Deux mots, deux fautes
- Jacques
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Deux mots, deux fautes
Hier samedi 3 octobre, un référendum non officiel était organisé sur tout le territoire français par des organisations politiques et syndicales.
Sur le site Internet qui y était consacré, ainsi que sur les pancartes des stands de vote, on lisait en très gros caractères : VOTATION CITOYENNE.
1 – votation, s’il a cours chez nos voisins helvètes, où il est parfaitement régulier, n’est pas reconnu en France, et dans ce pays ne peut être considéré que comme un barbarisme remplaçant à tort VOTE.
2 – citoyen est un substantif, et ne saurait être employé en fonction d’adjectif ; l’adjectif qui lui correspond est civique. Le dernier P.R. le reconnaît sans sourciller ; c’est pour moi une démagogie commerciale : il faut vendre, et pour cela ne pas fâcher l’acheteur, qui le trouve en bonne place dans un autre dictionnaire d’usage avec lequel les éditeurs ne veulent pas être en reste. L'intérêt mercantile passe avant celui de la langue.
L’Académie française ne reconnaît que la seule fonction de nom, c’est un argument qui me suffit. Ce néologisme est un doublet inutile, où l’on retrouve le même phénomène qu’avec résoudre/solutionner.
Sur le site Internet qui y était consacré, ainsi que sur les pancartes des stands de vote, on lisait en très gros caractères : VOTATION CITOYENNE.
1 – votation, s’il a cours chez nos voisins helvètes, où il est parfaitement régulier, n’est pas reconnu en France, et dans ce pays ne peut être considéré que comme un barbarisme remplaçant à tort VOTE.
2 – citoyen est un substantif, et ne saurait être employé en fonction d’adjectif ; l’adjectif qui lui correspond est civique. Le dernier P.R. le reconnaît sans sourciller ; c’est pour moi une démagogie commerciale : il faut vendre, et pour cela ne pas fâcher l’acheteur, qui le trouve en bonne place dans un autre dictionnaire d’usage avec lequel les éditeurs ne veulent pas être en reste. L'intérêt mercantile passe avant celui de la langue.
L’Académie française ne reconnaît que la seule fonction de nom, c’est un argument qui me suffit. Ce néologisme est un doublet inutile, où l’on retrouve le même phénomène qu’avec résoudre/solutionner.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Je partage l'avis de Jacques en ce qui concerne "votation" qui, sous couvert de nouveauté, n'apporte rien au niveau de la signification.
Cependant, j'ai l'habitude d'entendre et j'apprécie une démarche citoyenne, par exemple l'inscription sur la liste électorale, même si effectivement, civique est préférable stricto sensu.
Cependant, j'ai l'habitude d'entendre et j'apprécie une démarche citoyenne, par exemple l'inscription sur la liste électorale, même si effectivement, civique est préférable stricto sensu.
- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Vous établissez donc une différence entre civique et citoyen, employé comme adjectif contre l'avis de l'Académie ? Laquelle ?
Le Robert définit :
– citoyen, adj. qui fait preuve d'esprit civique
– civique : relatif au citoyen – patriotique.
Le Petit Larousse indique à civique :
Propre au bon citoyen ; sens civique : dévouement envers la collectivité ou l'État.
Ce qui démontre que citoyen, utilisé comme adjectif, est bien un doublon inutile de civique.
Le Robert définit :
– citoyen, adj. qui fait preuve d'esprit civique
– civique : relatif au citoyen – patriotique.
Le Petit Larousse indique à civique :
Propre au bon citoyen ; sens civique : dévouement envers la collectivité ou l'État.
Ce qui démontre que citoyen, utilisé comme adjectif, est bien un doublon inutile de civique.
Dernière modification par Jacques le dim. 04 oct. 2009, 11:18, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Je me posais justement la même question. Je pense être influencé par l'actualité. Un certain nombre de nos compatriotes estiment que leur rôle de citoyen est la désobéissance civique envers certaines lois. (S'agirait-il de la désobéissance civile ?)
