Clore ou clôturer ?

Jacques · Message par **Jacques** » mar. 02 août 2011, 16:01

Je suppose que cette appellation de maison close signifie qu'elle n'a pas pignon sur rue, et qu'on la réserve aux initiés. C'est ce qu'on appelle un club fermé.

Dame Vérone a écrit :Une clôture n'est pas synonyme de maison close : si la première désigne l'espace réservé aux seuls membres d'un monastère, je m'interroge sur la dénomination de la seconde puisque ce genre de maison est assez... ouvert !

La réponse est peut-être là :
À propos des maisons closes : « Alors que leurs volets sont clos, ils sont signalés par une lanterne rouge que vient allumer la sous-maîtresse de la maison pendant les heures d'ouverture. Les prostituées n'avaient le droit d'en sortir que certains jours de la semaine, accompagnées par ces sous-maîtresses. »

codrila · Message par **codrila** » mar. 02 août 2011, 16:05

En ce qui me concerne( je ne peux parler pour les autres), mon but n'est pas de critiquer l'Academie mais de comprendre les raisons de son choix. Je ne puis suivre éventuellement ses recommandations que si je les comprends .

Dans ce cas précis , ce que j'avais indiqué ,grâce au dictionnaire de Féraud , illustré par le lien sur ces arrêts rendus par une cour de justice en 1725, correspond à un usage spécialisé dans la langue administrative de la Justice et est confirmé par Littré .
Il donne pour clôturer :

Arrêter un compte, un inventaire, un registre . Dans le style parlementaire, clôturer les débats , en prononcer la clôture .

Et c'est en deuxième place qu'il note:

2: ajouter: clôturer , fermer d'une clôture .

Ne serait•il pas intéressant de savoir ce qui motive l'Academie? Est-ce une appréciation nouvelle, ancienne? Existait-elle du temps de Littré ? Celui-ci me semblait respectueux des décisions de l'Académie et ne proposait pas n'importe quoi dans son dictionnaire ?

P.S. Désolée pour l'absence de majuscule à Bourse dans mon message précédent

Si vous y jetez un regard , vous verrez que la majuscule s'y trouvait à l'avant-dernière ligne. Mon téléphone portable, son choix automatique de mots et l'écran minuscule me jouent encore des tours. J'avais demandé votre indulgence pour ce genre de mésaventure qui risque fort d'arriver encore durant l'été

Jacques · Message par **Jacques** » mar. 02 août 2011, 16:13

Je vous donne l'absolution pour la majuscule. Je ne savais pas que vous étiez toujours dans des conditions précaires. C'est que, de toute ma carrière à la Bourse de Paris, et depuis que je l'ai quittée, j'ai vu ce mot écrit presque toujours avec une minuscule ; soit depuis janvier 1955, cinquante-six ans. Ce n'est pas tant mon orgueil professionnel qui est touché, mais ma sensibilité grammaticale. Pour Littré, je vais réinstaller le CD et voir ce qu'il disait.

Jacques · Message par **Jacques** » mar. 02 août 2011, 16:29

Merci JAA pour l'explication. Elles étaient donc closes pour les pensionnaires, mais pas pour les clients.

Dame Vérone · Message par **Dame Vérone** » mar. 02 août 2011, 17:09

Les pensionnaires étaient cloîtrées et non clôturées dans ces maisons closes.

Jacques · Message par **Jacques** » mar. 02 août 2011, 17:18

Voici le résultat des recherches dans Littré :
CLÔTURER. Arrêter un compte, un inventaire, un registre. Dans le style parlementaire, clôturer les débats, en prononcer la clôture. Fermer d'une clôture.
CLORE : Boucher ce qui est ouvert. Clore les passages. Enclore. Clore une ville, un jardin.
Il y a une position à mi-chemin des avis exprimés par les uns et les autres.

Desiderius · Message par **Desiderius** » mar. 02 août 2011, 18:13

codrila a écrit :Ne serait•il pas intéressant de savoir ce qui motive l'Academie? Est-ce une appréciation nouvelle, ancienne? Existait-elle du temps de Littré ?

