Concordance des temps avec falloir
Concordance des temps avec falloir
Bonsoir,
Je corrige actuellement un texte, et j'ai un doute sur une phrase concernant la Première Guerre mondiale : "Encore a-t-il fallu que le soldat français tînt jusqu'à l'arrivée très tardive des troupes américaines."
Je pense qu'il faut remplacer "tînt" par "tienne". Mais je veux en être sûr. Qu'en pensez-vous ?
Merci et bonne soirée.
Je corrige actuellement un texte, et j'ai un doute sur une phrase concernant la Première Guerre mondiale : "Encore a-t-il fallu que le soldat français tînt jusqu'à l'arrivée très tardive des troupes américaines."
Je pense qu'il faut remplacer "tînt" par "tienne". Mais je veux en être sûr. Qu'en pensez-vous ?
Merci et bonne soirée.
Merci. Je serais enclin à utiliser tînt avec " encore eût-il fallu". Merci pour votre avis précieux. Je suis correcteur d'articles de presse spécialisée depuis un peu moins d'un an et, malgré mes modestes connaissances, je doute quelquefois car le français est très compliqué.
Merci encore et bonne soirée.
Merci encore et bonne soirée.
- Perkele
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N'hésitez pas à revenir nous voir !buno64 a écrit :Merci. Je serais enclin à utiliser tînt avec " encore eût-il fallu". Merci pour votre avis précieux. Je suis correcteur d'articles de presse spécialisée depuis un peu moins d'un an et, malgré mes modestes connaissances, je doute quelquefois car le français est très compliqué.
Merci encore et bonne soirée.
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Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
Selon les règles classiques de la concordance des temps, le subjonctif imparfait est bien de mise dans la subordonnée puisque la principale est à un temps du passé.
« Encore a-t-il fallu que le gouvernement provisoire existât, qu'il fût formé par l'autorité supérieure existante, par le Sénat: n'étant point formé par cette autorité, il aurait fallu qu'il le fût par la nation.»(L'Ambigu, 1814)
« encore a-t-il fallu que, près de 80 ans plus tard , Newton l'expliquât, la fît comprendre et lui donnât la vie. » (Michel Chasles, 1837)
« Il a fallu que je fusse chassé d’auprès de mademoiselle Cunégonde, que j’aie passé par les baguettes, et il faut que je demande mon pain, jusqu’à ce que je puisse en gagner ; tout cela ne pouvait être autrement » (Voltaire, Candide, chapitre 3)
« Pour franchir le seuil de celui-ci, il a fallu qu'il tînt joliment à me voir revenir. » (Pierre Benoît, Le puits de Jacob)
« Je n'étais pas bien dans ma chambre, me disait-elle ; je ne pouvais rien faire, il a fallu que je vinsse. » (Conversations de Goethe, traduction Délerot, 1863)
« Il a fallu que je tinsse à remplir la mission qui m'avait été imposée par la Société , pour que je me sois décidé à expérimenter ce traitement par la vaccination. » (Bulletin de la société de chirurgie de Paris, 1861)
« Il a fallu, à son tour, qu'il fût vaincu par le repos, par le bien-être, par le climat ; il a fallu qu'il vînt se perdre, lui aussi, dans cette masse compacte des populations asiatiques, molles,[...] (Syrie ancienne et moderne, 1848)
« J'ai eu toutes les peines du monde à la rassurer : il a fallu que je demandasse une audience à l'empereur & à l'impératrice ; que je fisse des sermens affreux pour calmer les têtes.» (Mémoires du Maréchal Duc de Richelieu, 1793)
Mais ces règles-là, non abrogées officiellement certes, l'usage les a un peu délaissées et le subjonctif est plus souvent présent qu'imparfait aujourd'hui, sauf dans des tournures comme "Encore eût-il fallu que le soldat français tînt jusqu'à l'arrivée très tardive des troupes américaines", ainsi que vous l'avez observé vous-même (mais le sens n'est plus le même).
Donc vous avez le choix de corriger ou non.
Cela dit, le temps à retenir dépend du reste de l'article : s'il est écrit dans un style très classique et un peu "à l'ancienne", alors le subjonctif imparfait serait avantageusement conservé. Si ce n'est pas le cas, ce subjonctif imparfait va paraître un peu ridicule dans ce contexte.
P-S. Il y a des choses amusantes sur le subjonctif dans "le bar du subjonctif".
