Liaisons fort mal-t-à propos
- Jacques-André-Albert
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Re: Liaisons fort mal-t-à propos
L'adjectif humble est souvent enchaîné sans liaison. Il commence pourtant par un h d'origine latine, donc muet. Sont considérés comme h aspirés ceux qui sont d'origine germanique, parce qu'ils ont gardé une trace de l'attaque du mot dans ces langues : hanche, harnais, heaume, hache, etc.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Yeva Agetuya
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Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Il est intéressant de connaître la règle. Merci.
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Vous avez raison de le rappeler régulièrement ;
viewtopic.php?p=100067&hilit=Humble+liaison#p100067
viewtopic.php?p=108222&hilit=Humble+liaison#p108222
Pour l'instant, la faute touche l'adjectif seulement, mais heureusement pas le nom : je crois qu'on dit encore l'humilité et non la humilité !
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Pour l'instant, la faute touche l'adjectif seulement, mais heureusement pas le nom : je crois qu'on dit encore l'humilité et non la humilité !
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Bien sûr. Et il faut aussi en connaître les exceptions (par exemple le héros, l'héroïne).
- Yeva Agetuya
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Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Le h est devenu aspiré sous l’influence de héraut.
Lequel héraut vient du francique heriwald.
Lequel héraut vient du francique heriwald.
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
On est généralement plus enclin à profiter du h pour éviter les homonymies : l'anse, la Hanse, l'anche, la hanche,...
On a peut-être voulu éviter les Z hėros.
On a peut-être voulu éviter les Z hėros.
- Jacques-André-Albert
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Re: Liaisons fort mal-t-à propos
2018, 2021, 2024, je suis régulierLeclerc92 a écrit : ↑mer. 24 janv. 2024, 11:17 Vous avez raison de le rappeler régulièrement ;
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Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Absolument. À 2027 !
- Perkele
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Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Jacques-André-Albert a écrit : ↑mer. 24 janv. 2024, 10:45 L'adjectif humble est souvent enchaîné sans liaison. Il commence pourtant par un h d'origine latine, donc muet. Sont considérés comme h aspirés ceux qui sont d'origine germanique, parce qu'ils ont gardé une trace de l'attaque du mot dans ces langues : hanche, harnais, heaume, hache, etc.
Et je reviens avec l'hyène...
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Oui, il y a beaucoup de mots qui portent traces d'hésitation sur l'aspiration, comme le hiéroglyphe qui vient du grec, ou inversement hanséatique, qui s'est souvent écrit anséatique jadis, malgré l'origine germanique.
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Huile commence par un "h" non étymologique, comme huitre et huit, qui a été ajouté à l'époque ou "u" et "v" se confondaient et où l'on a souhaité éviter de lire vile, vitre et vit au lieu de uile, uitre et uit.
Ce "h" graphique est donc muet, non aspiré.
Personne ne dirait, je crois, "la huile" et "de huile" au lieu de "l'huile" et "d'huile".
Mais les choses sont moins simples pour le verbe dériver "huiler". On rencontre très souvent les formes "le huiler" ou "de huiler" au lieu de "l'huiler" et "d'huiler".
J'entendais hier un commissaire-priseur dire, à la télévision, parlant d'un objet en bois à restaurer : « Il faut le huiler ».
Ici même, une de nos anciennes participantes distinguées écrivait il y a treize ans : « Comme je n'attaque personne ici, je ne juge pas nécessaire d'émousser le tranchant de mes propos par une des formules suggérées par notre modératrice afin de huiler les rouages du forum. »
Je ne peux pas dire que cette manière de dire m'écorche les oreilles. Peut-être préfère-t-on de cette manière garder une bonne intelligibilté aux mots qu'on prononce, alors que la liaison et l'élision avec "le" ou "de" les rendent parfois moins aisément reconnaissables.
La faute n'est pas récente ; on la trouve déjà dans des livres au 19e siècle, par exemple ici et là. Mais elle devient peut-être moins rare.
Ce "h" graphique est donc muet, non aspiré.
Personne ne dirait, je crois, "la huile" et "de huile" au lieu de "l'huile" et "d'huile".
Mais les choses sont moins simples pour le verbe dériver "huiler". On rencontre très souvent les formes "le huiler" ou "de huiler" au lieu de "l'huiler" et "d'huiler".
J'entendais hier un commissaire-priseur dire, à la télévision, parlant d'un objet en bois à restaurer : « Il faut le huiler ».
Ici même, une de nos anciennes participantes distinguées écrivait il y a treize ans : « Comme je n'attaque personne ici, je ne juge pas nécessaire d'émousser le tranchant de mes propos par une des formules suggérées par notre modératrice afin de huiler les rouages du forum. »
Je ne peux pas dire que cette manière de dire m'écorche les oreilles. Peut-être préfère-t-on de cette manière garder une bonne intelligibilté aux mots qu'on prononce, alors que la liaison et l'élision avec "le" ou "de" les rendent parfois moins aisément reconnaissables.
La faute n'est pas récente ; on la trouve déjà dans des livres au 19e siècle, par exemple ici et là. Mais elle devient peut-être moins rare.
- freddy.lombard
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- Inscription : sam. 08 juin 2024, 17:07
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
J'ai entendu prononcer le Crédit « t'Agricole » par des anciens et plus particulièrement originaires du Grand Est.
Doit-on faire la liaison ?
Doit-on faire la liaison ?
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Liaison facultative entre le nom et l'adjectif qui suit : Crédit(_)Agricole.
Liaison obligatoire entre l'adjectif et le nom qui suit : petit_oiseau.
Liaison obligatoire entre l'adjectif et le nom qui suit : petit_oiseau.