Je ne crois pas que l'Académie se soit prononcée sur clôturer qu'elle a ignoré dans son dictionnaire avant l'édition en cours, en dehors d'une mise en garde de 1964.
Du temps de Littré et avant lui, plusieurs dictionnaires souhaitaient compléter celui de l'Académie par clôturer, notamment les divers suppléments et compléments au dictionnaire de l'Académie élaborés par Raymond, au milieu du XIXe siècle.(1) (2) (3) (4)

codrila · Message par **codrila** » mar. 02 août 2011, 20:08

Si, Desiderius, Jacques avait raison, elle a tranché puisque dans la toute nouvelle édition , la neuvième , elle précise que seul le sens " entourer d'une clôture " est valable et affirme qu'il n'y a pas de sens figuré , donc " il ne faut pas dire ..."

Pour ma part , en absence d'explication, surtout après avoir vu l'historique du terme, sa naissance et son évolution, je reste sur ma réserve , point convaincue. Mais ce n'est là qu'une position personnelle . J'ai besoin de logique ou d'une bonne raison , d'autant que malgré cet avis très officiel, depuis maintenant bientôt quatre siècles , cet emploi perdure dans tous ces domaines de la langue administrative, et avec une extension des domaines.
Ceci dit, l'Institution a donné une recommandation , il est bon de la faire connaître , ensuite le locuteur dispose de sa liberté d'expression personnelle .

Desiderius · Message par **Desiderius** » mar. 02 août 2011, 20:44

codrila a écrit :Si, Desiderius, Jacques avait raison, elle a tranché puisque dans la toute nouvelle édition , la neuvième , elle précise que seul le sens " entourer d'une clôture " est valable et affirme qu'il n'y a pas de sens figuré , donc " il ne faut pas dire ..."

Nous sommes bien d’accord et je ne crois pas avoir écrit le contraire ! Vous demandiez notamment la position de l'Académie du temps de Littré : je vous ai dit qu'elle ne s'était pas prononcée à cette époque. Sa première prise de position date, à ma connaissance, de la mise en garde de 1964 qu'elle a intégrée, naturellement, dans l'édition en cours du dictionnaire. J'ai déjà fait observer que c'est seulement dans cette édition qu'elle fait apparaître le mot clôturer (dans son sens concret).
Je trouve des traces des condamnations de clôturer pour clore essentiellement à partir des années 1920 ; ensuite, la plupart des grammairiens se sont copiés les uns les autres. Certains néanmoins, et non des moindres, comme Dauzat ou Hanse, étaient d'avis que clôturer n'avait rien de répréhensible.

Message par **Perkele** » mer. 03 août 2011, 7:53

Quand j'entends "clôturer une séance" ou "clôturer un compte", je ne peux m'empêcher de voir quelqu'un en train d'enfoncer des piquets.

codrila · Message par **codrila** » mer. 03 août 2011, 9:40

Perkele, je ne résiste pas à l'envie de vous taquiner un brin

Ainsi, lorsqu'on vous dit que l'un de vos amis est un boute-en-train, vous l'imaginez aussitôt en étalon transi, en taureau voué au dépit ?

Message par **Perkele** » mer. 03 août 2011, 9:59

Oui, oui :D

Et quand j'entends "il ronge son frein" je le vois en train de grignoter les freins de son vélo.

Desiderius · Message par **Desiderius** » mer. 03 août 2011, 10:43

Perkele a écrit :Quand j'entends "clôturer une séance" ou "clôturer un compte", je ne peux m'empêcher de voir quelqu'un en train d'enfoncer des piquets.

Vous devriez en principe imaginer les mêmes piquets et des barbelés quand on parle de la clôture d'un compte, ou de la clôture d'une séance. Vous ne le faites probablement pas parce que vous êtes habituée à ce tour. Ceux qui sont habitués au tour clôturer un compte ne voient pas non plus les piquets !

Ne nous focalisons pas sur les piquets et les barbelés : clôture est un terme général qui peut aussi désigner un mur, une haie, bref, tout ce qui clôt.