Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Jean-Luc

Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Jean-Luc »

André et oliglesias s'il vous plaît laissez de prendre mes mots du mauvais côté , je vois que vous essayez d'agacer Claude. Oliglesias la thérapie auditive existe bel et bien car elle nous aide à distinguer les sons les plus subtiles qui soient dans différents domaines comme la musique, les sons de la nature, du langage etc. Bref cette thérapie sert à rééduquer notre ouï. oliglesias vous ajoutez le mot provocation et c'est vous qui provoquez.
Claude avait simplement dit qu'il ne fait pas la différence, pourtant je la fais et je suis non-francophone. Je voulais l'aider. C'est tout.
Dernière modification par Jean-Luc le sam. 18 mai 2019, 19:45, modifié 1 fois.
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Claude
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Claude »

Jean-Luc a écrit : ven. 17 mai 2019, 22:18 [...] je vois que vous essayez d'agacer Claude. [...]
Je n'ai rien constaté de tel de la part d'oliglesias et André. :?:
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André (G., R.)
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par André (G., R.) »

L'intolérance de Jean-Luc est là !

« Schwa », « e muet », « e caduc »... , des notions à préciser. Pauvre lecteur !

Vous l'avez évoqué, Claude : en français habituel, « e muet » désigne un e écrit non prononcé, comme dans /amne/ (am'né) pour « amener ». Or les linguistes constatent que certains locuteurs produisaient jadis ou produisent parfois encore de nos jours un son (phonème) vocalique qui lui correspond, et qu'on continue de l'écrire. Pour eux, donc, un « e muet » n'est pas forcément non prononcé ! Mais ils préfèrent, je crois, et moi aussi, « e caduc ».

J'ai assez souvent entendu parler du schwa pendant mes études... et n'ai jamais bien compris de quoi il s'agissait ! Le mot vient de l'hébreu (Wikipédia), où il désigne le « vide ». Or il semblerait qu'il y en ait un à la fois dans « vendredi » et dans « samedi ». Pourtant, je n'imagine pas que qui que ce soit s'avise de faire oralement l'économie du second e de « vendredi », tandis que, pour « samedi », la majorité des locuteurs ignore cette voyelle. Je lis même que la prononciation fautive /uʁsəbʁœ̃/ (oursebrun) d'« ours brun » contiendrait un schwa. À l'aide !
Jean-Luc

Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Jean-Luc »

André a écrit :
Je lis même que la prononciation fautive /uʁsəbʁœ̃/ (oursebrun) d'« ours brun » contiendrait un schwa. À l'aide !

RDV sur Forvo, tapez "L'ours brun" et seulement un locuteur appelé SplOuf le prononce comme on le doit, le reste ils n'en ont aucune idée. Triste époque de nos jours par rapport à la phonétique. Inadmisible d'entendre les autres locuteurs parler comme ça !! Je n'en ai assez ! Il faut respecter les règles de l'Api et arrêter les blablabla qui confondent nos chers lecteurs.

Une remarque :
André et oliglesias vos discours peuvent être logiques grosso mode entre phonéticiens (ils doivent vendre des livres), mais la plupart de nos lecteurs cherchent la simplicité. Finalement ils ne savent pas à cause de ça, comment ils doivent prononcer vraiment ces trois sons. Un dernier conseil, vous devez les prononcer comme dans la vidéo que j'ai déjà posté, cette femme, elle s'est bien renseignée et sait de quoi parle, donc, ce serait bon d'arrêter un peu la musique !!

oliglesias a écrit :
Cela faisait longtemps que je n'étais pas venu embêter un peu Jean-Luc :wink:
Pas du tout, car je sais très bien au préalable comment je dois prononcer, je dirais que ce sont les gens qui sont embêtés par des discours qui ne mènent nulle part.
Pauvres mes chères lectrices ! Mais je suis là.
Dernière modification par Jean-Luc le sam. 18 mai 2019, 19:29, modifié 1 fois.
André (G., R.)
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par André (G., R.) »

