Exercice de style

Jacques · Message par **Jacques** » ven. 28 mai 2010, 9:51

Encouragé par les réactions favorables, je donne la fin (tragique) de mon histoire :
La première priorité était de reconquérir le marché. Ils avaient fini par réussir, et l'énorme édifice commercial bâti par l'infatigable Georges tremblait sur sa base, comme ébranlé par une gigantesque secousse sismique.
Depuis un an, il s'était approché toujours plus près du désespoir, et cette noire mélancolie qui s'était sournoisement emparée de son âme avait complètement aboli en lui toute volonté. Il quitta son bureau de bonne heure ce jour-là, et sauta dans sa voiture. Il n'avait seulement que trente kilomètres à parcourir pour arriver à la petite maisonnette campagnarde où il avait souvent trouvé le repos de l'isolement. La route était mauvaise, mais il l'avait parcourue tant de fois qu'il connaissait par cœur la topographie des lieux, les fermes, les arbres, le moindre petit chemin, etc... et qu'il eût pu la suivre les yeux fermés. Quand il arriva au but, il crut apercevoir dans le crépuscule une bande de corbeaux qui tournaient en rond au-dessus de la maison. Mauvais présage ou simple illusion trompeuse ? Il laissa l'auto dans le chemin et partit à travers la campagne. Il aimait les marches à pied parmi les dunes de sable, le contact avec la nature sauvage. Il rentra à la nuit. En passant à côté d'une cheminée, il s'arrêta devant le portrait d'un homme énergique dont le sourire disait assez qu'il connaissait une réussite plus que satisfaisante. C'était lui ; mais, levant machinalement les yeux vers la glace qui ornait la cheminée, il recula brusquement en arrière : les deux images, comparées ensemble, offraient un tragique contraste, et le visage spectral reflété par le miroir l'effrayait.
Les choses, alors, allèrent très vite : contraint malgré lui par une force qui le dominait, il sortit de sa poche un revolver à barillet, l'appliqua contre sa tempe et pressa la détente...
Le corps demeura un instant immobile, puis il s'écroula lourdement, inondé par une terrible hémorragie de sang.

Message par **Claude** » ven. 28 mai 2010, 10:18

J'en trouve 17 avec une lecture non approfondie.

Pour gai luron je n'étais pas sûr, alors j'ai vérifié dans le TLF.

J'édite car j'en ai trouvé un autre, ce qui fait 18

Jacques · Message par **Jacques** » ven. 28 mai 2010, 10:32

C'est déjà remarquable. Il en faut encore deux.

Message par **Claude** » ven. 28 mai 2010, 10:36

Avec l'édition de mon précédent message il en reste un, ce qui ne veut pas dire qu'ils sont tous bons, bien sûr.

Jacques · Message par **Jacques** » ven. 28 mai 2010, 11:30

Il y en a un qui est un peu du genre chausse-trape, car la faute est fréquente, et il est fort peu connu. J'attendrai demain pour mettre le corrigé.

Message par **Claude** » ven. 28 mai 2010, 11:33

Ah ! si actuellement j'étais plus disponible je me ferais un plaisir d'examiner le texte tranquillement.

Jacques · Message par **Jacques** » ven. 28 mai 2010, 11:35

Claude a écrit :Ah ! si actuellement j'étais plus disponible je me ferais un plaisir d'examiner le texte tranquillement.

C'est le lot de bon nombre de retraités : ils sont toujours débordés.

JR · Message par JR » ven. 28 mai 2010, 11:52

Je comprends pourquoi je n'ai trouvé qu'une douzaine de pléonasmes avérés dans la première partie du texte !
Sans vouloir corriger la correction (ce qui serait incorrect !

