Pléonasme ou pas ?
- Jacques
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Pléonasme ou pas ?
Il ne fera de doute pour personne, je suppose, que l'expression fort répandue « prévenir d'avance » est un pléonasme, puisque dans le verbe nous avons le préfixe pré qui signifie avant ou d'avance. Pourtant prévenir se dit aussi lorsqu'on avertit quelqu'un, non pas d'un évènement qui se produira dans l'avenir, mais tout aussi bien d'un fait qui est en train de se produire, ou même qui s'est déroulé dans le passé. Bizarre, non ?
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
En est-il bien ainsi, Jacques? On dira peut-être:
"Je voudrais te prévenir que le patron s'est fâché hier contre toi" parce que, même si l'évènement est passé, la personne l'ignore encore. Il y a donc une sorte de "futur implicite" pour la personne à qui on s'adresse.
Mais sinon, s'il s'agit vraiment d'un fait présent ou passé sans nuance de futur, ne faut-il pas plutôt utiliser "avertir"?
"Je voudrais te prévenir que le patron s'est fâché hier contre toi" parce que, même si l'évènement est passé, la personne l'ignore encore. Il y a donc une sorte de "futur implicite" pour la personne à qui on s'adresse.
Mais sinon, s'il s'agit vraiment d'un fait présent ou passé sans nuance de futur, ne faut-il pas plutôt utiliser "avertir"?
Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet (Courteline)
- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
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Les deux verbes, avertir ou prévenir sont équivalents. Le TLF dit à prévenir : "synon. annoncer, faire savoir, informer. "
Il y a pléonasme quand on dit je te préviens d'avance mais pas antinomie dans Je te préviens avec retard (ou après coup).
Le sens premier du verbe était "devancer pour empêcher", il reste dans le proverbe mieux vaut prévenir que guérir, et s'emploie encore avec cette acception même dans le langage courant. Il y a bien une notion de passé si on dit "Je te préviens qu'hier le voisin est passé nous voir pour nous inviter" ou dans "Nous n'avons pas pu venir parce que nous avons été prévenus trop tard"
Il y a pléonasme quand on dit je te préviens d'avance mais pas antinomie dans Je te préviens avec retard (ou après coup).
Le sens premier du verbe était "devancer pour empêcher", il reste dans le proverbe mieux vaut prévenir que guérir, et s'emploie encore avec cette acception même dans le langage courant. Il y a bien une notion de passé si on dit "Je te préviens qu'hier le voisin est passé nous voir pour nous inviter" ou dans "Nous n'avons pas pu venir parce que nous avons été prévenus trop tard"
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- Claude
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- Localisation : Décédé le 24 août 2022. Humour et diplomatie. Il était notre archiviste en chef.
J'ai remarqué dans le TLF que dans les différents exemples, outre son emploi à l'infinitif, "prévenir" est toujours conjugué à un temps égal ou antérieur à la proposition faisant l'objet de la "prévention" :
- Je vous préviens que je suis méchant,
- Je vous préviens que demain je ne viendrai pas,
- Je vous avais pourtant prévenu que je ne pourrais pas venir.
- Je vous préviens que je suis méchant,
- Je vous préviens que demain je ne viendrai pas,
- Je vous avais pourtant prévenu que je ne pourrais pas venir.
- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
En effet, je n'y avais pas fait attention.claude a écrit :J'ai remarqué dans le TLF que dans les différents exemples, outre son emploi à l'infinitif, "prévenir" est toujours conjugué à un temps égal ou antérieur à la proposition faisant l'objet de la "prévention" :
- Je vous préviens que je suis méchant,
- Je vous préviens que demain je ne viendrai pas,
- Je vous avais pourtant prévenu que je ne pourrais pas venir.
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- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
S'insinuer, du latin insinuare « introduire, faire pénétrer » (avec le préfixe in, « dans »).
Insidieux : en creusant bien, on trouve son origine dans insidiae, le fait de s'établir, de s'installer dans un endroit. Donc il y a bien le préfixe in (in sidere, être assis, installé). Mais l'évolution sémantique a estompé cette notion. Par association d'idées, insidiae évoque le fait d'être en embuscade (caché pour tendre un traquenard) et mène à la notion de perfidie, de piège où le préfixe perd sa fonction. La mutation en insidiosus explique la forme française insidieux qui, par la même occasion, prend ce sens donnant l'idée d'une chausse-trape, d'un piège tendu de manière trompeuse.
Il n'y a donc pas de pléonasme ; si vous dites : « Il s'est insinué insidieusement dans la conversation », cela signifie qu'il s'y est glissé sans être invité, avec un air trompeur de quelqu'un de sympathique et de gentil, dans l'intention de semer la contradiction et la perturbation. Nous avons tout au plus une légère allitération.
Insidieux : en creusant bien, on trouve son origine dans insidiae, le fait de s'établir, de s'installer dans un endroit. Donc il y a bien le préfixe in (in sidere, être assis, installé). Mais l'évolution sémantique a estompé cette notion. Par association d'idées, insidiae évoque le fait d'être en embuscade (caché pour tendre un traquenard) et mène à la notion de perfidie, de piège où le préfixe perd sa fonction. La mutation en insidiosus explique la forme française insidieux qui, par la même occasion, prend ce sens donnant l'idée d'une chausse-trape, d'un piège tendu de manière trompeuse.
Il n'y a donc pas de pléonasme ; si vous dites : « Il s'est insinué insidieusement dans la conversation », cela signifie qu'il s'y est glissé sans être invité, avec un air trompeur de quelqu'un de sympathique et de gentil, dans l'intention de semer la contradiction et la perturbation. Nous avons tout au plus une légère allitération.
Dernière modification par Jacques le sam. 08 mars 2008, 9:06, modifié 1 fois.
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- Perkele
- Messages : 12915
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 18:26
- Localisation : Deuxième à droite après le feu
Notre maire a dit "Je suis en charge de la responsabilité de cette ville depuis sept ans" et "nous coopérons conjointement avec M. X (maire de la commune voisine)". C'est quelqu'un qui n'a pas peur des pléonasmes (ni de l'influence anglo-saxonne) ! ![[clin d'oeil] :wink:](./images/smilies/icon_wink.gif)
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Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.