Jean-Luc a écrit : sam. 18 mai 2019, 15:45 Finalement ils ne savent pas à cause de ça, comment ils doivent prononcer vraiment ces trois sons.
Détrompez-vous ! Presque personne, parmi les locuteurs natifs du français, ne se pose probablement cette sorte de question !
• Leur majorité fait la distinction, me semble-t-il, sans y penser, sans se questionner, entre de et deux.
• Personne, parmi mes connaissances, ne différencie oralement, en langage spontané, « le rat » et « leurra » ! On peut le regretter — ce n'est pas mon cas — mais on se trompe si l'on imagine que cela gêne beaucoup de monde !
Jean-Luc

Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Jean-Luc »

André qu'est-ce que vous me racontez ?
Heureusement que je dois voyager quelques semaines au Luxembourg, et j'espére que là-bas je rechargerai mes batteries. Je n'en peux plus. Du fond du cœur, bonne continuation à tous.
oliglesias
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par oliglesias »

André (G., R.) a écrit : sam. 18 mai 2019, 10:12

J'ai assez souvent entendu parler du schwa pendant mes études... et n'ai jamais bien compris de quoi il s'agissait ! Le mot vient de l'hébreu (Wikipédia), où il désigne le « vide ». Or il semblerait qu'il y en ait un à la fois dans « vendredi » et dans « samedi ». Pourtant, je n'imagine pas que qui que ce soit s'avise de faire oralement l'économie du second e de « vendredi », tandis que, pour « samedi », la majorité des locuteurs ignore cette voyelle. Je lis même que la prononciation fautive /uʁsəbʁœ̃/ (oursebrun) d'« ours brun » contiendrait un schwa. À l'aide !

Vous savez, cette notion de "schwa" est déjà relativement ancienne pour désigner un "son" : la première mention dans une grammaire date de la deuxième moitié du XVIIè siècle. Et depuis, beaucoup de confusions entre plusieurs termes : "schwa", "e muet" ou même "e féminin". Récemment, comme vous le dites, on préfère parler de "e caduc".

Mais alors d'où viennent ces confusions ?
Qu'est-ce que le schwa ?

Le TLFi écrit :
Voyelle neutre, ni ouverte ni fermée, ni antérieure ni postérieure, ni rétractée ni arrondie; en français, le e muet.
J'imagine que la définition ne vous avance pas. Effectivement, pourquoi parler de "e muet" qui serait un "schwa", donc une voyelle ?
En fait, le début de la définition est intéressante. C'est une voyelle neutre, parfaitement "centrale" et qui, donc, ne demande aucun effort articulatoire pour être prononcée. Et qu'est-ce qui ne demande aucun effort articulatoire également ? L'absence de son. Pour moi, le lien entre schwa et absence de voyelle (ou "e muet") est là : les deux sont extrêmement proches. On produira un son vocalique parfois : souvent quand l'enchainement des consonnes nous y oblige, d'autres fois pour maintenir notre prononciation dans un registre un peu plus élevé. Et d'autres fois, plus souvent, on ne produira pas de son vocalique.
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par oliglesias »

André (G., R:) a écrit : Je lis même que la prononciation fautive /uʁsəbʁœ̃/ (oursebrun) d'« ours brun » contiendrait un schwa.
Jean-Luc a écrit :RDV sur Forvo, tapez "L'ours brun" et seulement un locuteur appelé SplOuf le prononce comme on le doit, le reste ils n'en ont aucune idée.
Je vais reprendre rapidement l'exemple de "l'ours brun". D'autres exemples sont très connus comme le journal "Ouest France" qu'on prononce très souvent avec un schwa après le /t/.

Jean-Luc nous dit que ceux qui prononceraient avec un schwa se tromperaient, que seuls ceux qui ne le prononcent pas on raison. André, vous, vous affirmez que la prononciation avec le schwa est fautive. Le problème c'est que lorsque nous parlons, certains enchainements consonantiques peuvent être plus complexes que d'autres et pas adaptés à la structure syllabique de notre langue.