À ce niveau, le débat excède mes compétences : je ne fais qu'interpréter des informations (tout en respectant la neutralité qui sied à ce forum).
À ce niveau, le débat excède mes compétences : je ne fais qu'interpréter des informations (tout en respectant la neutralité qui sied à ce forum).
- Jacques
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Nous nous sommes croisés une nouvelle fois. Étant donné le sens favorable de l'adjectif civique, contrevenir à une loi ne peut pas être une désobéissance civique, et cela ressemble fort à une antinomie. Vous avez peut-être raison de proposer civile, que Larousse donne en première définition comme « Qui concerne les citoyens, leur collectivité ».
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Notre neutralité concerne tout ce qui est extérieur à la langue, et consiste à éviter des prises de position sur des opinions, idéologies ou faits de société. Quant au français, nous recherchons une vérité souvent incertaine, que nous ne sommes pas certains d'atteindre, que nous percevons différemment parfois, mais le langage ne relève pas d'une évidence scientifique.Gaétan Solo a écrit :Je me posais justement la même question. Je pense être influencé par l'actualité. Un certain nombre de nos compatriotes estiment que leur rôle de citoyen est la désobéissance civique envers certaines lois. (S'agirait-il de la désobéissance civile ?)
À ce niveau, le débat excède mes compétences : je ne fais qu'interpréter des informations (tout en respectant la neutralité qui sied à ce forum).
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Effectivement, quand on cherche désobéissance civique sur Google, on obtient aussi des résultats avec désobéissance civile.
À noter que José Bové a intitulé un de ses ouvrages :"Pour la désobéissance civique".
Cela m'a permis de découvrir un article "désobéissance civile ou civique" et un du Monde diplomatique Jusqu'où obéir à la loi ?
Votre question suscite de nombreux débats.
À noter que José Bové a intitulé un de ses ouvrages :"Pour la désobéissance civique".
Cela m'a permis de découvrir un article "désobéissance civile ou civique" et un du Monde diplomatique Jusqu'où obéir à la loi ?
Votre question suscite de nombreux débats.
- Jacques
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C'est l'un des intérêts du forum, sinon l'intérêt tout court : débattre et réfléchir, avec nos modestes compétences, sur les divers aspects du français. Et il est édifiant, instructif, de recueillir des avis différents, voire opposés.Gaétan Solo a écrit :
Votre question suscite de nombreux débats.
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- JR
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Re: Deux mots, deux fautes
Je comprends parfaitement vos réticences, sans les partager totalement.Jacques a écrit :Hier samedi 3 octobre, un référendum non officiel était organisé sur tout le territoire français par des organisations politiques et syndicales.
Sur le site Internet qui y était consacré, ainsi que sur les pancartes des stands de vote, on lisait en très gros caractères : VOTATION CITOYENNE.
1 – votation, s’il a cours chez nos voisins helvètes, où il est parfaitement régulier, n’est pas reconnu en France, et dans ce pays ne peut être considéré que comme un barbarisme remplaçant à tort VOTE.
2 – citoyen est un substantif, et ne saurait être employé en fonction d’adjectif ; l’adjectif qui lui correspond est civique. Le dernier P.R. le reconnaît sans sourciller ; c’est pour moi une démagogie commerciale : il faut vendre, et pour cela ne pas fâcher l’acheteur, qui le trouve en bonne place dans un autre dictionnaire d’usage avec lequel les éditeurs ne veulent pas être en reste. L'intérêt mercantile passe avant celui de la langue.
L’Académie française ne reconnaît que la seule fonction de nom, c’est un argument qui me suffit. Ce néologisme est un doublet inutile, où l’on retrouve le même phénomène qu’avec résoudre/solutionner.
Il faut comprendre qu'on n'est plus dans le domaine du langage ordinaire, mais dans celui du combat politique, où les barbarismes et néologismes sont des armes au service de qui a le talent et les moyens de les utiliser.
