Garçon manqué, quel genre ?

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Sissi

Garçon manqué, quel genre ?

Message par Sissi »

Bonjour
J'ai une autre question, j'aimerais bien savoir quel est le genre de "garçon manqué", je pense qu’il est masculin mais j’ai des doutes.
Par exemple, dans la phrase : « Sophie, un garçon manqué doué pour les arts martiaux », je me demande s’il ne faudrait pas mettre « doué » au féminin.
Je vous remercie d’avance pour votre réponse
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Jacques
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Message par Jacques »

Dans votre phrase telle qu'elle est construite, grammaticalement, doué qualifie garçon. Donc on ne peut pas bénéficier de l'accord d'intention, masculin obligatoire.
Mais si vous la tounez autrement : Sophie, un garçon manqué, était douée pour... Il est évident que le verbe être a pour sujet Sophie ; le membre de phrase un garçon manqué est en incise, le supprimer ne changerait pas le sens. Féminin obligatoire.
L'accord d'intention peut s'exercer dans les cas où il y a opposition de genre entre une personne et une fonction : Madame le professeur est absente, elle reviendra demain. On peut envisager est absent il reviendra demain. C'est la version donnée par Grevisse. Cependant c'est maladroit et choquant. La grammaire ne peut pas régner en maître sur notre langage, le bon sens doit être pris en compte. De toute évidence c'est la personne, madame, qui s'absente, et non le professeur, fonction neutre et non personnalisée.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Sissi

Message par Sissi »

Merci pour votre réponse, on voit que vous êtes un spécialiste.
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Jacques
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Message par Jacques »

Sissi a écrit :Merci pour votre réponse, on voit que vous êtes un spécialiste.
Je n'estime pas avoir droit à ce titre. Je ne suis qu'un simple amateur, passionné certes et qui a du temps pour chercher et réfléchir. Le spécialiste ici, ce n'est pas moi.
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André79
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Message par André79 »

Passer après un "spécialiste " peut paraître bien présomptueux(!) mais je reprendrai les propos de Jacques qui dit:

"Dans votre phrase telle qu'elle est construite..."

pour dire

"Dans votre phrase telle qu'elle est ponctuée..."

En effet si j'écris:

"Sophie, un garçon manqué, douée pour les arts martiaux" bien entendu je rejoins notre ami qui fait accorder "doué".

Comme quoi cette petite virgule de rien du tout modifie le sens une fois de plus...
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Jacques
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Message par Jacques »

Mille bravos André pour cette précision ponctuée. On ne prête pas toujours assez attention à la virgule, qui est peut-être le signe le plus important.
Dans le même ordre d'idées, j'ai peut-être déjà signalé ici cette anecdote d'une édition entière de la Bible qui a dû être envoyée au pilon à cause de cette phrase dans l'épisode de la crucifixion : Avec lui étaient deux autres malfaiteurs confirmés. Il était indispensable de mettre une virgule après autres, bien évidemment, ce qui changeait singulièrement le sens de la phrase. Aïe, la gaffe !
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Perkele
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Message par Perkele »

En résumé "un garçon manqué" est un syntagme masculin qui gouverne un accord masculin.

Tandis que Sophie est un prénom féminin qui entraîne un accord féminin.

- Un garçon manqué doué pour les arts martiaux. (doué qualifie garçon manqué)
- Sophie est douée pour les arts martiaux. (douée qualifie Sophie)
- Sophie est un garçon manqué doué pour les arts martiaux (elle est ce garçon manqué doué)
- Sophie, un garçon manqué, douée pour les arts martiaux... (Sophie est un garçon manqué et elle est douée pour les arts martiaux.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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angeloï
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n'oublions pas la syllepse

Message par angeloï »

Syllepse selon le genre

Dans « Elle affichait un air inquiet. Elle avait l’air soucieuse. » on devrait écrire « l’air soucieux » mais l’accord s’est définitivement rattaché, par syllepse, au genre du sujet grammatical. La locution verbale « avoir l’air » ne signifie plus que « sembler, paraître ».

Dans « Une personne me disait un jour qu’il avait une grande joie et confiance en sortant de confession.» Le mot « personne » est un nom féminin, mais on lui a attribué le genre qui nous est connu. De même, dans la phrase « Une estafette arriva en trombe. On l'interrogea mais il ne voulut parler d'abord qu'au général. » On retrouve cet accord selon le sexe de la personne dont on parle avec des mots tels que « la sentinelle » qui est généralement un homme, « le Petit Chaperon rouge » qui est une fillette, etc
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Jacques
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Re: n'oublions pas la syllepse

Message par Jacques »

angeloï a écrit :Syllepse selon le genre

Dans « Elle avait l’air soucieuse. » on devrait écrire « l’air soucieux » mais l’accord s’est définitivement rattaché, par syllepse, au genre du sujet grammatical. La locution verbale « avoir l’air » ne signifie plus que « sembler, paraître ».
Tous les auteurs, Larousse, Robert, Bordas, Grevisse, etc. affirment que l'accord se fait indifféremment avec le sujet ou son complément, et certains estiment que le premier est plus fréquent : elle avait l'air sérieuse, selon eux, se rencontre plus souvent que elle avait l'air sérieux.
L'accord d'intention joue pleinement. Aucun n'indique que l'un des deux choix soit plus correct que l'autre.
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Message par André79 »

Le français usuel que nous parlons tous les jours ne peut faire sienne une formule aussi vicieuse que :"Elle avait l'air soucieux" sous des prétextes discutables.

D'ailleurs ainsi que le relate Jacques c'est le bon sens qui l'emporte.
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Jacques
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Message par Jacques »

C'est un principe à ne jamais perdre de vue : si la grammaire autorise un double accord dans de nombreux cas, il en est de malheureux ou de choquants. C'est au locuteur de choisir celui qui ne risque pas de faire mauvais effet, notamment dans l'exemple de madame le professeur que je cite plus haut.
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André79
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Message par André79 »

En effet votre exemple de "Madame le professeur" nous montre bien les limites de règles trop strictes... Ce qui vous fait dire:" La grammaire ne peut pas régner en maître sur notre langage, le bon sens doit être pris en compte."

En fait, n'ayant pas relu vos propos c'est bien ce que je voulais dire dans mon message plus haut également.
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Jacques
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Message par Jacques »

André79 a écrit :En effet votre exemple de "Madame le professeur" nous montre bien les limites de règles trop strictes... Ce qui vous fait dire:" La grammaire ne peut pas régner en maître sur notre langage, le bon sens doit être pris en compte."

En fait, n'ayant pas relu vos propos c'est bien ce que je voulais dire dans mon message plus haut également.
J'avais bien compris, mais je voulais souligner un exemple où un choix d'accord par syllepse se révèle particulièrement malheureux. Et ce qui m'étonne, c'est qu'il vient de Grevisse !
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Message par André79 »

Et pourtant, le livre de Maurice Grevisse ne s'appelle-t-il pas "Le bon usage"?
Ah! je fais le mauvais esprit...
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Jacques
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Message par Jacques »

André79 a écrit :Et pourtant, le livre de Maurice Grevisse ne s'appelle-t-il pas "Le bon usage"?
Ah! je fais le mauvais esprit...
Bah, nous avons des adages : la perfection n'est pas de ce monde, nul n'est parfait en ce bas monde... Si Grevisse était parfait, il ne serait pas humain.
Il est somme toute réconfortant pour nous de savoir que les spécialistes sont faillibles ; cela nous enlève des complexes.
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