Perles d'inculture 4

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Jacques
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Message par Jacques »

Voilà : vous allez dans le même sens que moi, et démontrez avec davantage de précision ce qui ne tourne pas rond dans la formulation.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Claude
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Message par Claude »

Je souscris également. Bien qu'elle ne comporte aucune ambigüité, cette phrase-là n'est pas construite selon les règles de l'art.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Jacques a écrit :Qui sert bien son pays n'a pas besoin d'aïeux (Voltaire). Il paraît que l'anacoluthe est dans la suppression de celui devant qui selon Michel Poujade.
Je vais où vous allez, pour où vous allez : anacoluthe ! Je veux bien, mais je m'y perds.
Si on en croit tout le reste (trop long pour que je le rapporte ici), elle revêt des formes variées. Ce n'est pas ce qui m'encouragerait à faire de la rhétorique. Le poisson s'y noie.
Les exemples que vous citez me semblent pourtant montrer en quoi consiste la rupture de construction. Par ailleurs ils me donnent tort sur un point, plus exactement, peut-être, ils complètent ou nuancent mes explications précédentes : certes une partie de la construction manque, mais ce peut être le début, ce n'est pas toujours la fin qui est supprimée : dans Qui sert bien son pays n'a pas besoin d'aïeux, Qui sert bien n'est pas interrogatif, Qui ne peut qu'y être un pronom relatif, dont manque l'antécédent celui : il est dans la nature même du pronom de remplacer un nom (ou un autre pronom). Même chose pour Je vais où vous allez : là aussi le pronom relatif est bien privé de son antécédent. Ne pas fournir l'antécédent d'un pronom relatif me paraît clairement constituer une rupture de construction. La difficulté que nous avons pour ces derniers exemples vient de ce que l'usage (c'est vraiment de lui qu'il faut parler ici) a entériné des formes bancales.
L'allemand (sans doute beaucoup d'autres langues aussi) aide à comprendre en quoi consiste la rupture en français. Le pronom relatif sujet s'y trouve sous les formes der, die, das et die (identiques à l'article). Derjenige, der, pour le masculin, correspond à celui qui (Derjenige, der ohne Sünde ist, werfe den ersten Stein !) (Celui qui est sans péché, [qu']il jette la première pierre.) Il n'est pas question, dans la langue de Goethe, de supprimer Derjenige et de faire commencer une telle phrase par der. Lorsqu'on trouve la tournure un peu lourde, on remplace derjenige, der par wer : Wer viel Geld hat, kann spekulieren. (Qui a beaucoup d'argent peut spéculer).
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Jacques
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Message par Jacques »

On ne peut parler bien que de ce qu'on connaît, et vous semblez en savoir beaucoup plus que moi ; j'ai lu votre message avec attention, mais je n'irai pas plus loin, la rhétorique m'étant quasiment inconnue. Je vous fais donc confiance.
À l'origine la rhétorique était inscrite dans la liste des rubriques du forum, mais nous en avons supprimé la mention, car le sujet restait vide depuis des années, et nous avons compris que cela n'intéressait personne ou presque, qu'elle dépasse les compétences des gens qui fréquentent ce lieu de réflexion.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Dans mon journal, ce matin :

Compost
45 000 tonnes de cet engrais à haute valeur agronomique seront produits...

Le sujet du verbe est au féminin pluriel (45 000 tonnes), le participe (produits) est accordé au masculin pluriel, tandis que le nom de référence possible (cet engrais) est au masculin singulier. Ne manque que le féminin singulier !
André (G., R.)
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Causalité

Message par André (G., R.) »

Elle est exprimée, entre autres, par des conjonctions de coordination et de subordination. Avez-vous remarqué combien l'utilisation de ces mots simples est parfois peu maîtrisée par certains de nos contemporains ?
La conjonction de coordination car est de plus en plus employée, dans la langue écrite en particulier, comme conjonction de subordination :

L'accident aurait eu lieu car la conductrice se serait endormie.

Cette phrase signifie que l'accident n'a peut-être pas eu lieu ! Ce n'est pas ce que veut dire son auteur : il veut insister sur le fait qu'il n'est pas certain de connaître la cause dudit accident. La notion de causalité est essentielle dans sa phrase, elle doit être exprimée par parce que.

Deux propositions indépendantes reliées par car se suffisent normalement à elles-mêmes, la partie précédant car doit avoir un sens autonome. Dans

Nous avons mangé beaucoup de pêches, car elles étaient bon marché,

deux informations sont fournies, à égalité d'importance, sans qu'aucune nécessite une connaissance de l'autre pour être comprise. La relation de causalité établie par car n'est certes pas inutile, mais elle n'est pas essentielle. Ne pas utiliser cette conjonction ne gêne guère : Nous avons mangé beaucoup de pêches, elles étaient bon marché.