Je vous copie ici un bref texte issu du site du projet PFC (Phonologie du Français Contemporain) :
Malgré la complexité du phénomène, la plupart des cas de figures peuvent être appréhendés à travers deux règles relativement simples :

règle n°1 (règle du contexte droit) : si le e caduc est suivi d’une voyelle ou se trouve en fin de mot, il n’est pas prononcé (ex : bonne idée), sauf s’il est suivi d’un h aspiré (ex : le hibou), il est systématiquement réalisé.

règle n°2 (règle des trois consonnes) : si un e caduc est précédé d’au moins deux consonnes et suivi d’au moins une consonne (« trois consonnes »), il est normalement prononcé ; sinon, il n’est pas réalisé.
Observons donc la règle 2 : si on a un "e caduc" précédé d'au moins deux consonnes et suivi d'au moins une consonne, on doit le prononcer normalement. Donc, dans "analyste financier", le schwa étant précédé de deux consonnes /s/ et /t/ et suivi d'une consonne /f/, normalement on le prononce. D'ailleurs, si on ne le prononce pas, on aura tendance tout naturellement, à assimiler le /s/ et le /t/ ce qui donnerait presque un "analiss financier", le /t/ étant alors très peu perceptible.

Idem avec une expression du type "notre liberté". Soit on prononce le schwa, soit, si on ne le prononce pas, il y aura une assimilation du /t/ et du /r/ et cela donnera quelque chose du type "not' liberté". Tout ça pour respecter une règle phonétique (ou du moins une grosse tendance). Je rappelle que ça, c'est dans la vraie vie, quand on parle à un rythme normal. Pas sur un site comme Forvo où là, la personne va avoir une diction artificielle et pourra très bien ne pas prononcer le schwa, mais il y aura entre "notre" et "liberté" vraisemblablement une pause (aussi infime soit-elle).


Quelle différence avec "ours brun" ou "ouest France" ? Aucune. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas de "e" graphique, que l'on peut facilement enchainer 3 consonnes (ou ici 4 avec le /r/ de "brun" ou de "France"). Donc, naturellement, va apparaitre la voyelle la plus centrale et neutre que connaisse la langue française, le schwa, pour permettre l'enchainement consonantique.

Et si Jean-Luc s'insurge contre cette tendance extrêmement naturelle, je lui rappelle seulement qu'il existe dans nos langues romanes, et encore plus particulièrement en espagnol, sa langue maternelle, une tendance similaire : autrement dit, l'ajout d'un phonème vocalique non étymologique pour permettre l'enchainement de groupes consonantiques complexes qui ne font pas partie de la structure syllabique de la langue à un moment donné. C'est ce qu'on appelle le "e épenthétique". Cette tendance à ajouter une voyelle existe déjà en latin (c'est pourquoi on la retrouve dans les autres langues romanes). En latin donc, on a ajouté rapidement après l'apparition de l'accent tonique (avant le latin avait un accent principalement mélodique), une voyelle épenthétique (un /i/ ouvert à l'époque) au début des mots qui commençaient par un /s/ suivi d'une consonne.

Donc, en latin classique on avait "sperare" (attendre quelque chose comme devant se réaliser) qui a donné déjà en latin vulgaire "isperare" et en français "espérer" et en espagnol "esperar". En espagnol, cette tendance existe encore. Je suis sûr que spontanément Jean-Luc en parlant français aura tendance à ajouter un son vocalique au début de mots tels que "sport", "score", ou tout autre mot commençant par /s/+consonne. Et il ferait alors comme tous les hispanophones que je connais qui apprennent à parler français.

Est-ce qu'on doit s'insurger de cet ajout d'une voyelle épenthétique dans "espérer" ? Non.
Est-ce qu'on doit s'insurger de cet ajout d'une voyelle paragogique dans "Ours brun" ? Non.

PARAGOGE :
TLFi a écrit :Addition à la finale d'un mot, d'une lettre ou d'une syllabe non étymologique.
André (G., R.)
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par André (G., R.) »

Merci beaucoup, oliglesias, pour ces explications impressionnantes et instructives. Elles demandent une attention certaine.

« Ours brun » et « Ouest-France » me concernent particulièrement. « Petit ours brun » est une série d'histoires pour enfants, dont j'ai lu des dizaines à mes petits-enfants, en ne prononçant jamais que /uʁsbʁœ̃/ et non /uʁsəbʁœ̃/. Abonné à Ouest-France, comme l'étaient mes parents, je dis /wɛstfʁɑ̃s/, en aucun cas /wɛstəfʁɑ̃s/. La prononciation correcte est à la portée de tout le monde !

