Perles d'inculture 3

Pour les sujets qui ne concernent pas les autres catégories, ou en impliquent plus d’une
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Jacques
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Message par Jacques »

L'indépendance de la Namibie et de nombreux archipels du Pacifique ont consacré la fin de la décolonisation.
On pourrait comprendre que de nombreux archipels, ainsi que l'indépendance de la Namibie, ont..., ce qui grammaticalement nous donne deux sujets commandant le pluriel. Mais ce serait absurde, les archipels peuvent difficilement consacrer quoi que ce soit.
Je crois qu'il faut simplement envisager, non une astuce sous-entendant celle, mais une faute de compréhension sur ce qui commande l'accord. Il y a simplement discordance.
La phrase veut bien dire ce qui vient à l'esprit, c'est-à-dire l'indépendance accordée à la Namibie et à de nombreux archipels a consacré...
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Vous confirmez ce que je pensais.
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Jacques
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Message par Jacques »

André (G., R.) a écrit :Vous confirmez ce que je pensais.
Ce qui est inquiétant, c'est que vous dites que ce type d'erreur devient de plus en plus fréquent.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Oui, et, je l'ai dit, plutôt sous la plume de personnes normalement averties, ce qui m'a amené à poser la question de savoir s'il n'y avait pas une intention derrière cette bizarrerie.
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Jacques
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Message par Jacques »

Les fautes d'accord sur le nombre se répandent effectivement, et sous diverses formes. Je n'ai pas d'exemple à l'esprit mais me rappelle avoir vu des cas similaires. C'est un manque d'attention et de raisonnement, une phrase construite à la va-vite qui se forme sur une fausse apparence de deux choses assimilées à tort. On voit aussi de façon quasi systématique : un couple et leurs deux enfants, une famille et leurs voisins... Il se crée une notion de pluralisme fondée sur une distorsion.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques
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Message par Jacques »

Lu dans notre magazine de télévision : « ...Patrick Jane coule des jours trop tranquilles au bord de la mer. Toujours à la recherche de ce dernier, Abbott rend visite à Teresa Lisbon. »
Ce n'est même plus une affaire de grammaire ou de syntaxe, mais de simple bon sens et de logique. Ce dernier, c'est le dernier cité comme dirait M. de Lapalice, c'est-à-dire le bord de la mer. Il faut manquer singulièrement d'esprit critique pour commettre une telle bévue, malheureusement très courante dans cette revue.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

« Ce dernier » et « cette dernière » font partie des tournures que certaines personnes, sans qu'elles soient forcément conscientes de leur sens précis, considèrent comme « faisant chic ».

À nouveau dans mon quotidien, cette phrase extraite d'un article concernant un possible candidat à la prochaine élection présidentielle américaine :

Si rien ne sera décidé avant la fin de l'année, on lui sent des fourmis dans les jambes.

Elle signifie : Bien que l'on sache que rien ne sera décidé avant la fin de l'année, on lui sent...
Il arrive que des enfants francophones ou que des étrangers (en particulier les locuteurs de langues slaves, où cet emploi du futur est courant) apprenant le français fassent suivre la conjonction de subordination si de ce temps dans une phrase hypothétique dont le verbe principal est lui-même au futur : Je t'aiderai si tu me donneras des sous. On sait que c'est incorrect. Mais ci-dessus il ne s'agit pas de cela : la subordonnée m'y paraît proche de celle de Si la pelouse est verte cette année, c'est que le printemps a été pluvieux, où l'on a toutefois un verbe au présent et dans laquelle si établit plus ou moins une relation de cause. Malgré cette proximité, je ne crois pas pouvoir accepter Si rien ne sera décidé avant la fin de l'année,...
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Claude
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Message par Claude »

Puisque nous sommes dans la concordance des temps, que pensez-vous de « Si j'étais riche j'achèterais une île » ? En allemand, vous savez qu'ils disent « Si je serais riche j'achèterais une île », ce qui me semble plus logique.
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Jacques
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Message par Jacques »

