Je n’ai pas les idées très nettes en ce moment, et ma pensée se coordonne mal.
Les quelques petites recherches que j’ai effectuées me laissent penser qu’il y aurait peut-être un lien entre félin, Félix, Félicité, Félicie et le nom commun félicité ainsi que le verbe féliciter (féliciter=rendre heureux en faisant des compliments). Certaines données me ramènent à femme et d’autres à felis « heureux ».
Il me semble intéressant de suivre la piste. Je ne peux pas pousser ces recherches.
Quelqu’un peut-il confirmer ou infirmer en y mettant un peu d’ordre ?
Dernière modification par Jacques le mar. 18 nov. 2014, 9:57, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Félix : Apparenté à fellare (« allaiter », « téter »), fēmina, il correspond au grec ancien θῆλυς, thễlus (« féminin »). On est passé du sens étymologique de « fécond » à celui de « propice » et enfin « heureux ».
C'est déjà un point acquis, mais il serait intéressant de savoir s'il existe une parenté avec tous les autres que j'ai cités. Les petits jeux de mots lancés ici m'ont amené à me poser cette question, avec une réaction du genre « Vous ne croyez pas si bien dire ».
Et si c'était vrai, qu'ils aient un lien les uns avec les autres ?
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
C'est une affaire de spécialistes des racines indo-européennes. Dans le chapitre consacré à la langue latine, on a bien felix (heureux), fellare (sucer) et femina (femme) qui sont issus du même étymon, mais pas de trace de feles, anciennement faeles, le chat. Accessoirement, notre mot « chat » pourrait avoir été emprunté au gaulois cattos, mot également présent dans les langues germaniques anciennes et en lituanien.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
Je ne suis pas sûr qu'il y ait un lien de parenté entre les mots de la famille de félicité et ceux de la famille de félin.
Le Gaffiot (latin-français) donne d'une part felicitas (bonheur) en le liant à felix (fécond, fertile; heureux), à fecundus (fécond, fertile, riche, abondant) et à fenus (rapport, produit, profit, gain), d'autre part feles, fæles, felis, fælis (chat, chatte, martre, putois), sans les associer à d'autres mots.
Jacques-André-Albert a écrit : Accessoirement, notre mot « chat » pourrait avoir été emprunté au gaulois cattos, mot également présent dans les langues germaniques anciennes et en lituanien.
J'ai lu hier, mais je ne retrouve pas le site dont il s'agissait, que notre chat pourrait au contraire ne pas avoir d'origine indo-européenne, mais venir d'une ancienne langue africaine ou proche-orientale. Le Gaffiot atteste cattus (chat) et cattinus (comme un chat), mais il indique que ces mots ont été utilisés au IVe siècle après J.-C.
Un autre site, allemand, indique, sous le titre Die Katze und die Sprachforscher (Le chat et les linguistes) :
Version 1) On suppose que « chat » est dérivé de « kadiz, kadis », désignation du quadrupède par les Nubiens, ancien peuple hautement civilisé vivant en Afrique du Nord. En acclimatant l'animal chez eux, les Celtes auraient alors introduit ce mot dans les langues nordiques. D'Afrique du Nord directement chez les Celtes ? Que fait-on des Grecs ? des Romains ?
...
Ce qui plaide effectivement fortement en faveur de la provenance nord-africaine du mot, c'est l'origine du chat domestique : elle ne fait pas de doute. (ma traduction)
Excusez-moi, JAA, je n'ai pas cité la phrase de votre commentaire précédent qui convenait : j'aurais dû copier celle où apparaissaient les mots racines indo-européennes.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai pas évoqué de racine indo-européenne pour le mot chat. Quant au site dont vous parlez, il doute d'une adoption d'un mot africain par les Celtes sans passer par les Grecs ou les Romains. C'est, d'une part, oublier le rôle prépondérant qu'on joué les Celtes en Αfrique du nord (et ailleurs) en tant que mercenaires, et d'autre part, c'est mettre abusivement le monde gréco-romain au centre du monde antique, vision sans doute fortement influencée par la formation classique de l'enseignement européen.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
Jacques-André-Albert a écrit :Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai pas évoqué de racine indo-européenne pour le mot chat. Quant au site dont vous parlez, il doute d'une adoption d'un mot africain par les Celtes sans passer par les Grecs ou les Romains. C'est, d'une part, oublier le rôle prépondérant qu'on joué les Celtes en Αfrique du nord (et ailleurs) en tant que mercenaires, et d'autre part, c'est mettre abusivement le monde gréco-romain au centre du monde antique, vision sans doute fortement influencée par la formation classique de l'enseignement européen.