Je crois comprendre l'expression «voyelle neutre », mais je ne pense pas que cette notion ait une grande valeur scientifique. Bon, il se peut qu'à l'intérieur d'un groupe de trois ou quatre sons consonantiques, si l'on éprouve le besoin d'insérer un son vocalique, ce soit plus facilement /ə/ qui s'impose... en français. Rien de tel en allemand. Il serait intéressant de savoir ce qui se passe à cet égard dans d'autres langues : je ne serais pas étonné d'apprendre qu'il s'agit d'une particularité de notre langue.

Et je ne serais pas parfaitement honnête si je n'ajoutais pas que m'échappe toujours plus ou moins la raison pour laquelle le e de « vendredi », où il est prononcé, et celui de « samedi », où cette même voyelle n'est généralement pas produite oralement, sont appelés schwas. Les phonéticiens considèrent-ils que le e de « vendredi » serait négligeable, sans intérêt, moins important que d'autres phonèmes ? Impossible, ce ne serait pas une démarche scientifique. Pourtant « schwa » signifie « vide » !
oliglesias
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par oliglesias »

De rien André.

Je vais répondre à quelques unes de vos observations.
André (G., R.) a écrit :Je crois comprendre l'expression «voyelle neutre », mais je ne pense pas que cette notion ait une grande valeur scientifique.
Si, si, ça a une grande valeur scientifique.
Regardez n'importe quelle représentation du trapèze vocalique du français et vous constaterez que le schwa [ə] se situe parfaitement au centre de celui-ci : c'est donc la voyelle du français la plus centrale. Qu'est-ce que cela signifie ? Que la position de la langue, l'ouverture de la bouche, l'arrondi de la bouche, tout ça ne demande aucun effort articulatoire : tout se trouve dans une position "neutre". Avoir la bouche entrouverte demande moins d'effort que de la fermer.

Voici une des multiples représentations du trapèze vocalique du français :

Image

On voit bien que [ə] est au milieu. D'où cette notion de "neutre". Et comme je le disais, étant la voyelle la plus neutre, c'est donc aussi la voyelle la plus proche du vide, c'est-à-dire du "rien", de l'absence de réalisation d'une voyelle, puisqu'elle ne demande pas d'effort articulatoire. Donc, finalement, le nom de schwa est plutôt bien trouvé, d'après moi, puisque c'est la voyelle en français (mais elle existe dans d'autres langues apparemment) la plus proche de ce "vide", de cette absence de réalisation du moindre son.
André (G., R.) a écrit :La prononciation correcte est à la portée de tout le monde !
Cette remarque, que je comprends tout à fait, est à nuancer. Que pensez-vous que pourraient dire les francophones du sud de la France du fait que vous ne prononcez pas beaucoup de [ə] ? Notamment, celui de "samedi". Eux, qui majoritairement le prononcent, pourraient vous rétorquer la même chose : "prononcer ce [ə] est à la portée de tout le monde !". Donc, pourquoi ne le prononcez-vous pas ? Car votre façon de parler, la variété du français que vous parlez, celle du nord, supprime certains schwas dans certaines positions car la structure syllabique et accentuelle est différente des variétés du sud de la France. Mais en soit, rien ne vous empêche de prononcer ce [ə], vous en êtes capable mais vous ne le faites pas. L'ajout d'un [ə] paragogique* répond également à une tendance, à une habitude, car beaucoup de locuteurs ne sont pas "à l'aise" avec l'enchainement de certaines consonnes sans aucun appui vocalique, car ces enchainements ne correspondent pas à quelque chose de "naturel" dans leur variété.
Je ne vois pas pourquoi la présence de ce "e paragogique" non étymologique (dans "ours brun" par exemple) serait moins correct que la suppression d'un "e étymologique" (dans "samedi" par exemple).

