Perles d'inculture 2

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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Merci, Claude. Je venais de le trouver moi-même ! Larousse l'illustre à l'aide de Rentré chez lui, sa femme était malade.
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Jacques
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Message par Jacques »

Alors, allons-y pour l'anacoluthe. Chapeau à Claude.
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Claude
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Message par Claude »

Je l'ai trouvé dans Wikipédia avec l'exemple de Jacques, paragraphe Cas particulier.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Je connais l'anacoluthe depuis ma petite enfance, du moins le mot. :lol:
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Jacques
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Message par Jacques »

Oui, bien sûr ! Je ne suis pas très au fait des aventures de Tintin.

Pour l’anacoluthe, j’ai ces exemples tirés de mon dictionnaire de rhétorique :
– Le nez de Cléopatre, s’il eût été plus court, toute la face de la terre aurait été changée (Pascal)
– Ils font un barouf au comptoir, que je suis forcé de dominer (Céline)
Avec ce dernier nous nous rapprochons davantage de nos exemples.
Pour l’anantapodote il me semble qu’on s’en éloigne. Les exemples que j’ai sont très longs, c’est fastidieux à recopier. Il ne paraît pas coller à ce que nous évoquons.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

J'ai un doute, Claude, sur l'anantapodoton qui serait contenu dans « Après avoir auditionné plusieurs policiers et perquisitionné pendant de nombreuses heures, la piste interne serait privilégiée. »
Découvrant ce mot aujourd'hui, je lis sur la Toile des explications comme ce qui suit (L'Auteur Inspiré) :

L'anantapodoton apparaît lorsqu'on commence une phrase comprenant une alternative en omettant de donner le deuxième terme. Exemple:

"D'une part, elle me plait, oui, elle me plait."
On s'attend logiquement à ce que la phrase continue avec l'expression "d'autre part" pour conclure l'alternative. Mais on ne la retrouve pas, à notre grande surprise! L'effet obtenu renforce le sentiment amoureux de celui qui prononce la phrase: alors qu'il s'apprêtait à faire la liste des points positifs et négatifs de sa bien-aîmée, il s'arrête en cours de route pour ne rester que sur le point positif.

Cette figure de style ressemble à s'y méprendre à une erreur de langage et son utilisation volontairement poétique n'est pas si facile. Toutefois, la surprise face à cette disparition peut provoquer soit le rire...

"Quelle est la différence entre ta mère?"
Quelques poètes un peu plus raffinés se sont servis de l'anantapodoton pour provoquer quelque effet, comme cet exemple de Paul Valéry:

« Les uns, dirait-on, ne songent jamais à la réponse silencieuse de leur lecteur. »
En omettant "les autres", Valéry illustre bien cette absence de réponse.


Je ferais par ailleurs une grande différence entre les deux exemples que vous proposez, Jacques. Dans la phrase de Pascal Le nez de Cléopâtre n'a aucune fonction grammaticale (sauf si l'on imagine tout un passage sous-entendu) : je m'interdis de construire ainsi. Céline me paraît par contre respectueux de la grammaire, chaque mot de sa phrase a une fonction nette : la légère gêne éventuelle vient de ce que l'antécédent du pronom relatif que (barouf) ne le précède pas immédiatement. Mais en grammaire moderne on peut voir ledit antécédent dans un barouf au comptoir.
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Claude
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Message par Claude »

André (G., R.) a écrit :J'ai un doute, Claude, sur l'anantapodoton qui serait contenu dans « Après avoir auditionné plusieurs policiers et perquisitionné pendant de nombreuses heures, la piste interne serait privilégiée. » [..]
Mon anantapodoton ne faisait allusion qu'à l'extrait de La Fontaine cité par Jacques concernant le vieillard graveur. :wink:
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Jacques
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Message par Jacques »

André (G., R.) a écrit :Je ferais par ailleurs une grande différence entre les deux exemples que vous proposez, Jacques. Dans la phrase de Pascal Le nez de Cléopâtre n'a aucune fonction grammaticale (sauf si l'on imagine tout un passage sous-entendu) : je m'interdis de construire ainsi. Céline me paraît par contre respectueux de la grammaire, chaque mot de sa phrase a une fonction nette : la légère gêne éventuelle vient de ce que l'antécédent du pronom relatif que (barouf) ne le précède pas immédiatement. Mais en grammaire moderne on peut voir ledit antécédent dans un barouf au comptoir.
J'attendais confirmation de ma propre impression. Nous sommes donc d'accord sur ce point. Je ne vois guère de parenté entre les deux phrases, venues toutes deux du Dictionnaire de rhétorique de Michel Pougeoise, et la première procéderait peut-être plutôt de la dislocation à gauche (à confirmer). Il donne une autre citation de Céline : « Poutant les flics, un peu la veille, ils l'avaient traité encore pire ».
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Qu’on me permette de revenir sur l’anacoluthe.
Je lis chez un écrivain à succès dont le français est généralement correct :