), je vous fais part de mes commentaires.

monopole exclusif : je l'avais vu, puisqu'au sens propre le monopole suppose l'exclusivité; toutefois, les économistes utilisent souvent ce terme pour une ample domination du marché. Exemple : Microsoft, plus de 80% des systèmes d'exploitation commercialisés.

hasard imprévu : ce n'est pas un pléonasme ! Le hasard est souvent prévisible, c'est pourquoi on prend un parapluie en sortant, on attache sa ceinture de sécurité en voiture, etc.

gai luron : j'y vois plus un effet de renforcement qu'un pléonasme

chute verticale : une trajectoire de chute est grosso modo parabolique; en précisant "verticale", on indique qu'on se trouve dans le cas particulier où la chute est la plus rapide.

une heure de temps, mirage décevant et suffisait simplement m'apparaissent plus comme des lourdeurs que comme des pléonasmes

Ces quelques remarques ne remettent pas en cause l'intérêt de l'exercice, lequel incite à éliminer certaines tournures usuelles pour obtenir un style plus agréable et tout aussi clair.

Jacques · Message par **Jacques** » ven. 28 mai 2010, 12:55

Le mot hasard désigne un évènement fortuit et non prévisible. La prévention qui envisage le risque résulte de l'observation d'une fréquence de certains faits probables. Tous ces pléonasmes sont dûment répertoriés comme tels par les divers auteurs crédibles.
Gai luron, joyeux luron est pléonastique parce que le luron est un personnage gai, joyeux. Tous les grammairiens le considèrent ainsi (si j'usais de pléonasmes, je dirais que tous sont unanimes).
Il faut comprendre la définition du pléonasme : terme ou expression qui répète ce qui vient d'être énoncé. Que le hasard puisse être maîtrisé partiellement par des précautions n'empêche pas que, sémantiquement, la redondance existe.
Une heure de temps : l'heure étant une mesure de temps, il y a répétition de l'idée. C'est pareil pour les autres.
Je crois qu'en fait, JR, vous considérez le pléonasme sous l'angle de la pratique et du raisonnement, alors que c'est un phénomène « mécanique » et purement rhétorique : il y a ou il n'y a pas répétition, c'est le mot clef.
Et s'il y a répétition il y a pléonasme. Si la répétition se fait en utilisant deux termes synonymes, ou par insistance, c'est une tautologie : c'est la vérité pleine et entière, j'en suis sûr et certain, je l'ai entendu de mes propres oreilles, c'est son stylo à lui...
Beaucoup d'auteurs, Grevisse notamment, englobent le pléonasme et la tautologie sous le seul vocable de redondance. Mais c'est toujours une histoire de style et pas de faits.

Anne · Message par **Anne** » ven. 28 mai 2010, 14:25

JR a écrit :une heure de temps, mirage décevant et suffisait simplement m'apparaissent plus comme des lourdeurs que comme des pléonasmes

Il faut prendre "simplement" dans le sens de "seulement" pour que ça devienne un pléonasme. Si l'on remplace "simplement" par "c'est simple", qui ne contient pas l'idée d'exclusivité qu'il y a dans le verbe suffire, ce n'est pas un pléonasme, je suis d'accord avec vous.

Jacques · Message par **Jacques** » ven. 28 mai 2010, 16:10

Anne a écrit :
Il faut prendre "simplement" dans le sens de "seulement" pour que ça devienne un pléonasme.

C'est parfaitement raisonné ; il y a aussi pléonasme si vous dites « il suffit seulement », parce que dans les deux cas il y a ajout d'une précision inutile et qui fait double emploi. Il suffit est équivalent à il faut seulement (ou simplement).

Madame de Sévigné

Je suis passée à côté de gai luron, et de ...puis, ensuite, ouhhhhh !
Je me suis posé la question pour fameux médicament miracle, et vaincre l'adversaire.
Pour ce dernier, même erreur que un ami qui vous veut du bien, n'est-ce pas ?

Voilà pour la première partie. Je m'attaque à la suivante demain. Jacques, n'allez pas trop vite pour la correction, s'il vous plaît, même les gens qui travaillent sont débordés !

Message par **Perkele** » sam. 29 mai 2010, 7:37

Jacques · Message par **Jacques** » sam. 29 mai 2010, 7:41

Perkele a écrit :18 ?

Dix-neuf.

Message par **Perkele** » sam. 29 mai 2010, 7:45

Oui, je crois avoir le 19e...

Attendons le réveil de madame la marquise.