* (j'ai lu que le projet PFC parle de "[ə] épenthétique", mais cela voudrait dire qu'on ajoute le [ə] au début du deuxième mot… pour le coup, je ne suis pas vraiment d'accord avec ça)

Quant à votre dernière interrogation :
André (G., R.) a écrit :Et je ne serais pas parfaitement honnête si je n'ajoutais pas que m'échappe toujours plus ou moins la raison pour laquelle le e de « vendredi », où il est prononcé, et celui de « samedi », où cette même voyelle n'est généralement pas produite oralement, sont appelés schwas. Les phonéticiens considèrent-ils que le e de « vendredi » serait négligeable, sans intérêt, moins important que d'autres phonèmes ? Impossible, ce ne serait pas une démarche scientifique. Pourtant « schwa » signifie « vide » !
Dans "vendredi" et dans "samedi", bien que vous ne prononciez pas le "e" de samedi alors que vous prononcez celui de "vendredi", ces deux "e" sont des schwas, des voyelles qu'on a prononcées à un moment donné et qui d'ailleurs sont prononcées toutes deux dans certaines variétés du français (dans le sud notamment). On a donc bien le même phonème pour moi. Un schwa. Phonologiquement, et logiquement, on devrait les transcrire de cette manière :
"vendredi" : /vɑ̃dʁədi/
"samedi" : /samədi/

Mais phonétiquement, on aura bien une différence en français standard (donc septentrionnal) :
"vendredi" : [vɑ̃dʁədi]
"samedi" : [samdi]

Je suis conscient qu'en ligne on trouvera systématiquement la transcription sans schwa pour "samedi". Mais la plupart du temps, c'est une transcription phonétique qu'on donne. Et cette transcription phonétique correspond toujours à celle du standard, donc à une des variétés du nord de la France où la chute du schwa est très fréquente contrairement aux variétés du sud.
Le wiktionnaire, lui, propose une transcription phonologique sans schwa pour "samedi". Là, je ne suis pas d'accord. Le phonème existe, on peut le prononcer et il est étymologique en plus.

Donc, pour conclure, mais ce n'est que mon avis et je ne suis pas phonéticien : dans "vendredi" et "samedi", on a bien, phonologiquement, la présence d'un schwa, c'est-à-dire d'une voyelle moyenne centrale. Cependant, dans les variétés du nord de la France, ce phonème vocalique a tendance à tomber dans certains contextes. Il peut tomber (et tombe systématiquement ou presque) dans "samedi" (car une consonne avant seulement et une seule après) mais il ne peut pas tomber dans "vendredi" (car deux consonnes avant et une après), l'enchainement [drd] étant impossible en français.

J'espère avoir été, cette fois-ci, un peu plus clair sur mon avis sur la question, qui n'engage que moi, bien évidemment...
André (G., R.)
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par André (G., R.) »

