à votre question subsidiaire, pour rappeler comment on avait pu s'en sortir au cours des siècles, malgré des formules parfois ambiguës.

La réponse à votre première question est NON. Il n'y a pas de truc pour discerner l'indiscernable, si l'on ne fait pas fonctionner l'intelligence.

Alors votre machine, si vous ne pouvez pas lui instiller un brin d'intelligence, apprenez-lui au moins à fouiller dans des corpus littéraires et voir combien de fois elle trouve des chats qui mangent des crocodiles et combien de fois elle trouve des crocodiles qui mangent des chats : elle n'aura qu'à choisir le plus probable statistiquement, mais une erreur reste possible.

Une langue est toujours pleine d'ambiguïtés pour une machine. Il y a bien d'autres exemples sur lesquels les machines de traduction s'arrachent les cheveux et donnent, en guise de traduction, un infâme gloubi-boulga vide de sens ou du moins de pertinence.
André (G., R.)
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Re: Inversion du sujet dans la forme interrogative ?

Message par André (G., R.) »

DenisDenis a écrit :comment et pourquoi une langue, forgée pendant des siècles, garde des formes ambiguës telles que celles-là, alors qu'il aurait suffi de choisir un ordre pour ne plus avoir de soucis ?
Toutes les langues comportent des ambiguïtés. En allemand « Wie viele Deutsche vertragen Schweizer Universitäten? » peut aussi bien signifier « Combien d'Allemands les universités suisses supportent-elles ? » que « Combien d'Allemands supportent-ils les universités suisses ? »
Les professionnels de la langue française constatent comme vous la difficulté que peut représenter « Quel élève regarde le maître ? » Or ici nous sommes essentiellement des amateurs ! Toutefois, Leclerc92 vous l'a expliqué, on dira et écrira « Quel élève le maître regarde-t-il ? » ou « Quel élève regarde-t-il le maître ? » si l'on est soucieux d'être compris. Autre exemple : « Quel homme de prière a-t-il pourtant jamais avoué que la prière l'ait déçu ? » Dans cette phrase de BERNANOS, qui ne serait pourtant pas ambiguë sans le redoublement du sujet, l'écrivain distingue bien le style direct du style indirect, il sait qu'on formule ainsi au style indirect : « Demandons-nous quel homme de prière a pourtant jamais avoué que la prière l'ait déçu ». Malheureusement cela est parfois oublié.
Il me paraît donc nécessaire, premièrement d'avoir le souci de la correction grammaticale, deuxièmement d'avoir à l'esprit que les ambiguïtés augmentent quand la correction diminue, troisièmement d'adapter les outils informatiques à la langue, l'inverse faisant courir un risque grave à cette dernière.
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Yeva Agetuya
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Message par Yeva Agetuya »

En utilisant le style indirect, j'obtiens :

Demandons-nous quel élève regarde le maître.

Demandons-nous quel élève le maître regarde-t-il.


"Demandons-nous quel élève regarde-t-il le maître", ça me chagrine.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Tout à fait. La seule forme admissible est « quel élève le maître regarde-t-il ? »
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Je trouve peu scientifique l'expression « inversion du sujet », que je n'aime guère, malgré sa fréquence d'emploi. Je ne vais évidemment pas nier que ledit sujet est plus souvent placé avant son verbe qu'après lui. Et je trouve commode et logique pour les enseignants de s'appuyer sur cette constatation pour faire reconnaître aux élèves le mot ou le groupe de mots remplissant cette fonction. Mais l'expression sous-entend une sorte d'anomalie dans le recours à un autre ordre de mots. Or la phrase « L'outil, dont a besoin tout maçon, se trouve difficilement dans le commerce », me paraît aussi « normale » et correcte que celle où « tout maçon » précéderait « a besoin ». Et dans « Je serai là ! annonça Pierre », on n'a même pas le choix. Sans parler des interrogatives. Pourquoi, alors, ne s'en tient-on pas à un constat du genre Souvent le sujet précède le verbe, parfois il le suit ?
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Jacques-André-Albert a écrit :Tout à fait. La seule forme admissible est « quel élève le maître regarde-t-il ? »
Vous considérez, je suppose, le style direct. Au style indirect on n'a, me semble-t-il qu'une possibilité : X demande quel élève (COD) le maître (sujet) regarde, qui correspond à un style direct Quel élève le maître regarde-t-il ?
Le style direct « Quel élève regarde-t-il le maître ? » ne me paraît susceptible de devenir au style indirect que « X demande quel élève regarde le maître », où quel élève est, cette fois, sujet. Pour moi « Quel élève regarde le maître » n'est ambigu qu'au style direct.
Dans la subordonnée de style indirect, sauf erreur, lorsque le premier mot ou groupe fonctionnel (avec quel) est suivi immédiatement du verbe, il est sujet. Pour qu'il ne soit pas sujet, il faut que ledit sujet soit en deuxième position : « Je ne sais pas quelle sorte de voiture (COD) mon frère (sujet) a achetée ».
Je ne peux accepter, Yeva Agetuya, ni « Demandons-nous quel élève le maître regarde-t-il » ni « Demandons-nous quel élève regarde-t-il le maître ». Je ne saurais envisager un redoublement du sujet dans la subordonnée interrogative de style indirect avec quel.
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Yeva Agetuya
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Message par Yeva Agetuya »

A propos d'intelligence artificielle et de langue logique, j'avais soumis à un ami versé là-dedans la proposition suivante :

Plus il y a de gruyère, plus il y a de trous.
Mais plus il y a de trous, moins il y a de gruyère.
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heureux jours
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Message par heureux jours »

dans une question le verbe est en deuxième position:
Qui mange le poisson?
Que mange le chat?
Qu'avez-vous mangé à midi?
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heureux jours
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Message par heureux jours »

André (G., R.) a écrit :
Jacques-André-Albert a écrit :Tout à fait. La seule forme admissible est « quel élève le maître regarde-t-il ? »
Quel élève regarde le maître?
En le disant, c'est l'élève qui regarde le maître.


Quel élève le maître regarde-t-il?
C'est le maître qui regarde un élève et on essaye de savoir de quel élève il s'agit.

Pour le coup, la place des mots change le sens de la question.


En réfléchissant avec votre logique, on trouve instinctivement la place des mots!
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

heureux jours a écrit :dans une question le verbe est en deuxième position:
Qui mange le poisson?
Que mange le chat?
Qu'avez-vous mangé à midi?
Pas toujours ! Les exemples que vous donnez comportent des mots interrogatifs, il s'agit d'interrogations partielles. Dans l'interrogation globale de style direct le verbe dont le sujet est un pronom est en tête : Mangeras-tu du poisson ? Est-ce que vous boirez du vin ? Allaient-ils renoncer ?
Et dans votre exemple « Qu'avez-vous mangé à midi ? » un seul élément du groupe verbal, sa partie conjuguée (son auxiliaire), est en deuxième position, le participe mangé suit le sujet vous.
Bienvenue à vous, heureux jours.
Dernière modification par André (G., R.) le jeu. 17 nov. 2016, 11:26, modifié 1 fois.
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

heureux jours a écrit :Quel élève regarde le maître?
En le disant, c'est l'élève qui regarde le maître.
C'est vrai, je crois aussi qu'en langage oral la phrase est comprise ainsi. Il n'en reste pas moins qu'à sa lecture on ressent une ambiguïté.
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Perkele
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Message par Perkele »

"Quel élève regarde le maître" présente pour moi une amphibologie.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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