Vers une réforme ?

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Thypot
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Vers une réforme ?

Message par Thypot »

Bonjour à tous,


Voici encore un sujet qui m'intéresse : la réforme de l'orthographe et des règles de la langue française. Je place le présent sujet dans cette section, car une réforme, telle que je l'envisage, ne concernerait pas seulement l'orthographe, mais aussi la grammaire, la typographie voire la ponctuation.

Je suis en effet complètement hostile à ce qu'on a entrepris de faire en 1990. Cette prétendue réforme de l'orthographe, qui se proposait de faciliter les règles orthographiques en effet complexes de la langue, a échoué, puisque nul ne l'applique, et, à mon avis, on peut dire qu'elle a été abrogée par la coutume.

Qui songerait aujourd'hui à écrire « weekend », « paraitre », « cout » ou « réglementaire » ?
Rares sont ceux qui appliquent ces nouvelles consignes, à raison selon moi.

D'abord, je ne suis pas d'accord avec l'idée de simplifier l'orthographe en général. Certains points doivent sans doute l'être, mais je pense qu'il est de l'essence de la langue française d'être complexe, souvent rationnelle mais quelquefois délicieusement illogique ; et il est aussi de son essence de receler une multitude de pièges, d'exceptions incompréhensibles, de règles strictes, etc.

Pourtant, faut-il condamner dans l’œuf toute idée de réforme de la langue ? Je ne le pense pas.

Il est des éléments qui mériteraient, tantôt une simplification, tantôt une clarification ; bref, il faudrait que l'on tranche.

Ainsi en va-t-il des règles de typographie, qui me semblent beaucoup trop flottantes, en particulier sur l'usage des majuscules. Certaines sont effectivement trop compliquées (pour les titres d’œuvres par exemple) ; d'autres sont peu claires : on ne sait pas toujours si l'on doit mettre une majuscule aux noms composés d'institutions (les autorités administratives indépendantes, par exemple).

J'écrivais plus haut que la complexité est de l'essence de la langue française. Cependant, peut-être y a-t-il quelques excès. J'avoue peiner à appliquer correctement les règles d'accord du participe passé des verbes pronominaux, ou celles relatives au pluriel des mots composés.
Néanmoins, j'apprécie ces difficultés, car elles sont propres à notre langue.

Aussi, je me demandais si vous étiez favorables à une nouvelle réforme de l'orthographe, de la grammaire, de la typographie, que sais-je encore.
Si oui, quels seraient les éléments à changer ?
Enfin, quelle est votre opinion sur la réforme de l'orthographe de 1990 ?

Merci.
Dernière modification par Thypot le jeu. 27 févr. 2014, 17:21, modifié 1 fois.
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Jacques
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Message par Jacques »

D'abord, et c'est l'Académie qui appelle l'attention sur ce point, il n'y a pas eu de réforme en 1990. L'Académie française insiste pour appeler ces mesures régularisations orthographiques.
J'en applique certaines qui me conviennent, et en ignore un bon nombre.
Vouloir à nouveau tenter de poser des principes réformateurs, ce serait aller vers un échec comme pour tous les autres essais. Le public n'est généralement pas informé, si on tente de le mettre au courant il s'en fiche et, comme vous et moi, s'il est attentif à la langue, il ne voudra pas changer ses habitudes.
on ne sait pas toujours si l'on doit mettre une majuscule aux noms composés d'institutions (les autorités administratives indépendantes, par exemple).
La règle est que les institutions, organismes et autres prennent une majuscule quand ils présentent un caractère unique : la Sorbonne, le Sénat, l'Académie française, l"Assemblée nationale, la Cour des comptes, la Sécurité sociale... et une minuscule quand c'est un corps pluraliste : le tribunal de Bordeaux, le ministère de l'Intérieur, des Transports (le domaine concerné prend la majuscule), la police municipale, etc.
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Klausinski
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Message par Klausinski »