oliglesias a écrit : dim. 19 mai 2019, 12:05 On voit bien que [ə] est au milieu. D'où cette notion de "neutre". Et comme je le disais, étant la voyelle la plus neutre, c'est donc aussi la voyelle la plus proche du vide,
Excusez-moi, je trouve cette conclusion hâtive. Quand bien même /ə/ serait le son vocalique le plus facile à prononcer, le prononcer n'est pas la même chose que ne pas le prononcer !
oliglesias a écrit : dim. 19 mai 2019, 12:05 Que pensez-vous que pourraient dire les francophones du sud de la France du fait que vous ne prononcez pas beaucoup de [ə] ? Notamment, celui de "samedi". Eux, qui majoritairement le prononcent, pourraient vous rétorquer la même chose : "prononcer ce [ə] est à la portée de tout le monde !". Donc, pourquoi ne le prononcez-vous pas ? Car votre façon de parler, la variété du français que vous parlez, celle du nord, supprime certains schwas dans certaines positions car la structure syllabique et accentuelle est différente des variétés du sud de la France. Mais en soit, rien ne vous empêche de prononcer ce [ə], vous en êtes capable mais vous ne le faites pas. L'ajout d'un [ə] paragogique* répond également à une tendance, à une habitude, car beaucoup de locuteurs ne sont pas "à l'aise" avec l'enchainement de certaines consonnes sans aucun appui vocalique, car ces enchainements ne correspondent pas à quelque chose de "naturel" dans leur variété.
Je ne vois pas pourquoi la présence de ce "e paragogique" non étymologique (dans "ours brun" par exemple) serait moins correct que la suppression d'un "e étymologique" (dans "samedi" par exemple).
Je prononce parfois le e de « samedi » ! Quand la métrique le demande ou que je me trouve dans le Midi !
Mais vous comparez ce qui ne me paraît pas comparable :
• d'une part, une évolution dans le sens de la simplification orale, conforme à ce qui se passe depuis des centaines d'années en français, conduisant à la non prononciation d'un e caduc dans « samedi », de même nature que la non prononciation du e final de « amène »,
• d'autre part, l'intercalation d'une voyelle non justifiée, non nécessaire oralement, non présente à l'écrit, entre « ours » et « brun » ou entre « Ouest » et « France ».
oliglesias a écrit : dim. 19 mai 2019, 12:05
Dans "vendredi" et dans "samedi", bien que vous ne prononciez pas le "e" de samedi alors que vous prononcez celui de "vendredi", ces deux "e" sont des schwas, des voyelles qu'on a prononcées à un moment donné et qui d'ailleurs sont prononcées toutes deux dans certaines variétés du français (dans le sud notamment). On a donc bien le même phonème pour moi. Un schwa. Phonologiquement, et logiquement, on devrait les transcrire de cette manière :
"vendredi" : /vɑ̃dʁədi/
"samedi" : /samədi/
Mais phonétiquement, on aura bien une différence en français standard (donc septentrionnal) :
"vendredi" : [vɑ̃dʁədi]
"samedi" : [samdi]
« Logiquement » veut-il dire que vous contestez l'évolution qui s'est produite ? Prononcez-vous vous-même /samədi/ ?
oliglesias a écrit : dim. 19 mai 2019, 12:05dans les variétés du nord de la France, ce phonème vocalique a tendance à tomber dans certains contextes. Il peut tomber (et tombe systématiquement ou presque) dans "samedi" (car une consonne avant seulement et une seule après) mais il ne peut pas tomber dans "vendredi" (car deux consonnes avant et une après), l'enchainement [drd] étant impossible en français.
J'espère avoir été, cette fois-ci, un peu plus clair sur mon avis sur la question, qui n'engage que moi, bien évidemment...
Encore tous mes remerciements pour ces explications si intéressantes.
J'avais cru comprendre que, ne prononçant pas le e de « samedi » (/samdi/), je produisais tout de même un schwa. Ce n'est apparemment pas le cas. Mais alors j'en viens à me demander si tous les /ə/ sont des schwas, puisque « vendredi », pour lequel tout le monde prononce le second e, comporte un schwa.
Avant de publier ce que je viens d'écrire, je me dis que je n'ai peut-être pas été assez attentif à tout votre texte, où se trouveraient des réponses à mes nouvelles questions. Ne m'en veuillez pas si tel est le cas. Aucun inconvénient si vous n'y réagissez pas ou si vous y revenez beaucoup plus tard. Merci encore.
Dernière modification par André (G., R.) le dim. 19 mai 2019, 16:26, modifié 1 fois.
Leclerc92
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Leclerc92 »

André (G., R.) a écrit : dim. 19 mai 2019, 14:50 • d'autre part, l'intercalation d'une voyelle non justifiée, non nécessaire oralement, non présente à l'écrit, entre « ours » et « brun » ou entre « Ouest » et « France ».
Non nécessaire mais certainement opportune puisque une grande partie de la population trouve qu'il est plus simple d'articuler avec cette voyelle d'appui ajoutée que sans elle. Match-e-retour, Parc-ke-des Princes. Il s'agit d'un phénomène très commun.
http://www.academie-francaise.fr/parqueu-des-princes
https://jeanpierrecolignon.wordpress.co ... st-france/

Comme l'écrit doctement Wikipedia, la svarabhakti est une modification phonétique qui désigne l'apparition d'une voyelle d'appui dans un groupe de consonnes, visant à en faciliter la prononciation. C'est un cas d'anaptyxe.
Wow, ça en jette, hein !