Rien ne vaut la solitude. Pour être parfaitement heureux, il me manque quelqu’un à qui l’expliquer.

Soient les deux phrases :

Pour être parfaitement heureux, j’ai besoin de quelqu’un à qui l’expliquer.
Pour être parfaitement heureux, quelqu’un à qui l’expliquer m’est nécessaire.


Dans la première j’, sujet du verbe conjugué (ai besoin), est aussi le « sujet » du verbe à l’infinitif être. Aucune rupture de construction.
La seconde phrase est peu élégante, mais elle a surtout l’inconvénient de pouvoir être interprétée comme signifiant que quelqu’un n’est pas parfaitement heureux. Anacoluthe.
Selon moi, la formulation de l’écrivain avec la forme impersonnelle il me manque comporte cette même anacoluthe. Le « sujet » du verbe à l’infinitif et celui du verbe principal n’y sont pas identiques.

La partie en rupture de construction peut ne pas contenir d’élément verbal.
Sans un sou, j’ai pu acheter des sardines au poissonnier est correct. Mais Sans un sou, le poissonnier a accepté de me vendre des sardines ne l’est pas, sauf si l’on veut dire que le poissonnier est ruiné ! :lol:
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Jacques
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Message par Jacques »

Ma conclusion est qu'il est toujours préférable d'éviter les ambigüités en formant des phrases sans équivoque : Je n'avais pas un sou mais j'ai quand même pu... ou Bien que n'ayant pas un sou j'ai quand même pu...
Le reste n'est qu'affaire de rhétorique, c'est-à-dire de spéculation intellectuelle. On peut toujours, évidemment, raisonner pour l'amour de l'art, comme M. Jourdain avec les beaux yeux de la marquise, mais dans la pratique ce qui se conçoit bien s'énonce clairement.
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Claude
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Message par Claude »

André (G., R.) a écrit :[...] Rien ne vaut la solitude. Pour être parfaitement heureux, il me manque quelqu’un à qui l’expliquer.[...]
Il faut vivre dans les forêts de Sibérie pour écrire cela. :wink: :lol:
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Jacques
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Message par Jacques »

Claude a écrit :
André (G., R.) a écrit :[...] Rien ne vaut la solitude. Pour être parfaitement heureux, il me manque quelqu’un à qui l’expliquer.[...]
Il faut vivre dans les forêts de Sibérie pour écrire cela. :wink: :lol:
Ou dans celles de l'Antarctique.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Claude a écrit :[Il faut vivre dans les forêts de Sibérie pour écrire cela. :wink: :lol:
La « bibliothèque sonore » pour laquelle je « travaille » m'a demandé cette année d'être candidat à un concours de « donneurs de voix » organisé à l'échelle nationale. Quatre nouvelles de cet écrivain en font l'objet. Elles m'ont incité à lire d'autres livres de lui, dont celui d'où vient le passage cité. Cela est très anecdotique. Ce qui l'est moins, c'est le vieillissement de la population française et le nombre croissant de déficiences visuelles liées à l'âge. Si vous connaissez des personnes que cela concerne, vous pouvez les informer, si nécessaire, de l'existence des bibliothèques sonores et leur préciser qu'un certificat médical est nécessaire pour qui veut bénéficier de leurs services, qui sont gratuits par ailleurs.
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Claude
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Message par Claude »

Ainsi vous avez lu ce livre.
Par ailleurs je connais une personne de ma commune qui est abonnée à une bibliothèque sonore.
Jacques, je croyais qu'elles se trouvaient dans l'Arctique.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Claude a écrit :Ainsi vous avez lu ce livre.
C'est bien de lui qu'il s'agit. Pour un écrivain vivant, j'hésite à citer le nom et le titre de l'œuvre, me méfiant un peu de ce qui pourrait être pris pour une publicité déguisée.
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