Puisque et parce que ne tombent pas en désuétude pour autant, mais relient trop souvent des propositions principale et subordonnée sans rapport de causalité entre elles. J'ai entendu tout à l'heure à la radio quelque chose comme :

X est arrivé le premier, puisque le deuxième avait une minute de retard sur lui.

Dans cette dernière phrase, la subordonnée introduite par puisque n'indique pas pourquoi X est arrivé le premier, elle fournit la même information que la principale et la complète. Il me semble que l'on ne pourrait pas faire ce reproche à une phrase du genre :

Il est arrivé le premier, puisque les autres avaient abandonné !
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Claude
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Message par Claude »

Je reprends votre premier exemple.
C'est ce double conditionnel qui me dérange et si l'on remplace comme vous le dites judicieusement car par parce que, on doit énoncer ainsi la phrase : « L'accident a eu lieu (c'est une certitude) parce que la conductrice se serait endormie (c'est une éventualité).
Une phrase plus simple aurait suffi : « Un assoupissement de la conductrice serait à l'origine de l'accident » (et le tour est joué :lol: ).
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Claude a écrit : on doit énoncer ainsi la phrase : « L'accident a eu lieu (c'est une certitude) parce que la conductrice se serait endormie (c'est une éventualité).
Entièrement d'accord.
Je vous reconnais bien, avec la phrase plus simple que vous proposez ! Serait-on proche de la chacalerie ? :D
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Claude
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Message par Claude »

J'y ai pensé mais n'ai pas osé le dire. :oops:
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Jacques
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Message par Jacques »

Lu sur Internet : Mardi 16 décembre, la maire de Paris a adressé au ministre de l’intérieur un courrier appelant le gouvernement à...

La faute, pourtant grossière, est devenue, hélas ! commune. On n'envoie plus de lettres, mais des courriers.
La définition est claire : COURRIER Singulier collectif. L'ensemble des lettres, des journaux, etc., transportés par voie terrestre, maritime ou aérienne. L'heure du départ du courrier. La levée du courrier. Spécialt. L'ensemble des lettres reçues ou envoyées par une personne ou une collectivité. Porter son courrier à la poste. La concierge ne monte plus le courrier.
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Claude
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Message par Claude »

Par ailleurs, quand j'entends la maire je pense toujours à celle de Charles Trenet ; madame Hidalgo danserait-t-elle ?
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Jacques
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Message par Jacques »

Claude a écrit :Par ailleurs, quand j'entends la maire je pense toujours à celle de Charles Trenet ; madame Hidalgo danserait-t-elle ?
Je note : ministre de l'intérieur sans la majuscule obligatoire au nom du domaine dans lequel exerce le ministre (Intérieur).
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Claude a écrit :Par ailleurs, quand j'entends la maire je pense toujours à celle de Charles Trenet ; madame Hidalgo danserait-t-elle ?
Devant cette fluctuation dans le choix du genre, je tiens à préciser qu'à Bègles il convient de dire : Noël, mon maire. :lol:
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Claude a écrit : madame Hidalgo danserait-t-elle ?
:D

Avant de vous lire, Jacques, sur Français notre belle langue, je commettais parfois l'erreur consistant à confondre courrier et lettre. Merci, il est bon de rappeler le sens de chacun de ces mots, qu'il n'y a aucune raison d'intervertir. Le si sympathique courriel créé par nos amis québécois contribue malheureusement à la confusion.
Les Français si individualistes dans certains domaines suivent facilement, quand il s'agit de leur langue, des modes sans trop réfléchir à leur origine : courrier, bien que loin d'être un mot savant, est à la mode et est censé faire de son utilisateur quelqu'un qui ne se satisfait pas des mots les plus banals.
Il y a encore une vingtaine d'années l'adjectif judéo-chrétien s'employait peu. Là aussi un phénomène de mode s'en est emparé et il me semble l'entendre et le lire de plus en plus souvent à contresens. Un maire exprimait tout à l'heure sa satisfaction de pouvoir installer une crèche dans sa mairie, à la suite du jugement d'un tribunal, en parlant de la tradition judéo-chrétienne dans laquelle s'inscrit ladite crèche. Le christianisme a certes été fondé par un Juif, mais il représente aussi une rupture avec le judaïsme. Il me semble que la crèche de Noël n'est que chrétienne.
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Claude
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Message par Claude »

Jacques-André-Albert a écrit : [...] Devant cette fluctuation dans le choix du genre, je tiens à préciser qu'à Bègles il convient de dire : Noël, mon maire. :lol:
:lol:
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