Interrogation matutinale

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jarnicoton
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Interrogation matutinale

Message par jarnicoton »

Je me suis réveillé ce matin avec une interrogation :
On dit : "placer deux objets l'un à côté de l'autre" ou "placer plusieurs objets les uns à côté des autres".
Mais à combien commence "plusieurs" ? Pas à trois, toujours : car il faut dire pour trois : "placer un objet l'un à côté des autres" ou "placer des objets les uns à côté de l'autre".
Ce sont des formulations inusités, mais logiques...

(je ne me vexerai pas s'il n'y a pas de réponse)
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

« Plusieurs » commence en théorie à partir de deux, mais quand on parle de deux ou trois objet précis, on ne dira rarement plusieurs.
Pour ce qui est des locutions que vous nous présentez, les deux premières me conviennent.
En ce qui concerne les deux dernières, « placer un objet l'un à côté des autres » et « placer des objets les uns à côté de l'autre », je ne pense pas qu'elles soient correctes ; en tous cas, je ne les ai jamais entendues.
On dira plutôt, à propos d'un objet précis : « place-le à côté des autres », ou pour deux objets : « place-les à côté de l'autre ».
Pour l'ensemble des trois : « place-les les uns à côté des autres ».
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Jacques
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Message par Jacques »

Je suis d'accord, pour trois je dirais « les uns à côté des autres ».
Bien que plusieurs soit l'équivalent de plus d'un, dans l'usage on considère généralement qu'il commence à trois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Klausinski
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Message par Klausinski »

C'est un mot subjectif. La vieille fille dira de sa sœur : « Elle a connu plusieurs hommes dans sa vie. » Ce à quoi cette dernière répondra : « Mais enfin, tu exagères, je n'en ai épousé que trois. » (À ce propos, peut-on lui en vouloir d'employer le pronom « en » pour parler d'une personne ?)
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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Jacques
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Message par Jacques »

Oui, il y a hésitation à propos de plusieurs, que l'on fait parfois commencer à quatre. Le pronom en s'applique aussi bien à des choses qu'à des êtres animés, y compris les humains.
Le politiquement correct étant passé par là, les « vieilles filles » sont aujourd'hui des célibataires majeures. J'ai aussi entendu parler de demoiselles prolongées mais je crois que c'est un euphémisme désuet.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Klausinski
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Message par Klausinski »

L'expression « demoiselle prolongée », que je ne connaissais pas, a beaucoup de charme.
(Le Bordas des difficultés du français déconseille d'employer le pronom « en » pour parler de personnes et dit qu'il n'est admis que lorsqu'il permet d'éviter une répétition. C'est à cette règle-là que je faisais référence.)
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

L'emploi du pronom « en » ne me gêne pas dans votre phrase : « Mais enfin, tu exagères, je n'en ai épousé que trois. »
Grevisse dit seulement :
« En et y s'emploient parfois pour désigner des personnes :
- Heureux le roi qui aime son peuple, qui en est aimé (Fénelon, Télémaque t. II p. 49)
- A-t-il des amis ? Il n'en a qu'un seul (Académie)
- Quitter une femme te coûtait quelques larmes ; en être quitté te coûtait un sourire. (Musset, la nuit vénitienne)
etc.

« Au lieu de en, pour représenter des personnes, on emploie le plus souvent le pronom personnel proprement dit (sauf toutefois quand en a une valeur partitive) : « Les services que j'ai reçus de lui ».
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Jacques
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Message par Jacques »

L'Académie est très nuancée et ne voit pas d'empêchement à l'utilisation de en pour des personnes :
En a pris très tôt la valeur d'un pronom personnel qui, dans la langue moderne, renvoie exclusivement à une troisième personne. Invariable, il équivaut à lui, elle, eux, elles, cela, précédés généralement de la préposition de. Son emploi dispense de répéter un nom, un pronom, toute une proposition précédemment exprimés. L'antécédent est, de nos jours, plutôt une chose, un animé non humain ou toute une partie d'énoncé. Mais il s'agit là d'un usage plutôt que d'une règle : en renvoie aussi, aujourd'hui encore, à des personnes, dans des conditions qui ne peuvent faire l'objet d'une règle rigoureuse.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Claude
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Message par Claude »

Jacques-André-Albert a écrit :[...] - A-t-il des amis ? Il n'en a qu'un seul (Académie)[...]
Ce doit être la première fois que j'y prête attention mais il me semble que seul est de trop, non ?
Et pourtant si je dis : « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé », je ne suis pas choqué. :!: :?:
DrAg0r
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Message par DrAg0r »

Je dirais un seul pour le différencier de un parmi d'autres.
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Klausinski
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Message par Klausinski »

Jacques a écrit :Mais il s'agit là d'un usage plutôt que d'une règle : en renvoie aussi, aujourd'hui encore, à des personnes, dans des conditions qui ne peuvent faire l'objet d'une règle rigoureuse.
On ne peut être plus clair.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Claude a écrit :
Jacques-André-Albert a écrit :[...] - A-t-il des amis ? Il n'en a qu'un seul (Académie)[...]
Ce doit être la première fois que j'y prête attention mais il me semble que seul est de trop, non ?
Et pourtant si je dis : « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé », je ne suis pas choqué. :!: :?:
Pourquoi « un seul » serait-il gênant en soi ? Dans la phrase citée par JAA, en revanche, « seul » était pléonastique du fait de la négation « n'... qu'... ».
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Ce fil me conduit à m'interroger sur l'un... l'autre, les uns... les autres. Stricto sensu on ne peut employer le singulier que lorsque l'on parle de deux personnes ou de deux objets :

Ces jumelles se ressemblent trop pour que je puisse les distinguer l'une de l'autre.

Mais si l'on veut rester rigoureux, ne doit-on pas considérer que marcher les uns derrière les autres évoque éventuellement des groupes de trois ou quatre marcheurs et non une file indienne ? Si dix personnes se suivent à la queue leu leu, n'est-il pas préférable de dire qu'elles marchent l'une derrière l'autre ?
Le Robert en six volumes, à l'entrée AUTRE, fournit un grand nombre d'exemples montrant que l'un... l'autre (...) évoque deux personnes ou deux choses, mais il propose aussi cette citation, qui concerne, me semble-t-il, l'humanité entière :
« En ce monde il se faut l'un l'autre secourir. » LA FONT. VI, 16.
Jarnicoton demandait au début de ce fil si l'on peut « placer plusieurs objets les uns à côté des autres ». Ne pourrait-on dire « placer plusieurs objets l'un à côté de l'autre » ?
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