Ces « rectifications » orthographiques de 1990 sont à mon sens un échec ; on a voulu introduire de la logique – et encore !… de la logique bancale – dans un domaine qui tient de l'esthétique, et dont l'esthétique tient elle-même de l'habitude. Pour qu'une réforme (et non une « rectification », ce mot n'a pas de sens dans ce contexte) puisse réussir, il faut, me semble-t-il, qu'elle soit simple à comprendre, qu'elle ne concerne que très peu d'éléments, qu'elle soit considérée par tous comme une amélioration, qu'elle bénéficie d'une grande publicité et qu'elle devienne, si l'on peut dire, un effet de mode. Il faut évidemment que toute la presse et toutes les maisons d'édition s'y conforment. Il y a peut-être d'autres éléments à prendre en considération. Pourquoi les réformes de 1838 et de 1878 ont-elles réellement changé l'orthographe du peuple et pas les rectifications de 1990 ? Est-ce que cela tient au terme employé ? à l'époque ? Faut-il attendre un peu ? Pour l'Éducation nationale, « l'orthographe révisée est la référence ». Peut-être les prochaines générations adopteront-elles cette orthographe, si tant est que l'orthographe demeure une chose importante.
L'orthographe et la typographie me plaisent dans leur état actuel, mais je ne suis pas obstinément défavorable à des changements. À mon sens, l'essentiel est que les réformateurs tiennent compte de notre rapport affectif à l'orthographe.
Dernière modification par Klausinski le ven. 21 févr. 2014, 22:08, modifié 1 fois.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
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Jacques
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Message par Jacques »

Je suis entièrement d'accord avec cet avis, qui fait le tour de la situation en explorant ses divers aspects.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Klausinski a écrit : Pour l'Éducation nationale, « l'orthographe révisée est la référence ». Peut-être les prochaines générations adopteront-elles cette orthographe, si tant est que l'orthographe demeure une chose importante.
Vous énoncez, Klausinski, un fait et émettez une opinion de la manière que je l'aurais fait.
J'observe que le correcteur d'orthographe de Windows 8 tient compte des régularisations de 1990 et je pense que, le moindre effort l'emportant souvent, lesdites régularisations ont de bonnes chances de s'imposer (à moyen terme), quand il s'agit par exemple de la suppression de l'accent circonflexe sur les I de naître ou paraître. Je regretterai alors que plus rien ne rende compte de la présence d'un S dans les étymons nascere et parascere.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Malheureusement, presque personne ne se soucie plus aujourd'hui de l'étymologie. Outre le hideux « paralympique » qui aurait dû, en bonne logique, être « parolympique », tout simplement parce que l'étymon « lympique » n'existe pas, il existe un organisme de récupération des vieilles ampoules électriques, du nom de « recylum ». L'auteur de cette absurdité a certainement pensé que recycler se segmentait en re-cy-cler.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Thypot
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Message par Thypot »

Je rencontre en ce moment une difficulté au sujet du pluriel des noms composés. Je viens seulement de m'apercevoir que le fait de mettre un s, dans certains cas, au nom ou à l'adjectif d'un mot composé résultait des rectifications orthographiques de 1990.

Or, je veux être cohérent, et soit je n'applique aucune règle préconisée par les rectifications, soit que je les applique toutes.

Quelles sont donc les règles « traditionnelles » relatives au pluriel des noms composés ?
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Sur ce site de l'Académie française les modifications de 1990 concernant les mots composés sont expliquées aux pages 3 et 9. Les règles d'avant 1990 y font également l'objet de commentaires, parfois pour en dénoncer les illogismes.
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Ernest de la Coquecigrue
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Message par Ernest de la Coquecigrue »

En somme, même si l'on peut tirer quelques règles générales en fonction de la nature des mots qui constituent le nom composé (par exemple le cas verbe + substantif dont on a parlé il y a quelques jours), l'affaire est complexe, les exceptions sont nombreuses, les dictionnaires se contredisent, et une certaine tolérance est nécessairement de mise.

