Autant en emporte le vent

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André (G., R.)
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Autant en emporte le vent

Message par André (G., R.) »

Deux expressions encore employées de nos jours, « un colosse (une statue) aux pieds d’argile » et « Autant en emporte le vent », trouvent leur origine dans un passage de l’Ancien Testament. Bien entendu, la seconde, devenue proverbiale, est célèbre aussi comme titre d’un film. Mais le journaliste qui intitule un article, dans mon journal, Autant en emporte la comédie musicale, sait-il vraiment ce qu’elle signifie ?

Elle nous rappelle notre vanité, nos illusions à croire acquis définitivement ce qui n’est que provisoire, mais aussi notre tendance à faire des promesses que nous ne tiendrons pas, les contradictions entre nos paroles et nos actes.

Voici les versets concernés du Livre de Daniel :

2.31 Ô roi, tu regardais, et tu voyais une grande statue ; cette statue était immense, et d'une splendeur extraordinaire ; elle était debout devant toi, et son aspect était terrible.
2.32 La tête de cette statue était d'or pur ; sa poitrine et ses bras étaient d'argent ; son ventre et ses cuisses étaient d'airain ;
2.33 ses jambes, de fer ; ses pieds, en partie de fer et en partie d'argile.
2.34 Tu regardais, lorsqu'une pierre se détacha sans le secours d'aucune main, frappa les pieds de fer et d'argile de la statue, et les mit en pièces.
2.35 Alors le fer, l'argile, l'airain, l'argent et l'or, furent brisés ensemble, et devinrent comme la balle* qui s'échappe d'une aire en été ; le vent les emporta, et nulle trace n'en fut retrouvée. Mais la pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne, et remplit toute la terre.


La littérature a largement fait référence à ce passage. Le poème Pauvre Rutebeuf, de VILLON (mis en musique par Léo FERRÉ) et les Maximes d’amour (Histoire amoureuse des Gaules) de Roger de BUSSY-RABUTIN (1618-1693) (extrait ci-dessous), citées par le Grand Robert, en sont deux exemples.

Lorsqu’à nos vœux la belle Iris contraire,
Se rit des maux que l’on souffre en l’aimant,
On fait dessein, au fort de sa colère,
De la quitter, et l’on en fait serment.
Mais des serments que le dépit fait faire
Contre un objet qu’on aime chèrement,
Autant en emporte le vent.

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* La balle (ou bale) est l’enveloppe des graines de céréales.
Leclerc92
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Re: Autant en emporte le vent

Message par Leclerc92 »

Il paraît que le titre du roman de Margaret Mitchell Gone with the wind vient d'un poeme d'amour d'Ernest Downson, mais l'autrice a donné à l'expression un sens biblique qui viendrait plutôt des versets 15 et 16 du psaume 103 :
The life of mortals is like grass,
they flourish like a flower of the field;
the wind blows over it and it is gone,
and its place remembers it no more.
L'homme! ses jours sont comme l'herbe, Il fleurit comme la fleur des champs.
Lorsqu'un vent passe sur elle, elle n'est plus, Et le lieu qu'elle occupait ne la reconnaît plus.
C'est le côté éphémère de la vie et de la mémoire qui est ainsi visé.

La forme française Autant en emporte le vent n'a pas tout à fait le même sens et vient peut-être d'un autre psaume :
https://books.google.co.uk/books?id=SVh ... YC&pg=PA65
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