Indicatif ou subjonctif?
- Klausinski
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C’est une chose vraie et très bien dite, JAA.
Je vous préviens donc que c’est sans le moindre sentiment hostile mais, au contraire, dans le but de me faire une opinion plus assurée sur la question que je me suis mis tout à l’heure en quête de contre-exemples. Et, le parierez-vous ? j’en ai trouvés !
Il n'y a pas que les femmes pour qui la vieillesse est l'enfer. (Léautaud)
Je trouverais cela juste, dit Henry, mais il n'ya pas que le Roi qui est sous l'eau, le pays l'est aussi. (Elsa Triolet)
Ah! il n'y a pas que les morts qui s'en vont, c'est effrayant le nombre- des vivants qui s'éloignent, disparaissent… (Zola)
Proust semble hésiter entre les deux :
l n'y a pas que Baudelaire et Mérimée qui ont le droit de se mépriser réciproquement […]
« Il n'y a pas que M. Vinteuil qui ait des voisins aimables », s'écria ma tante Céline d'une voix que la timidité rendait forte […]
Je vous préviens donc que c’est sans le moindre sentiment hostile mais, au contraire, dans le but de me faire une opinion plus assurée sur la question que je me suis mis tout à l’heure en quête de contre-exemples. Et, le parierez-vous ? j’en ai trouvés !
Il n'y a pas que les femmes pour qui la vieillesse est l'enfer. (Léautaud)
Je trouverais cela juste, dit Henry, mais il n'ya pas que le Roi qui est sous l'eau, le pays l'est aussi. (Elsa Triolet)
Ah! il n'y a pas que les morts qui s'en vont, c'est effrayant le nombre- des vivants qui s'éloignent, disparaissent… (Zola)
Proust semble hésiter entre les deux :
l n'y a pas que Baudelaire et Mérimée qui ont le droit de se mépriser réciproquement […]
« Il n'y a pas que M. Vinteuil qui ait des voisins aimables », s'écria ma tante Céline d'une voix que la timidité rendait forte […]
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
- Klausinski
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Oui ! :DJacques a écrit :Vous avez mis Sade dans vos citations. En faisant abstraction des idées, j'aimais l'élégance de son style. Le divin marquis s'exprimait dans un français de belle qualité. On finit même par oublier le fond si l'on s'attache à la forme.
Tout ne tourne pas d’ailleurs autour de la torture et des rapports sexuels, il y a des passages admirables, tout à fait dans le goût des moralistes classiques :
Le marquis de Sade a écrit :Il y a une sorte de plaisir pour l’orgueil, à se moquer des défauts qu’on n’a point, et ces jouissances-là sont si douces à l’homme et particulièrement aux imbéciles, qu’il est très rare de les y voir renoncer... Ça établit des méchancetés d’ailleurs, de froids bons mots, de plats calembours, et pour la société, c’est-à-dire pour une collection d’êtres que l’ennui rassemble et que la stupidité modifie, il est si doux de parler deux ou trois heures sans avoir rien dit, si délicieux de briller aux dépens des autres et d’annoncer en blâmant un vice qu’on est bien éloigné de l’avoir... c’est une espèce d’éloge qu’on prononce tacitement sur soi-même; à ce prix-là on consent même à s’unir aux autres, à faire cabale pour écraser l’individu dont le grand tort est de ne pas penser comme le commun des mortels, et l’on se retire chez soi tout gonflé de l’esprit qu’on a eu, quand on n’a foncièrement prouvé par une telle conduite que du pédantisme et de la bêtise.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
- Jacques-André-Albert
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- Jacques
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Sade était un personnage complexe. Quand on évoque son nom on pense à Justine, Juliette, aux Cent vingt journées de Sodome, à la Philosophie dans le boudoir (si je ne me trompe, ce dernier faisait partie des œuvres maudites). Il y avait dans Aline et Valcour l'expression des sentiments les plus délicats, dans Historiettes, contes et fabliaux des récits plaisants.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Klausinski
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Les cent vingt journées de Sodome sont, à dessein, le comble du monstrueux. La Philosophie dans le boudoir n’est pas non plus de nature à exciter chez l’homme les sentiments de la vertu et de la tendresse filiale. J’ai commencé par lire Les Historiettes, et je n’ai, en effet, pas trouvé cela bien méchant. Quoique ces récits puissent probablement en effaroucher quelques-uns, il y a des choses bien drôles qui rappellent les nouvelles grivoises du XVIe siècle (il y en a de très crues) et les contes de La Fontaine.
