Rien du tout

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Jacques
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Rien du tout

Message par Jacques »

Je suis en train de lire un ouvrage dont le titre importe peu. Dans l'ensemble, à part quelques bavures, la langue y est honorablement respectée. Mais je tombe en arrêt sur ceci : « Ce sont des petits riens du tout qui rendent la vie agréable ».
Selon moi il y aurait faute. Si rien est un substantif signifiant une certaine chose, ou encore un pronom indéfini, ou encore un adverbe, en revanche je vois rien du tout comme une locution adverbiale, donc invariable et ne pouvant être précédée d'un article défini ou indéfini.
Il suffisait d'écrire ce sont des petits riens.
Comment l'envisagez-vous ? Peut-on néanmoins l'employer en fonction de pronom ou de substantif ? Rien du tout dans mon idée est synonyme de « aucune chose », c'est donc l'affirmation d'une non-existence, d'un vide, d'une absence et il ne pourrait désigner de petites choses ou de menus faits.
J'aimerais bien cependant connaître vos avis.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Bernard_M
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Message par Bernard_M »

Un auteur qui m'est inconnu a écrit :« Ce sont des petits riens du tout qui rendent la vie agréable »
Question liminaire : Jacques, de quand l'ouvrage dont vous tirez cette citation date-t-il ?
Le substantif un rien du tout existe dans la langage populaire comme l'atteste la citation de Balzac (page CNRTL (IV, A. 5.).

- S'il s'agit de personnes rendant la vie agréable, alors son expression est acceptable. Cela est peu probable, mais, en l'absence de contexte, on ne peut exclure cette acception. Se pose la question de l'orthographe du pluriel.
Ayant vainement cherché, en l'absence de toute indication, à l'exemple de sot-l'y-laisse, j'aurais tendance à le considérer comme un nom commun invariable. J'écrirais donc des rien-du-tout. Je rajouterais les tirets(*) car, en faisant abstraction du sens, je rapprocherais ce substantif de moins-que-rien que l'Académie orthographie de cette manière et qu'elle définit ainsi :
Loc. Moins que rien, se dit d'une chose sans importance ou sans valeur, d'une personne qu'on méprise. Ne parlons plus de cela, c'était moins que rien. Cet homme-là moins que rien ou, subst. (fam.) est un moins-que-rien.

- Mais sans doute l'auteur veut-il seulement insister de façon significative sur le peu de valeur que peuvent avoir certaines choses qui rendent cependant la vie agréable.
Dans ce cas, écrire des riens aurait suffit.
En rajoutant du tout, il complique inutilement la compréhension d'une chose simple.
Des petits riens sont quand même quelque chose. En revanche, rien du tout c'est logiquement moins que rien ; c'est donc le néant. Pris dans cette acception, des rien-du-tout qui contribuent à qqch. devient illogique voire incompréhensible.

Maladresse ou faute, n'étant en rien spécialiste de l'écriture, je me garderais bien d'un quelconque qualificatif.

(*) suivant en cela les recommandations contenues dans le RAPPORT DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA LANGUE FRANÇAISE, publié dans les documents administratifs du Journal officiel du 6 décembre 1990 (IV 1.)
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Jacques
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Message par Jacques »

Merci de votre intéressant commentaire. L'ouvrage a été publié il y a quelques mois, l'auteur est Marc Lévy, il est donc français et ce n'est pas une maladresse de traduction. J'avais, comme vous, envisagé l'invariabilité comme plus acceptable. Les traits d'union renforcent la conception d'une expression toute faite qui ne s'analyse pas selon ses éléments. J'adopte ce point de vue. En fait, c'est le pluriel qui m'a choqué d'emblée et m'a amené à m'interroger.
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