INDIGNATIONS 5

Pour les sujets qui ne concernent pas les autres catégories, ou en impliquent plus d’une
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Artisan en retraite. Mais ça n'a été qu'un épisode de ma vie. Quand on a exercé plusieurs métiers, quand a changé de région comme d'autres aux générations précédentes, on prend l'habitude de faire la synthèse et de se recentrer sur une identité liée à l'histoire, à la langue, à la culture.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Jacques
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Message par Jacques »

Il y a différentes formes de ségrégation ou d'ostracisme qui peuvent faire qu'on est, comme vous dites, immigré dans son propre pays. Durant mon enfance, mon adolescence, ma jeunesse et même longtemps après, j'ai dû, à cause de mon nom de famille que vous connaissez, subir les moqueries, les quolibets, les plaisanteries imbéciles. Être la risée des autres à cause de son nom, subir les humiliations de la bêtise humaine, c'est une situation qu'on a beaucoup de mal à surmonter. Aujourd'hui, c'est l'âge seul qui me met à l'abri.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Oui, et la sagesse, que procure l'accumulation des années atteint aussi l'agresseur et le moqueur.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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cyrano
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Message par cyrano »

Perkele a écrit :J'ai appris à cloisonner ce que je suis d'un côté et ce que je fais de l'autre. C'est le meilleur moyen de ne pas se sentir atteint lors qu'une action ou le résultat d'un travail est critiqué. Ce que j'ai fait ne convient pas ? ce n'est pas grave, je peux faire autrement.
Vous avez bien sûr mille fois raison et c'est ainsi qu'il faut faire, mais pour moi une telle distinction reste utopique. J'ai beau essayer, je n'y arrive pas: si on critique quelque chose que j'ai fait, je me sens malgré tout attaqué dans une partie de ce que je suis.

Je me répète alors "c'est mon action/travail et pas ma personne qui est en cause", mais c'est purement superficiel, ça ne change rien à ce que je ressens vraiment. C'est comme un gosse à qui on apprend à dire "Je n'aime pas les épinards" au lieu de "Les épinards, c'est pas bon": il le dira pour nous faire plaisir, mais en fait, ce qu'il ressent au fond de lui, c'est que "les épinards, c'est pas bon"!

Et franchement, si quelqu'un commet une erreur, pouvez-vous affirmer que vous parvenez réellement à dissocier cette erreur du jugement que vous portez sur la personne? Si votre médecin fait une erreur de diagnostic aux conséquences peut-être graves, direz-vous encore de lui qu'il est un chou (cf. un autre fil) mais que simplement il s'est trompé? Est-ce que ça ne laissera aucune trace sur votre relation avec lui, sur votre image de lui en tant que personne? Pour ma part, je n'en mettrais pas ma main au feu.
Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet (Courteline)
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Jacques
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Message par Jacques »

cyrano a écrit :J'ai beau essayer, je n'y arrive pas : si on critique quelque chose que j'ai fait, je me sens malgré tout attaqué dans une partie de ce que je suis.
Je suis dans le même cas : si j'ai une réelle indifférence envers les attaques liées à ma profession, je suis très susceptible sur les critiques relatives à ma personne ou à ce que j'ai fait. C'est la personnalité de l'individu qui est mise en cause, et bien peu d'entre nous sont capables de surmonter cela.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Hippocampe
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Message par Hippocampe »

Je change de sujet.

Ce fil s'appelle IndignationS. Je passe à une autre.

J'ai failli continuer sur "voyelles parasites" mais ce fil-ci est plus indiqué.

Je suis choqué d'entendre "un peu" et "un petit peu" avant plein d'adjectifs et de verbes dans plein de bouches sinon instruites, en tout cas écolisées et diplômisées.
On entend même "un peu urgent" ou "un petit peu passionné".

Et de ça, j'ai un peu marre, je suis un petit peu indigné.

J'espère que vous êtes un peu d'accord et que vous abonderez un petit peu dans mon sens.

Un peu Hippocampe
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Jacques
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Message par Jacques »

Un peu, oui, que je suis d'accord. C'est un peu fort tous ces abus.
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Perkele
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Message par Perkele »

cyrano a écrit :
Perkele a écrit :J'ai appris à cloisonner ce que je suis d'un côté et ce que je fais de l'autre. C'est le meilleur moyen de ne pas se sentir atteint lors qu'une action ou le résultat d'un travail est critiqué. Ce que j'ai fait ne convient pas ? ce n'est pas grave, je peux faire autrement.
Vous avez bien sûr mille fois raison et c'est ainsi qu'il faut faire, mais pour moi une telle distinction reste utopique. J'ai beau essayer, je n'y arrive pas: si on critique quelque chose que j'ai fait, je me sens malgré tout attaqué dans une partie de ce que je suis.

Je me répète alors "c'est mon action/travail et pas ma personne qui est en cause", mais c'est purement superficiel, ça ne change rien à ce que je ressens vraiment. C'est comme un gosse à qui on apprend à dire "Je n'aime pas les épinards" au lieu de "Les épinards, c'est pas bon": il le dira pour nous faire plaisir, mais en fait, ce qu'il ressent au fond de lui, c'est que "les épinards, c'est pas bon"!

