dont ou desquelles ?
- Perkele
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 18:26
- Localisation : Deuxième à droite après le feu
Et avez-vous remarqué le mal qu'ont nos contemporains, notamment ceux qui parlent à public dans la "boîte à troubadours", à accorder duquel, de laquelle, dans lequel, desquels, etc ?
Heureusement, il y en a un parmi nous qui lutte ici
Heureusement, il y en a un parmi nous qui lutte ici
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
- Klausinski
- Messages : 1295
- Inscription : mar. 12 déc. 2006, 23:54
- Localisation : Aude
C’est incroyable. Je n’avais pas remarqué cette faute, je ne soupçonnais même pas son existence. Elle me paraît tellement impossible à commettre ! C’est fou, j’en suis tout éberlué !
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
Veuillez m’excuser si je reviens sur la phrase de départ (Je prends en charge des personnes dont je suis à l’écoute), mais elle me semble grammaticalement correcte. En effet, dont est agrammatical [on signale l’agrammaticalité en faisant précéder une phrase ou un mot d’un astérisque] lorsque le verbe de la relative requiert obligatoirement une préposition autre que ‘de’ (collaborer à, émettre des doutes sur, prendre parti pour, etc.) :
(1) Ce dictionnaire est excellent. J’ai collaboré à sa réalisation. > Ce dictionnaire, à la réalisation duquel j’ai collaboré, est excellent. Et non : *…dont j’ai collaboré à la réalisation….
(2) Il a écrit un article. J’ai émis des doutes sur son bien-fondé. > Il a écrit un article sur le bien-fondé duquel j’ai émis des doutes. Et non : *…dont j’ai émis de doutes sur le bien-fondé.
Or, dans la phrase en question, à l’écoute de est un syntagme prépositionnel en soi et a valeur d’adjectif (attentif, conscient…), et la préposition ‘à’ lui appartient (elle ne dépend pas du verbe ‘être’). L’emploi de dont, en l’occurrence, me paraît correct :
(3) Je prends en charge des personnes. Je suis à l’écoute de ces personnes. > Je prends en charge des personnes dont je suis à l’écoute.
Tout comme :
(4) Il y a des dangers. Nous ne sommes pas à l’abri de ces dangers. > Il y a des dangers dont nous ne sommes pas à l’abri. (‘à l’abri’ correspond à un adjectif tel que ‘protégé’).
(1) Ce dictionnaire est excellent. J’ai collaboré à sa réalisation. > Ce dictionnaire, à la réalisation duquel j’ai collaboré, est excellent. Et non : *…dont j’ai collaboré à la réalisation….
(2) Il a écrit un article. J’ai émis des doutes sur son bien-fondé. > Il a écrit un article sur le bien-fondé duquel j’ai émis des doutes. Et non : *…dont j’ai émis de doutes sur le bien-fondé.
Or, dans la phrase en question, à l’écoute de est un syntagme prépositionnel en soi et a valeur d’adjectif (attentif, conscient…), et la préposition ‘à’ lui appartient (elle ne dépend pas du verbe ‘être’). L’emploi de dont, en l’occurrence, me paraît correct :
(3) Je prends en charge des personnes. Je suis à l’écoute de ces personnes. > Je prends en charge des personnes dont je suis à l’écoute.
Tout comme :
(4) Il y a des dangers. Nous ne sommes pas à l’abri de ces dangers. > Il y a des dangers dont nous ne sommes pas à l’abri. (‘à l’abri’ correspond à un adjectif tel que ‘protégé’).
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Pourtant, en se référant à une construction similaire, on lit dans Grevisse : « Dont ne peut, en principe, dépendre d'un complément introduit par une préposition. On ne dira pas Son fils dont il songe à l'avenir. On dira Son fils, à l'avenir de qui il songe. » On peut, en remplaçant les différents éléments de la phrase, et en les gardant dans le même ordre, aboutir à un schéma identique :
son fils dont il songe à l'avenir
ces personnes dont je suis à l'écoute.
son fils dont il songe à l'avenir
ces personnes dont je suis à l'écoute.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Pas tout à fait, Jacques : la préposition ‘à’ dans à l’avenir, dans votre première phrase, dépend du verbe songer, qui se construit obligatoirement avec ‘à’ (on ne peut pas *songer qqch/qqn, ni *songer de qqch/qqn). Par conséquent, la seule possibilité est : …à l’avenir duquel il songe.
Dans l’autre phrase, en revanche, apparaît le verbe être, qui est un verbe copulatif, et les locutions prépositionnelles qui le suivent peuvent être remplacées par des adjectifs. Toujours dans Grevisse 9ème édition, §560, Remarques, 1), nous trouvons cet exemple de Montherlant :
Le Renaissant italien dont ils [les Français d’aujourd’hui] sont aux antipodes.
Phrase qui équivaut à :
Le Renaissant italien dont ils sont très loin.
C’est la nature même du verbe être qui permet la construction avec dont.
Dans l’autre phrase, en revanche, apparaît le verbe être, qui est un verbe copulatif, et les locutions prépositionnelles qui le suivent peuvent être remplacées par des adjectifs. Toujours dans Grevisse 9ème édition, §560, Remarques, 1), nous trouvons cet exemple de Montherlant :
Le Renaissant italien dont ils [les Français d’aujourd’hui] sont aux antipodes.
Phrase qui équivaut à :
Le Renaissant italien dont ils sont très loin.
C’est la nature même du verbe être qui permet la construction avec dont.
Non, je ne pense pas, Valiente. En tout cas, dans la phrase qui nous occupe, je considérerais agrammatical *Je prends en charge des personnes à l’écoute desquelles je suis. Le verbe être est trop « faible » sémantiquement pour se trouver ainsi détaché de la locution dont il fait partie (être à l’écoute de) en position finale forte. Donc, dans ce cas, il n’y a qu’une solution, avec dont.valiente a écrit :Confrontation passionnante ! J'en redemande
Pour que ma lanterne ne soit pas en reste, la conclusion est bien, en présence du verbe être, de permettre les deux formes, est-ce bien cela ?
- Klausinski
- Messages : 1295
- Inscription : mar. 12 déc. 2006, 23:54
- Localisation : Aude
Ma réponse instinctive était bonne, youpi ! Je souscris à l’avis de Valiente : le débat est passionnant et nous permet de mieux saisir les règles en question dans leur subtilité.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Nous n'avons certes pas fini de nous interroger et d'exposer nos incertitudes sur les subtilités et difficultés de la langue. Nous n'avons pas tiré le meilleur numéro : on dit que le français est l'une des plus complexes qui soient au monde. En tout cas, ces « confrontations » comme dit Valiente, me sont une leçon d'humilité et de modestie. Quand je pense qu'il existe des personnages qui prétendent ne jamais se tromper dans ce domaine (notamment dans notre asociation), je suis étourdi par tant de vanité !
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).