Difficultés à s'endormir le soir, un seul remède :
Aspects de la phonologie du schwa dans le français contemporain : optimalité, visibilité prosodique, gradience
oliglesias
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par oliglesias »

André (G., R.) a écrit : dim. 19 mai 2019, 14:50

Excusez-moi, je trouve cette conclusion hâtive. Quand bien même /ə/ serait le son vocalique le plus facile à prononcer, le prononcer n'est pas la même chose que ne pas le prononcer !
Ce n'est pas simplement "le son vocalique le plus facile à prononcer", c'est surtout celui qui demande le moins d'effort articulatoire, d'où sa proximité avec le "vide" et donc, sa tendance encore plus marquée que pour les autres voyelles atones de tomber. A aucun moment je n'ai dit que cela revenait au même que de ne rien prononcer.
Mais si n'importe quelle voyelle atone a pu tomber dans l'évolution du latin au français, de par leur faiblesse articulatoire, il me semble évident (je ne crois pas que ce soit une conclusion hâtive) que la voyelle la plus centrale, la plus neutre, celle qui demande le moins d'effort articulatoire soit la plus sujette à la disparition aujourd'hui.
André (G., R.) a écrit : Mais vous comparez ce qui ne me paraît pas comparable :
• d'une part, une évolution dans le sens de la simplification orale, conforme à ce qui se passe depuis des centaines d'années en français, conduisant à la non prononciation d'un e caduc dans « samedi », de même nature que la non prononciation du e final de « amène »,
• d'autre part, l'intercalation d'une voyelle non justifiée, non nécessaire oralement, non présente à l'écrit, entre « ours » et « brun » ou entre « Ouest » et « France ».
C'est vous qui dites que l'intercalation est injustifiée. Mais elle l'est, comme je vous l'ai déjà expliqué. Et ce n'est pas parce que vous ne l'utilisez pas qu'elle n'est pas justifiée. Le fait qu'elle ne soit pas "nécessaire" pour vous, ne réfute en rien sa justification et sa présence dans d'autres parlers que le vôtre. Et puis autre chose… vous parlez "d'une évolution dans le sens de la simplification orale", mais il faut bien tenir compte de deux tendances dans l'évolution phonétique d'une langue, et la "simplification" (ou plutôt "affaiblissement articulatoire") n'en est qu'une. L'autre, la tendance inverse, celle du "renforcement articulatoire", est très importante également.
Je vais vous donner d'autres exemples de renforcement articulatoire dans l'histoire du français qui concerne les consonnes, mais qui s'est produit pour EXACTEMENT les mêmes raisons que l'apparition de ce "e paragogique" (ou cette svarabhakti).

Lorsqu'en bas latin chutent des voyelles atones, on se retrouve alors avec des groupes consonantiques "difficiles à prononcer" car ayant des points d'articulation trop éloignés et, par conséquent, qui rendent difficile un enchainement fluide : ces suites de consonnes n'appartenant pas non plus à la structure syllabique "normale" du français. Lorsqu'on a ce type de groupes consonantiques difficiles à prononcer, on va intercaler une consonne qui n'a rien d'étymologique.
Des exemples, on en trouve beaucoup :
  • dans certains futurs irréguliers (volere habeo > *voleray > *volrai > voldrai et ensuite voudrai, mais on a la même chose avec "viendrai", "tiendrai", etc.)
  • quand une voyelle chute entre une nasale et un /l/ ou un /r/ : CUM(U)LUM >comble, NUM(E)RUM > nombre, etc.
etc.

Je pense que, comme vous aujourd'hui, à l'époque, il devait y avoir des personnes pour qui la prononciation [num'ru] ne devait pas poser de problème. Pour eux aussi, la consonne qu'ajoutaient certains devaient être non nécessaire. Et pourtant, la présence de cette consonne est TOTALEMENT justifiée (même si pas nécessaire pour tous).

J'en reviens ici à l'exemple que j'ai déjà donné de la voyelle épenthétique qu'on trouve dans "espérer" (qui n'existait pas en latin classique : SPERARE). Vous devez bien imaginer que beaucoup de romains de l'époque ne devaient pas trouver cette voyelle nécessaire à l'oral (puisque jusqu'alors elle n'existait pas) et pourtant, elle était justifiée. Et aujourd'hui, on a un nombre assez important de mots qui comportent cette voyelle non étymologique.