Oui, cela semble plus logique. Je me demande depuis longtemps, justement, pourquoi en français l'imparfait est substitué au conditionnel. Ce n'est d'ailleurs pas uniformément répandu dans notre pays. En Ardenne, je crois l'avoir déjà mentionné, on dira « Je viendrais si je pourrais », mais cela c'était le parler de ma jeunesse. J'ignore si, à l'heure actuelle, il est toujours en vigueur : les provinces ont tendance à s'aligner sur la mode parisienne.
En espagnol, qui est une langue latine, cette substitution ne se fait pas, et on utilise de même le conditionnel (il paraît que Revin où je naquis serait une ancienne colonie espagnole, ce qui expliquerait alors cette tournure).
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Claude a écrit : que pensez-vous de « Si j'étais riche j'achèterais une île » ? En allemand, vous savez qu'ils disent « Si je serais riche j'achèterais une île », ce qui me semble plus logique.
Je suis malheureusement obligé de vous contredire... un peu !
Le mode conditionnel n'existe pas en allemand. Dans les phrases (très) hypothétiques, cette langue utilise ce qu'on appelle en français le subjonctif 2 (en allemand : zweiter Konjunktiv [au nominatif] ou 2. Konjunktiv ou Konjunktiv 2). Traduire Wenn ich reich wäre, würde ich mir eine Insel kaufen par Si je serais riche, je m'achèterais une île est donc contestable en toute hypothèse. Et cela est d'autant plus vrai que l'on peut dire aussi (de manière moins heureuse, certes) Wenn ich reich wäre, kaufte ich mir eine Insel, où le « conditionnel » de la principal (kaufte) se confond en réalité avec le prétérit de l'indicatif ! Par ailleurs le subjonctif 2 peut correspondre à l'imparfait de l'indicatif français dans des phrases comme Er hat gesagt, er hätte kein Geld (Il a dit qu'il n'avait pas d'argent).
Quoi qu'il en soit, le mode conditionnel dans la subordonnée de condition française me déplaît foncièrement et je crains que sa popularité grandissante ait une fois de plus un rapport avec l'anglais, par exemple avec la chanson If I were a rich man.
Dernière modification par André (G., R.) le mer. 08 oct. 2014, 12:59, modifié 1 fois.
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Claude
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Message par Claude »

Ce n'est pas aussi simple que je le croyais. :oops:
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Jacques
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Message par Jacques »

Je reviens à ceci : Si rien ne sera décidé avant la fin de l'année, on lui sent des fourmis dans les jambes.
J'avais aussi remarqué cette phrase, et me suis demandé si elle était vraiment fautive. J'extrapole un peu, mais j'y vois une possible ellipse du genre : Même si on considère – même si on sait – même s'il est certain, etc. que rien ne sera décidé... car le SI ne semble pas marquer une éventualité, mais un fait déjà acquis.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Jacques a écrit : j'y vois une possible ellipse du genre : Même si on considère – même si on sait – même s'il est certain, etc. que rien ne sera décidé... car le SI ne semble pas marquer une éventualité, mais un fait déjà acquis.
D'accord. Mais a-t-on le droit d'être aussi elliptique ?
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Jacques
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Message par Jacques »

C'est la grande question. Compte tenu de l'ambigüité que cela comporte, je ne m'y risquerais pas. Je préfère les situations nettes, qui ne laissent pas place au doute.
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André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

Jacques a écrit : Je me demande depuis longtemps, justement, pourquoi en français l'imparfait est substitué au conditionnel.
Se pourrait-il qu'il y ait eu une période dans l'histoire de la langue pendant laquelle le conditionnel aurait été considéré comme correct dans la subordonnée ? Il me semble qu'une raison de renoncer à ce mode réside dans le fait que ladite subordonnée commence par si — qui contient l'idée de condition — et que faire suivre cette conjonction du conditionnel constituerait une redondance. La preuve n'en est-elle pas fournie par des phrases ne comportant pas la conjonction, du genre Il arriverait en retard que je ne m'en étonnerais pas ?
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