Entièrement d'accord.
Si j'ai traduit aussi la partie mettant en doute l'adoption d'un mot africain par les Celtes sans passer par les Grecs ou les Romains, c'est pour rester aussi neutre que possible. J'ai par ailleurs laissé de côté, par paresse, deux autres versions, auxquelles l'auteur ne semblait guère croire.
Au Moyen Âge, gatti ou cattine fella désignent les peaux de chats.
Je ne vois aucun mot dans le Gaffiot avec la racine fell- dans le sens peau. Je ne peux par contre m'empêcher de penser à l'allemand das Fell (la peau, plutôt velue, des animaux) et je viens de constater que le Wahrig associe ce mot au latin villosus (velu, couvert de poils).
On nous a appris à mettre le monde gréco-latin au centre de toutes les inventions et de toutes les influences. C'est oublier que, dans l'antiquité,, chaque peuple se croyait le centre de l'univers. Ainsi, les habitants de l'équivalent du Berry à l'époque de César se nommaient-ils Bitu-riges, les rois du monde.
Nous avons tous été victimes de ce que j'appellerais le syndrome du fou et du lampadaire, vous savez ? L'histoire du fou qui cherche sa clé sous un lampadaire, et qui, à la question « pourquoi sous ce lampadaire ? », répond « parce qu'il n'y a que là qu'il y a de la lumière ». Eh bien c'est ce que nous avons fait depuis des siècles, puisque l'essentiel du savoir nous a été transmis par les restes abondants de la civilisation gréco-latine, textes et monuments.
Pour revenir à la langue, sait-on que le mot latin lancea, la lance, a été emprunté aux Celtes ? Idem pour carrus, le char, dont les Gaulois étaient les spécialistes, nous laissant aussi charpente et ses dérivés par la même racine.
En parcourant les textes des Latins, on voit que les Celtes étaient craints des Romains, mais que ces derniers appréciaient beaucoup leur charcuterie. Le monde occidental n'était pas une mosaïque de peuples auxquels Rome aurait tout apporté.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
Tout cela est fort instructif, et remet un peu les choses à leur place. Je ne regrette pas d'avoir lancé ce sujet de réflexion.
Il est vrai qu'on a beaucoup orienté notre intérêt vers les civilisations gréco-latines, en faisant abstraction du reste.
Combien de gens croient encore que les Gaulois n'étaient que des rustres, des primitifs que les Romains ont dégrossis ? Il paraît que leur civilisation n'avait rien à envier à celle des conquérants, pourtant.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Un courant de pensée équivalent concerne l'Allemagne. Le sujet y est plus délicat parce que le nazisme s'est emparé en son temps de tout ce qui concernait la civilisation des anciens Germains. Mais depuis une bonne vingtaine d’années peut-être, en particulier depuis la découverte du site possible de la bataille de Varus (près d’Osnabrück), la presse d’outre-Rhin publie nombre d’articles soucieux de rééquilibrer la balance des apports civilisationnels.
La civilisation des Gaulois, en ce qui nous concerne, du fait du syndrome du fou et du lampadaire, dont je viens de découvrir grâce à vous, JAA, qu’il s’appelait ainsi, n’avait sûrement pas non plus autant à envier à celle des Romains qu’on nous l’a inculqué. La fabrication de tonneaux, par exemple, est aussi à mettre à l’actif de nos « ancêtres ».
Cela dit, je ne voudrais pas tomber dans l’excès inverse : le pont du Gard, pour ne citer que lui, est tout de même un témoignage spectaculaire du niveau étonnant de l’architecture romaine.