C'est en cela que je ne pense pas avoir comparé des choses incomparables puisque l'évolution phonétique ne suit pas uniquement une tendance à la simplification, c'est faux. Le but premier, d'après moi, dans l'évolution phonétique d'une langue, est la commodité : parfois, cette commodité va provoquer une "simplification", mais d'autres fois, par commodité, on va ajouter des phonèmes.
André (G., R.) a écrit :« Logiquement » veut-il dire que vous contestez l'évolution qui s'est produite ? Prononcez-vous vous-même /samədi/ ?
Pas du tout. Comment pourrais-je contester une évolution ? C'est absurde.
Mais il faut que vous compreniez que la phonologie et la phonétique, ce n'est pas la même chose. Si vous me demandez si je prononce de telle ou telle autre manière, vous devriez utiliser les crochets des transcriptions phonétiques, qui correspondent à une articulation réelle, la mienne, la vôtre, etc. La transcription phonologique (avec barres obliques) correspond plutôt à une prononciation théorique. Les deux, la transcription phonologique et la phonétique, peuvent être différentes.
Exemple : le mot "petit", phonologiquement doit se transcrire /pəti/, mais phonétiquement, il peut se transcrire de plein d'autres manières, car il existe des allophones (différentes manières de réaliser un même phonème).
On peut en effet prononcer ce schwa plus fermé ou plus ouvert (c'est ce que j'écrivais l'autre jour) : on devra alors transcrire phonétiquement [pøti] comme dans "peu", ou alors [pœti] comme dans "heure". Le schwa, théoriquement, a un point d'articulation différent de ces deux autres sons vocaliques.
Mais on peut aussi prononcer le phonème occlusif alvéolaire sourd /t/ comme une affriquée (c'est ce qui se produit en français du Québec ou dans le sud ou même en banlieue parisienne) : [pət͡si]

Et, évidemment, on peut aussi ne pas prononcer le schwa, auquel cas, on aura [pti].

Donc, quand je transcris /samədi/, ça ne veut pas dire que je prononce le schwa (je ne le fais pas), ça veut dire que pour moi, logiquement, la transcription phonologique de "samedi" doit comporter ce schwa, même si la plupart du temps, dans les variétés du nord de la France, on ne le prononce pas. Pourquoi logiquement ? Parce que parfois il peut être prononcé (vous l'avez dit vous-même, que ce soit pour des raisons poétiques ou régionales) et qu'en plus il est étymologique (comme celui de vendredi).

Vous n'avez pas à me remercier André. Si j'écris ces messages c'est parce que vous faites preuve de curiosité et que j'aime ce sujet. Même si je ne suis pas phonéticien, ce sujet du schwa m'intéresse et j'aime partager ce que je pense, je dis bien ce que je pense et pas ce que je "sais" : je ne veux pas qu'on pense que je crois avoir raison, d'ailleurs, comme je le disais, la transcription phonologique de "samedi" avec le schwa, m'est personnelle, on peut ou pas être d'accord avec moi.

En tout cas, nos échanges depuis quelques jours montrent une chose importante : sur un sujet aussi complexe que celui du schwa et des sa ou ses réalisations phonétiques, on ne peut pas asséner des vérités telles que "c'est comme cela qu'il faut faire et pas autrement", ce que faisait Jean-Luc. C'est, je pense, un sujet extrêmement complexe qui ne mérite pas un traitement aussi superficiel que celui qu'offre ce type de phrases.
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Claude
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Claude »

Ce E est pour moi une lettre particulière qui sort du lot des lettres de l'alphabet français par son emploi :
- elle est la plus employée ;
- elle est muette ou non ;
- elle féminise beaucoup de mots ;
- elle peut être surmontée de trois accents ou un tréma ;
- elle peut être accolée à un O ou un A ;
- elle contribue à la construction des sons complexes (en, eu, ei...).
- elle est la plus courte en durée dans l'alphabet Morse (un point) ;

Que pensez-vous de mes hautes réflexions ? :d
En ai-je oublié ?
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Re: Le syndrome d'Asperger (un cas de phonétique)

Message par Leclerc92 »

Claude a écrit : lun. 20 mai 2019, 14:47 Ce E est pour moi une lettre particulière qui sort du lot des lettres de l'alphabet français par son emploi :
- elle est la plus employée ;
Pas dans le roman La Disparition, de Perec ! :)
https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Disparition_(roman)
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