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Voilà une question fort pertinente, cher Freddy.
Le phénomène des liaisons est probablement l'un des plus complexes de notre langue orale, d'abord parce qu'il y a beaucoup de prétendues règles, mais également beaucoup d'exceptions, ensuite parce qu'on distingue toujours un usage en discours soutenu et un usage en discours normal, le premier se caractérisant par un nombre beaucoup plus élevé de liaisons réalisées, enfin parce que c'est un terrain où les choses évoluent beaucoup avec le temps.
Quand j'écoute les liaisons enseignées dans le chant classique, je suis étonné du nombre de liaisons qui sont faites et que je ne ferais pas spontanément ; sans doute faut-il bien les faire pour réduire les hiatus tant craints des poètes.
Dans "crédit agricole", prononcé sans liaison, assurément on a un beau (ou un bel) hiatus. Mais cela suit la règle donné par Pierre Fouché dans son Traité de Prononciation :
Que conclure pour le Crédit agricole ? Qu'en discours normal, il me semble qu'on ne fait pas la liaison. C'est ce qu'indique sur cette page une note tirée de Pierre Encrevé : Note : Traditionnellement il n’y a pas de liaison, par exemple : on prononce « crédit agricole » [kʁedi aɡʁikɔl] et non [kʁedit‿aɡʁikɔl]. Cependant, certaines personnes font la liaison par hypercorrection due à l’orthographe.(Pierre Encrevé, La liaison avec et sans enchaînement, Paris : Seuil, 1988.)
Mais il semble aussi possible, en discours plus soutenu, et surtout en considérant l'entité Crédit agricole comme une locution toute faite, de sentir le besoin de faire la liaison. Le même Pierre Encrevé note dans cet autre document que Mitterrand en 1981 a prononcé l'expression une fois avec liaison, une fois sans liaison !
Bref, comme l'a très bien dit Jehan, on est dans un cas de liaison facultative, mais à tendance rarement réalisée pourrait-on ajouter.
Je n'ai pas abordé le point de l'aspect régional que Freddy mentionne. Il est tout à fait possible que l'usage des liaisons ne soit pas non plus tout à fait homogène sur le territoire et que certaines régions les fassent plus que d'autres. J'avoue ne pas avoir de documentation sur la question.
Le phénomène des liaisons est probablement l'un des plus complexes de notre langue orale, d'abord parce qu'il y a beaucoup de prétendues règles, mais également beaucoup d'exceptions, ensuite parce qu'on distingue toujours un usage en discours soutenu et un usage en discours normal, le premier se caractérisant par un nombre beaucoup plus élevé de liaisons réalisées, enfin parce que c'est un terrain où les choses évoluent beaucoup avec le temps.
Quand j'écoute les liaisons enseignées dans le chant classique, je suis étonné du nombre de liaisons qui sont faites et que je ne ferais pas spontanément ; sans doute faut-il bien les faire pour réduire les hiatus tant craints des poètes.
Dans "crédit agricole", prononcé sans liaison, assurément on a un beau (ou un bel) hiatus. Mais cela suit la règle donné par Pierre Fouché dans son Traité de Prononciation :
Il note en remarque :Lorsque deux mots ne sont pas séparés par un silence, on ne fait pas non plus la liaison dans les cas suivants :
1) Entre une substantif singulier
a) et un adjectif
Un enfant | intelligent, un teint | olivâtre, un vent | impétueux, un bruit | affreux...
et ajoute plus loin :REM -- On fait toutefois la liaison dans les locutions toute faites : accent∩aigu, droit∩acquis, un temps∩affreux [...], fait∩accompli [...] fait∩exprès, [...], le cas∩échéant. [...] qu'un sang∩impur de la Marseillaise...
(Beaucoup de ces exemples pourront paraître vieillis au lecteur d'aujourd'hui. L'ouvrage date des années 50, c'est vieux).STYLE SOUTENU. On peut entendre la liaison dans un certain nombre de locutions : [...] le salut∩éternel, le sang∩humain...
Que conclure pour le Crédit agricole ? Qu'en discours normal, il me semble qu'on ne fait pas la liaison. C'est ce qu'indique sur cette page une note tirée de Pierre Encrevé : Note : Traditionnellement il n’y a pas de liaison, par exemple : on prononce « crédit agricole » [kʁedi aɡʁikɔl] et non [kʁedit‿aɡʁikɔl]. Cependant, certaines personnes font la liaison par hypercorrection due à l’orthographe.(Pierre Encrevé, La liaison avec et sans enchaînement, Paris : Seuil, 1988.)
Mais il semble aussi possible, en discours plus soutenu, et surtout en considérant l'entité Crédit agricole comme une locution toute faite, de sentir le besoin de faire la liaison. Le même Pierre Encrevé note dans cet autre document que Mitterrand en 1981 a prononcé l'expression une fois avec liaison, une fois sans liaison !
Bref, comme l'a très bien dit Jehan, on est dans un cas de liaison facultative, mais à tendance rarement réalisée pourrait-on ajouter.
Je n'ai pas abordé le point de l'aspect régional que Freddy mentionne. Il est tout à fait possible que l'usage des liaisons ne soit pas non plus tout à fait homogène sur le territoire et que certaines régions les fassent plus que d'autres. J'avoue ne pas avoir de documentation sur la question.
- Yeva Agetuya
- Messages : 2201
- Inscription : lun. 22 juin 2015, 1:43
Re: Liaisons fort mal-t-à propos
Il m'étonnerait de découvrir un enregistrement d'avant 1950 où l'on chante "qu'un sang guimpur abreuve nos sillons."
Idem pour le droit taquis et le temps zaffreux.