On dirait bien que c’est cela. On le sent à la lecture des phrases. Si l’on compare vos exemples et les miens, il semble qu’il y a plus de vérités générales du côté des vôtres, qu’il y a plus de réflexions sur des choses abstraites dont on peut modérer le caractère péremptoire par l’emploi du subjonctif. Dans mes exemples, au moins dans l’un d’eux, le fait est avéré : le roi est bel et bien sous l’eau.Jacques-André-Albert a écrit :Il me semble qu'il faut garder à l'esprit que l'indicatif est le mode de ce qui est établi, constatable, et le subjonctif celui de l'expression d'une opinion. On peut essayer de lire ces phrases avec ces deux visions.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
Pardonnez-moi d'insister, je ne voudrais pas relancer inutilement des échanges que j'ai trouvés très clairs et instructifs, mais Klausinski, ci-dessus, ne fallait-il pas écrire "il semble qu'il y ait" ?il semble qu’il y a plus de vérités générales du côté des vôtres, qu’il y a plus de réflexions sur des choses abstraites dont on peut modérer le caractère péremptoire par l’emploi du subjonctif
Et finalement, ai-je bien compris si je résume ainsi :
1. La forme grammaticale correcte qui s'applique dans le cas de "il n'y a que" est le subjonctif ;
2. Toutefois, on constate que l'indicatif est le plus souvent utilisé à l'oral et, malheureusement, très répandu à l'écrit ;
3. En outre, l'indicatif peut être toléré lorsqu'il s'agit d'énoncer un constat ou d'évoquer une réalité établie, tandis que le subjonctif s'impose dès que l'on est dans le domaine de l'opinion, de l'avis, de l'intention ou de l'hypothèse.
- Klausinski
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Cet éclaircissement n’est pas inutile. L’indicatif n’est fautif ni selon le TLFi :groseille a écrit :Pardonnez-moi d'insister, je ne voudrais pas relancer inutilement des échanges que j'ai trouvés très clairs et instructifs, mais Klausinski, ci-dessus, ne fallait-il pas écrire "il semble qu'il y ait" ?il semble qu’il y a plus de vérités générales du côté des vôtres, qu’il y a plus de réflexions sur des choses abstraites dont on peut modérer le caractère péremptoire par l’emploi du subjonctif
Il semble (à qqn) que + verbe conjugué
[Verbe impers. à l'affirm.: empl. des modes selon la nuance envisagée]
ni selon Grevisse :
Quand sembler pris affirmativement est accompagné d’un objet indirect, on met le plus souvent l’indicatif.
(…)
Si ce verbe pris affirmativement n’est pas accompagné d’un objet indirect, on met l’indicatif ou le subjonctif.
Cela dit, mes messages doivent contenir une foule de fautes. Ce ne sont pas des modèles de bon usage.
Cela résume bien nos échanges.Groseille a écrit :Et finalement, ai-je bien compris si je résume ainsi :
1. La forme grammaticale correcte qui s'applique dans le cas de "il n'y a que" est le subjonctif ;
2. Toutefois, on constate que l'indicatif est le plus souvent utilisé à l'oral et, malheureusement, très répandu à l'écrit ;
3. En outre, l'indicatif peut être toléré lorsqu'il s'agit d'énoncer un constat ou d'évoquer une réalité établie, tandis que le subjonctif s'impose dès que l'on est dans le domaine de l'opinion, de l'avis, de l'intention ou de l'hypothèse.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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- Jacques-André-Albert
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- Jacques-André-Albert
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J'ai entendu aujourd'hui un journaliste renommé, écrivain de surcroît, dire « vous défenderiez ». Sans commentaire...Klausinski a écrit :Que diable ! Nous ne sommes pas des machines. Il y a peu, je regardais une vidéo dans laquelle s’exprimait feu Maître Capello. En moins de trois minutes, alors qu’il pointait du doigt quelques « fautes impardonnables », il en a lui-même commis une belle, en employant le terme « évident » dans le sens de « facile ». Une autre fois, j’ai entendu Jean d’Ormesson dire que telle personne avait placé « la barre très haute ». On pourrait citer mille exemples et nous en reviendrons à la même conclusion : celui qui se prétend infaillible est un idiot.
- Madame de Sévigné
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- Klausinski
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Claude a bien répondu. Ce qui est plus embêtant avec l’expression « mettre la barre haut », c’est que si l’on emploie l’adjectif, la phrase devient équivoque. On ne comprend plus forcément : « mettre la barre en hauteur », mais on pourrait comprendre : « mettre la barre qui est haute ».Madame de Sévigné a écrit :Doit-on dire à une femme : Tiens-toi droit ou tiens-toi droite ?Klausinski a écrit :Une autre fois, j’ai entendu Jean d’Ormesson dire que telle personne avait placé « la barre très haute »
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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