Un ???
Un ???
Que pensez-vous de l'utilisation de l'article indéfini avant un nom propre? Je le rencontre assez fréquemment dans des ouvrages universitaires sans que cela soit justifié (la poésie d'un Lamartine, la problématique historique d'un Thucydide, etc), et, je dois l'avouer, cela me dérange, et même, m'énerve. Est-ce néanmoins acceptable?
Qu'il est sombre, le rire amer des grandes eaux !
Leconte de Lisle
Leconte de Lisle
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Je ne saurais vous dire de quel type de figure grammaticale ou rhétorique relève cette pratique, mais elle ne me dérange pas. Je pense au contraire qu'elle procède d'une certaine recherche dans l'expression. Je dirais, par exemple, « Il n'a pas le talent d'un Rembrandt, mais possède quand même un joli coup de pinceau ». C'est plus léger que « Il n'a pas le talent d'un grand peintre tel que Rembrandt... ». C'est une sorte d'ellipse.
C'est toujours la même chose : d'après ce que vous dites, les manuels universitaires ont l'air d'abuser de cette construction, c'est ce qui la rend agaçante, et elle fait l'objet d'un usage pas toujours judicieux. Mais appliquée à bon escient, et parcimonieusement, elle produit un heureux effet.
C'est toujours la même chose : d'après ce que vous dites, les manuels universitaires ont l'air d'abuser de cette construction, c'est ce qui la rend agaçante, et elle fait l'objet d'un usage pas toujours judicieux. Mais appliquée à bon escient, et parcimonieusement, elle produit un heureux effet.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Klausinski
- Messages : 1295
- Inscription : mar. 12 déc. 2006, 23:54
- Localisation : Aude
Cette figure de style peut faire penser à l’antonomase mais, dans les contextes que vous donnez, il s’agirait plutôt, comme Jacques le suggère, d’une ellipse. Ce genre de figure ne me gêne pas. L’antonomase, elle, consiste à employer le nom propre pour le nom commun ; dire d’un séducteur un Casanova, un Don Juan, ou d’un avare un Harpagon, d’un hypocrite un Tartuffe, etc.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
Oui, je ne la trouve pas trop dérangeante dans l'exemple utilisée par Jacques, quoique j'aurais tendance à dire directement : il n'a pas le talent de Rembrandt. Mais quand on parle directement de la personne concernée, c'est insupportable. Enfin, pour un Diomède, quoi...
Qu'il est sombre, le rire amer des grandes eaux !
Leconte de Lisle
Leconte de Lisle
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
C'est étonnant comme vous êtes réfractaire à cette utilisation. Vous avez peut-être trop subi la formule dans vos manuels. C'est pourtant tout à fait correct, et plus élégant, plus recherché. À condition bien sûr, comme je l'ai exprimé, d'en user avec la plus grande modération, je dirais même avec une certaine avarice.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Perkele
- Messages : 12915
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 18:26
- Localisation : Deuxième à droite après le feu
Rien à voir avec "faire le Jacques", bien entendu !Claude a écrit :Klausinski a écrit :...dire d’un séducteur un Casanova, un Don Juan, ou d’un avare un Harpagon, d’un hypocrite un Tartuffe, d'un gentil administrateur un Claude, etc.
![[clin d'oeil] :wink:](./images/smilies/icon_wink.gif)
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Il y a si longtemps que je ne l'avais entendue ! Voilà qui me ramène à mon enfance.Perkele a écrit :Rien à voir avec "faire le Jacques", bien entendu !Claude a écrit :Klausinski a écrit :...dire d’un séducteur un Casanova, un Don Juan, ou d’un avare un Harpagon, d’un hypocrite un Tartuffe, d'un gentil administrateur un Claude, etc.
L'origine de cette expression est intéressante, car elle nous conduit notamment à la jacquerie et au nom de famille Jacquard. La jacquerie, révolte des paysans, que l'on surnommait les Jacques (je ne sais pas pourquoi), et le patronyme Jacquard, deux fois dévalorisant, puisqu'il vient de ce surnom paysan assez méprisant, et qu'il est en outre affublé de la désinence péjorative -ard (braillard, jobard, vantard, paillard...).
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Si je ne m'abuse, il y en a un aussi à Venise.
Pour revenir à Jacques, dont l'ancienne orthographe est Jaque, l'origine de ce sobriquet les jacques (je le vois orthographié tantôt avec, tantôt sans majuscule), selon le Dictionnaire historique, est des plus banale : on aurait ainsi surnommé les paysans à cause de la fréquence de ce prénom dans leur milieu. Voir Jacques Bonhomme, Jacquou le Croquant qui dit bien ce qu'il veut dire. C'est lui également qui donna naissance au nom jaquette désignant un pourpoint porté par lesdits paysans. Faire le Jacques c'est faire l'andouille, le benêt, l'imbécile, par référence peut-être à la révolte paysanne, ou plus simplement à cause du peu d'estime dont jouissaient les paysans. L'usage a donné le nom à divers animaux : la pie jacasse, l'écureuil (jaquet ou jacquet), le perroquet (jacquot). Le jaquemart ou jacquemart en est aussi un dérivé emprunté au franco-provençal jacquomart ou jacomart.
Rappelons au passage l'expression dès potron-minet, variante de dès potron-jacquet : au petit matin, dès que le chat (ou l'écureuil) se lève et sort en montrant son postérieur.
Voilà, vous savez à peu près tout sur mon prénom.
Pour revenir à Jacques, dont l'ancienne orthographe est Jaque, l'origine de ce sobriquet les jacques (je le vois orthographié tantôt avec, tantôt sans majuscule), selon le Dictionnaire historique, est des plus banale : on aurait ainsi surnommé les paysans à cause de la fréquence de ce prénom dans leur milieu. Voir Jacques Bonhomme, Jacquou le Croquant qui dit bien ce qu'il veut dire. C'est lui également qui donna naissance au nom jaquette désignant un pourpoint porté par lesdits paysans. Faire le Jacques c'est faire l'andouille, le benêt, l'imbécile, par référence peut-être à la révolte paysanne, ou plus simplement à cause du peu d'estime dont jouissaient les paysans. L'usage a donné le nom à divers animaux : la pie jacasse, l'écureuil (jaquet ou jacquet), le perroquet (jacquot). Le jaquemart ou jacquemart en est aussi un dérivé emprunté au franco-provençal jacquomart ou jacomart.
Rappelons au passage l'expression dès potron-minet, variante de dès potron-jacquet : au petit matin, dès que le chat (ou l'écureuil) se lève et sort en montrant son postérieur.
Voilà, vous savez à peu près tout sur mon prénom.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).