En feuilletant les livres d'école de mon fils, j'ai trouvé une remarque qui m'a frappée dans le Bescherelle (la Conjugaison pour tous) :
Bizarrement, plus d'un exige l'accord au singulier et moins de deux le pluriel : Plus d'un est venu, moins de deux sont repartis.
L'auteur a raison de dire bizarrement. Je n'ai jamais eu de doute à propos de ces accords, mais c'est tout de même amusant : s'il y a plus d'une personne, c'est qu'il y en a au moins deux (accord au singulier) et s'il y en a moins de deux, c'est qu'il n'y en a qu'une ou aucune (accord au pluriel).
Singulière logique que celle de la langue française ! Les non francophones doivent apprécier !
L'erreur ne devient pas vérité parce qu'elle se propage et se multiplie ; la vérité ne devient pas erreur parce que nul ne la voit.
Gandhi, La Jeune Inde
Vous faites remonter quelque chose à la surface de ma mémoire : j'ai été frappé aussi par cette bizarrerie. En somme, l'accord se fait sur un et deux. Les adverbes moins et plus ne paraissent pas pouvoir s'y prêter.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
On peut ajouter que l'expression « moins de deux » n'est jamais utilisée dans ce cas, parce que, comme le dit très bien manni-gedeon, il n'y a dans ce cas qu'une personne ou aucune ; on dira donc plutôt « il n'y avait personne » ou « une seule personne s'est déplacée ».
Le seul cas où, familièrement on utilise « moins de deux », c'est quand on veut exprimer la rapidité d'un événement ou d'une action : « en moins de deux ».
Desiderius a écrit :On pourrait dire : moins de deux minutes ont suffi pour que la maison brûle entièrement.
Je pense de même : on peut dire moins de deux dans tous les cas où on peut envisager un chiffre qui n'est pas entier et se subdivise en fractions de nombre.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Jacques-André-Albert a écrit :Oui, bien sûr, mais l'exemple du Bescherelle est plus inusité : « moins de deux sont repartis ».
C'est effectivement bizarre, car quand il s'agit d'êtres vivants, par définition non divisibles, moins de deux équivaut forcément à un. Cette formulation est à rapprocher d'une habitude malheureusement fort courante, qui consiste à parler de trois à quatre personnes par exemple, et de ce qu'on peut lire sur toutes les notices de médicaments : « un comprimé deux à trois fois par jour ». Je n'ai pas encore trouvé comment on peut prendre le comprimé deux fois et demie dans la journée.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Desiderius a écrit :On pourrait dire : moins de deux minutes ont suffi pour que la maison brûle entièrement.
Dans cet exemple le temps mis se situe obligatoirement entre une et deux minutes mais plus proche de deux, n'est-ce pas ?
Et si on est plus précis, on dira par exemple : une minute et cinquante deux secondes ont suffi pour que la maison brûle entièrement. La marque du pluriel est logique puisqu'il y a deux éléments, la minute et les secondes.
Desiderius a écrit :Les comprimés sont souvent sécables à cet effet !
Cela ne résout pas le problème.
Prendre 1 comprimé 2 à 3 fois par jour signifie qu'on doit prendre soit 2 comprimés par jour, soit 3 comprimés par jour.
Prendre 1 comprimé 2 fois et demie par jour ne se résout pas en prenant un demi comprimé la 3e fois. Un demi comprimé n'équivaut pas à une demi fois
Mais c'était peut-être une boutade ? :D
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
Cette absence de logique me fait penser à l'incompréhension que j'avais rencontrée, un jour, sur un forum, quand j'avais souligné le manque de cohérence des expressions « entrée de gamme (ou bas de gamme) - moyenne gamme - haut de gamme » ; personne ne saisissait que c'est « milieu de gamme » qui convient.
Desiderius a écrit :On pourrait dire : moins de deux minutes ont suffi pour que la maison brûle entièrement.
Dans cet exemple le temps mis se situe obligatoirement entre une et deux minutes mais plus proche de deux, n'est-ce pas ?
Et si on est plus précis, on dira par exemple : une minute et cinquante deux secondes ont suffi pour que la maison brûle entièrement. La marque du pluriel est logique puisqu'il y a deux éléments, la minute et les secondes.
C'est une logique astucieuse voire artificieuse ! Elle s'applique en la circonstance précise, mais pas avec "plus d'un". Plus d'un jour fut nécessaire pour éteindre l'incendie. Ça a beau faire un jour et des heures et des minutes et des secondes, le singulier s'impose !
Non, la raison de cet accord étrange est simplement l'attraction subie par "un" et "deux".
C'est le charme et la difficulté du français ! Et puis, parfois, il est bon de se rappeler que la grammaire et la logique sont deux choses bien différentes, même s'il n'est pas exclu de vouloir chercher quelque logique dans les règles de grammaire. Le français n'est pas une science exacte pour autant !