Certaines de ces expressions, inventées pour manipuler l'opinion ou pour désigner un concept original, passent dans le langage courant, et leur signification n'y est pas toujours conforme au souhait de leur auteur.
Ainsi, chaque nuance idéologique a un langage particulier qu'elle s'efforce de faire massivement adopter pour se créer un terrain favorable (et certaines entreprises commerciales agissent de même).
Au passage, je vous ferai remarquer que le terme "référendum", que vous reprenez à votre compte, est tout aussi peu adapté à ce genre de manifestation pétitionnaire.
L’ignorance est mère de tous les maux.
François Rabelais
François Rabelais
- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Votre analyse est séduisante, et fait ressortir la nécessité de frapper les esprits pour les manipuler afin d'en tirer des résultats prédéterminés. Et c'est particulièrement vrai, soit dans les sectes, soit en politique, soit dans le monde de l'industrie, du commerce et, partant, de la publicité, qui utilisent à fond ces armes. En résumé, dans tout ce qui vise à orienter les idées dans un sens précis. Effectivement, le recours à des barbarismes ou à des termes qui n'existent pas est de nature à capter l'attention.
J'ai employé le mot référendum parce que c'est celui qui figure sur l'imprimé que j'ai sous les yeux : Comité national contre la privatisation de la Poste, pour un débat public et un référendum sur le service public.
Je crois qu'il fallait répondre oui ou non à la question posée, et, selon les informations données, le résultat dudit « référendum », aussi désigné comme consultation nationale, servira à soutenir une action en haut lieu. Ce n'était donc pas une pétition.
J'ai employé le mot référendum parce que c'est celui qui figure sur l'imprimé que j'ai sous les yeux : Comité national contre la privatisation de la Poste, pour un débat public et un référendum sur le service public.
Je crois qu'il fallait répondre oui ou non à la question posée, et, selon les informations données, le résultat dudit « référendum », aussi désigné comme consultation nationale, servira à soutenir une action en haut lieu. Ce n'était donc pas une pétition.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques-André-Albert
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- Inscription : dim. 01 févr. 2009, 8:57
- Localisation : Niort
Le mot votation remonte à 1752 et se trouve même dans le Littré, comme vous le verrez si vous cliquez sur ‘votation’ en bleu. ![[clin d'oeil] ;)](./images/smilies/icon_wink.gif)
Il est également dans le dictionnaire de l’Académie (8ème édition) :
VOTATION. n. f. Action de voter. La votation n’a pas été libre. Un mode de votation.
On le trouve aussi dans le TLFi.![[sourire] :)](./images/smilies/icon_smile.gif)
![[clin d'oeil] ;)](./images/smilies/icon_wink.gif)
Il est également dans le dictionnaire de l’Académie (8ème édition) :
VOTATION. n. f. Action de voter. La votation n’a pas été libre. Un mode de votation.
On le trouve aussi dans le TLFi.
![[sourire] :)](./images/smilies/icon_smile.gif)
- Jacques
- Messages : 14475
- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Il est apparu pour la première fois en 1752, dans la quatrième édition : action de voter. Vote ne figure que dans la cinquième (1798) : suffrage exprimé.
Il n'y a donc pas de barbarisme, mais pour les Français un archaïsme totalement sorti de l'usage, en revanche toujours vivant en Suisse. L'emploi du mot oublié choque effectivement les oreilles et les yeux français, ce qui nous ramène à l'idée exprimée par JR d'attirer l'attention par un choix insolite et relevant d'une certaine provocation.
Il n'y a donc pas de barbarisme, mais pour les Français un archaïsme totalement sorti de l'usage, en revanche toujours vivant en Suisse. L'emploi du mot oublié choque effectivement les oreilles et les yeux français, ce qui nous ramène à l'idée exprimée par JR d'attirer l'attention par un choix insolite et relevant d'une certaine provocation.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).