Si les rectifications ont le mérite d'avoir simplifié les choses, elles ont aussi apporté leur lot de bizarreries (par exemple un sèche-cheveu, des sèche-cheveux, ce qui prend toutefois tout son sens dans le cas du professeur Nimbus :)).
Thypot a écrit :Qui songerait aujourd'hui à écrire « weekend », « paraitre », « cout » ou « réglementaire » ?
Parmi les rectifications qui sont le plus susceptibles de surprendre un non-initié, je pense à ognon, exéma, nénufar, charriot, combattif. Ces nouvelles graphies ont de solides arguments en leur faveur, mais il est difficile de ne pas être choqué la première fois qu'on les aperçoit !

Dans votre dernier exemple, réglementaire correspond à la graphie traditionnelle ; l'orthographe rectifiée est règlementaire. :)
Dernière modification par Ernest de la Coquecigrue le lun. 03 mars 2014, 13:30, modifié 3 fois.
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Jacques
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Message par Jacques »

Autant que je me rappelle, cette règle veut qu'en fait, l'accord se fasse sur le second mot en fonction du singulier ou du pluriel marqué par l'article, et non en fonction du nombre composant le deuxième élément, ce qui expliquerait (mais ne justifie pas) l'histoire du sèche-cheveu. Je trouve que c'est un brin loufoque. Je suppose qu'on a aussi un porte-bagage, des porte-bagages.
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Ernest de la Coquecigrue
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Message par Ernest de la Coquecigrue »

C'est exactement ça. :)
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Peut-être porte-bagage est-il un peu plus facile à admettre que sèche-cheveu, l'hypothèse d'un seul bagage porté par l'accessoire considéré étant moins sotte que celle du cheveu unique séché par l'appareil électrique !
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Thypot
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Message par Thypot »

C'est bien plus confus que je ne le pensais. Cela confirme que l'on a sans doute besoin d'une vraie réforme de l'orthographe, qui viendrait clarifier ces règles et recommandations.

En attendant, je retiens :
- que pour un mot composé d'un verbe et d'un nom, le verbe est invariable, et le nom prend la marque du pluriel sauf lorsqu'il désigne une chose indénombrable ou unique (« porte-monnaie », par exemple) ;
- que pour un mot composé de deux noms, les deux noms prennent la marque du pluriel, sauf lorsqu'il désigne une chose indénombrable ou unique (« timbres-poste », par exemple) ;
- que pour un mot composé d'un nom et d'un adjectif, les deux prennent la marque du pluriel, à quelques exceptions près (« micro-ondes », par exemple) ;
- que pour un mot composé d'un adverbe et d'un nom, l'adverbe est invariable, et le nom est au pluriel ;
- que pour un mot composé de deux verbes, ou formant une proposition, tout est invariable.

Il s'agit, je crois, des règles traditionnelles, n'est-ce pas ?

Par ailleurs, je n'aime pas l'agglutination des mots composés, et j'utilise toujours des traits d'union, sauf pour les exceptions que l'on sait.
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Thypot a écrit :- que pour un mot composé d'un nom et d'un adjectif, les deux prennent la marque du pluriel, à quelques exceptions près (« micro-ondes », par exemple) ;
Il ne me semble pas que micro-ondes soit composé d'un nom et d'un adjectif, j'y verrais plutôt (dans l'ordre évidemment) un préfixe et un nom.
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Jacques
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Message par Jacques »

C'est un préfixe, auquel on applique la règle du trait d'union pour éviter d'avoir, soit un hiatus soit une voyelle répétée.
Mais les principes donnés par Thypot doivent tenir compte de la logique : on écrit un hors-d'œuvre, des hors-d'œuvre parce que, si on décompose le mot, on se rend compte qu'œuvre, pris dans le sens d'élément dominant, signifie « la partie essentielle du repas », qu'on appelle plat principal et que l'on désigne ainsi ce qui est en dehors de l'œuvre.
Le casse-tête s'épaissit.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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