Et franchement, si quelqu'un commet une erreur, pouvez-vous affirmer que vous parvenez réellement à dissocier cette erreur du jugement que vous portez sur la personne? Si votre médecin fait une erreur de diagnostic aux conséquences peut-être graves, direz-vous encore de lui qu'il est un chou (cf. un autre fil) mais que simplement il s'est trompé? Est-ce que ça ne laissera aucune trace sur votre relation avec lui, sur votre image de lui en tant que personne? Pour ma part, je n'en mettrais pas ma main au feu.
J'ai commencé l'entraînement très tôt :D
Mais il est vrai que parfois le pincement au cœur est là voire l'insulte prête.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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AliceAlasmartise.
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Message par AliceAlasmartise. »

Cette distinction entre « Tu es bête » et « Ce que tu as fait, là, ben c'est bête » se fait rarement chez les jeunes.
Peut-être n’apparaît-elle pas à l’âge adulte ? Il est possible que ça reste dans les liaisons qui se font automatiquement.

Je trouve ça un petit peu dommage, du coup on hésite un peu à critiquer le travail, même de manière un peu constructive, afin que l'autre ne se sente pas agressé où il ne devrait un peu pas.
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Klausinski
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Message par Klausinski »

Je souscris un peu à ce que vous dites.
Par contrecoup, on rencontre assez peu de personnes capables d'émettre un jugement construit, de faire une critique un tant soit peu élaborée. Pour juger d'un film, d'un livre, d'une musique ou d'un tableau, nous n'avons plus qu'une dizaine d'adjectifs, qui vont du irritant au super, en passant par l'intéressant et le sympathique. Et souvent l'adjectif prend valeur d'argument.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Klausinski a écrit :Je souscris un peu à ce que vous dites.
Par contrecoup, on rencontre assez peu de personnes capables d'émettre un jugement construit, de faire une critique un tant soit peu élaborée. Pour juger d'un film, d'un livre, d'une musique ou d'un tableau, nous n'avons plus qu'une dizaine d'adjectifs, qui vont du irritant au super, en passant par l'intéressant et le sympathique. Et souvent l'adjectif prend valeur d'argument.
C'est la lecture qui fournit la palette de mots propres à décrire le monde. Si elle est remplacée par une consommation exclusive d'images, c'est à la fois l'appropriation du vocabulaire qui ne se fait pas et l'habitude de prendre du recul qui ne s'instaure pas.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Perkele
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Message par Perkele »

En formation pour adulte, une session se termine par une évaluation permettant aux organisateurs (formateur compris) d'estimer la pertinence de ce qui a été dispensé et de l'efficacité de la manière dont cela a été abordé à travers l'utilisation immédiate envisagée par les personnes présentes.

Elle se traduit souvent par une évaluation de l'ambiance "c'était bien", "on était un bon groupe", "on s'est pas ennuyé", "pareil que mon collègue" (la meilleure et la plus fréquente :wink: ) ou une occasion de vider son sac sur la hiérarchie.

Et cela se passe même si on fournit des grilles explicitant : "Vous avez demandé une formation parce que vous vous trouviez dans telle difficulté à votre poste de travail. Est-ce que vous pensez à présent être libéré de cette difficulté ?"

On ne nous apprends jamais à apprécier les choses. Tout ce qu'on connaît c'est les notes et le prof qui nous traite de "pire classe du lycée". Rien d'étonnant à ce que les enseignants aient mal pris la proposition d'évaluation par les élèves.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
cyrano
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Message par cyrano »

Perkele a écrit :J'ai commencé l'entraînement très tôt :D
Je n'en doute pas... :wink:

Mais en sens inverse, pourriez-vous dire que, si un professionnel que vous appréciez à la fois pour ses compétences et pour sa personnalité (j'ai pris le cas de votre médecin, mais cela peut être n'importe qui d'autre) commettait une erreur, vous seriez capable de revoir uniquement votre jugement sur ses compétences, sans que cela ne rejaillisse le moins du monde sur la sympathie que vous avez pour sa personne?
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Perkele
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Message par Perkele »

cyrano a écrit :
Perkele a écrit :J'ai commencé l'entraînement très tôt :D
Je n'en doute pas... :wink:

Mais en sens inverse, pourriez-vous dire que, si un professionnel que vous appréciez à la fois pour ses compétences et pour sa personnalité (j'ai pris le cas de votre médecin, mais cela peut être n'importe qui d'autre) commettait une erreur, vous seriez capable de revoir uniquement votre jugement sur ses compétences, sans que cela ne rejaillisse le moins du monde sur la sympathie que vous avez pour sa personne?
Je ne sais pas... J'ai plutôt tendance à trouver des excuses aux gens que j'aime... Si je me souviens d'une situation de ce genre je reviendrai en parler.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Klausinski
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Message par Klausinski »

Que pensez-vous de l'expression « Untel crie au coup de force » ? Les grammaires indiquent qu'on peut crier au loup, au secours, au feu, au meurtre, mais à chaque fois on peut réellement crier « Au meurtre ! », « Au secours », etc., alors que je ne ne vois pas dans quelle circonstance on crierait « Au coup de force ! ».
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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