« Encore a-t-il fallu que le gouvernement provisoire existât, qu'il fût formé par l'autorité supérieure existante, par le Sénat: n'étant point formé par cette autorité, il aurait fallu qu'il le fût par la nation.»(L'Ambigu, 1814)
« encore a-t-il fallu que, près de 80 ans plus tard , Newton l'expliquât, la fît comprendre et lui donnât la vie. » (Michel Chasles, 1837)
« Il a fallu que je fusse chassé d’auprès de mademoiselle Cunégonde, que j’aie passé par les baguettes, et il faut que je demande mon pain, jusqu’à ce que je puisse en gagner ; tout cela ne pouvait être autrement » (Voltaire, Candide, chapitre 3)
« Pour franchir le seuil de celui-ci, il a fallu qu'il tînt joliment à me voir revenir. » (Pierre Benoît, Le puits de Jacob)
« Je n'étais pas bien dans ma chambre, me disait-elle ; je ne pouvais rien faire, il a fallu que je vinsse. » (Conversations de Goethe, traduction Délerot, 1863)
« Il a fallu que je tinsse à remplir la mission qui m'avait été imposée par la Société , pour que je me sois décidé à expérimenter ce traitement par la vaccination. » (Bulletin de la société de chirurgie de Paris, 1861)
« Il a fallu, à son tour, qu'il fût vaincu par le repos, par le bien-être, par le climat ; il a fallu qu'il vînt se perdre, lui aussi, dans cette masse compacte des populations asiatiques, molles,[...] (Syrie ancienne et moderne, 1848)
« J'ai eu toutes les peines du monde à la rassurer : il a fallu que je demandasse une audience à l'empereur & à l'impératrice ; que je fisse des sermens affreux pour calmer les têtes.» (Mémoires du Maréchal Duc de Richelieu, 1793)
Mais ces règles-là, non abrogées officiellement certes, l'usage les a un peu délaissées et le subjonctif est plus souvent présent qu'imparfait aujourd'hui, sauf dans des tournures comme "Encore eût-il fallu que le soldat français tînt jusqu'à l'arrivée très tardive des troupes américaines", ainsi que vous l'avez observé vous-même (mais le sens n'est plus le même).
Donc vous avez le choix de corriger ou non.
Cela dit, le temps à retenir dépend du reste de l'article : s'il est écrit dans un style très classique et un peu "à l'ancienne", alors le subjonctif imparfait serait avantageusement conservé. Si ce n'est pas le cas, ce subjonctif imparfait va paraître un peu ridicule dans ce contexte.
P-S. Il y a des choses amusantes sur le subjonctif dans "le bar du subjonctif".
- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Je ne comprends pas. Perkele nous fournissait le lien. Une fois arrivé là, il suffisait de cliquer sur accueil pour avoir la page de présentation avec le sommaire.
Dernière modification par Jacques le mar. 21 déc. 2010, 8:18, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques
- Messages : 14475
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Les références données par embaterienne datent toutes du XIXe siècle. À l'époque l'imparfait et le plus-que-parfait du subjonctif, ainsi que le conditionnel passé 2e forme, étaient encore d'usage courant. Au XXIe siècle ce sont quasiment des pièces de musée. La réponse donnée à Buno64 est adaptée en fonction de l'usage actuel. Les linguistes s'accordent à constater que ces temps sont tombés en désuétude, sauf en grande littérature. La guerre de 14-18, c'était au XXe, et ces temps n'étaient plus de mode, si je puis dire sans jeu de mots.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Nous sommes bien d'accord : il est incontestable que le subjonctif imparfait n'est plus de mode, en dehors de certaines circonstances.
J'ai donné des citations du XIXe siècle (sauf celle de Pierre Benoît qui était déjà du XXe, 1925) pour montrer que ce temps était bien vivace à cette époque où l'on mettait un certain soin dans l'écriture. Mais si l'imparfait du subjonctif se raréfie au XXe siècle, il n'a quand même pas disparu complètement :
Pour qu'il fût assez aveugle, pour qu'il le fût assez il a fallu qu'il jetât sur ses yeux le voile de ses larmes, puis celui du vertige, puis celui de son sang.(Vladimir Ghika, Entretiens spirituels, 1961)
Est-ce qu'un relecteur doit pour autant considérer un imparfait du subjonctif aujourd'hui comme une faute et le remplacer ? C'est un pas qui doit se décider en tenant compte du contexte. Peut-être l'auteur a-t-il le désir d'être un tantinet précieux ?
J'ai donné des citations du XIXe siècle (sauf celle de Pierre Benoît qui était déjà du XXe, 1925) pour montrer que ce temps était bien vivace à cette époque où l'on mettait un certain soin dans l'écriture. Mais si l'imparfait du subjonctif se raréfie au XXe siècle, il n'a quand même pas disparu complètement :
Pour qu'il fût assez aveugle, pour qu'il le fût assez il a fallu qu'il jetât sur ses yeux le voile de ses larmes, puis celui du vertige, puis celui de son sang.(Vladimir Ghika, Entretiens spirituels, 1961)
Est-ce qu'un relecteur doit pour autant considérer un imparfait du subjonctif aujourd'hui comme une faute et le remplacer ? C'est un pas qui doit se décider en tenant compte du contexte. Peut-être l'auteur a-t-il le désir d'être un tantinet précieux ?