Et que dites-vous, JAA, de : « J'espère qu'il travaille », « J'espère qu'il est dans les coulisses » ? Pour le coup, Littré dit que le verbe « présente l'idée d'une chose douteuse ».
Que dites-vous aussi de : « Je regrette qu'il n'ait pas été reçu », etc. ? Ici, la chose ne fait aucun doute. On peut raffiner à loisir, sophistiquer en diable, trouver des justifications toujours plus subtiles, mais il me semble bien que c'est de l'après-coup. Si ça ne marche pas quand on considère le verbe sous un certain angle, alors on dit qu'il faut le considérer sous tel autre angle, sous tel autre rapport, sur tel autre plan, et la logique que l'on croit retrouver n'a en tout cas rien de naturel ni rien d'instinctif.
Et si les lexicographes se trompaient ?
- Klausinski
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- Jacques-André-Albert
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Ce que j'en dis, c'est que je n'étais pas dans la peau de nos ancêtres quand ils ont senti le besoin d'employer l'indicatif ou le subjonctif, selon les cas.
L'interprétation de Littré ne correspond pas forcément à la perception qu'on avait du verbe espérer dans les siècles précédents.
Je rappelle que ce verbe tenait une place de premier choix dans le vocabulaire religieux, où le doute n'avait pas sa place. En ancien français, le premier sens d'espérer était « être dans l'attente ». Le dictionnaire de l'Académie, dans sa quatrième édition, nous donne la définition suivante : « Attendre un bien qu'on désire, & que l'on croit qui arrivera. »
Le doute a pu s'associer postérieurement à l'espoir par glissement de sens. Tout lecteur de textes anciens sait qu'il faut recentrer beaucoup de mots dans l'acception de l'époque pour bien les interpréter.
Dans le cas de regretter, souhaiter, vouloir, exiger, ordonner, le subjonctif s'imposerait comme l'expression d'un sentiment personnel, qu'il y ait ou non un doute ; c'est ce qui explique qu'on l'utilise pour un fait passé ou à venir :
- je regrette qu'il n'ait pas été reçu
- j'exige qu'on me rende mon bien.
Ce n'est pas une loi, c'est la constatation d'un usage et une tentative d'explication.
L'interprétation de Littré ne correspond pas forcément à la perception qu'on avait du verbe espérer dans les siècles précédents.
Je rappelle que ce verbe tenait une place de premier choix dans le vocabulaire religieux, où le doute n'avait pas sa place. En ancien français, le premier sens d'espérer était « être dans l'attente ». Le dictionnaire de l'Académie, dans sa quatrième édition, nous donne la définition suivante : « Attendre un bien qu'on désire, & que l'on croit qui arrivera. »
Le doute a pu s'associer postérieurement à l'espoir par glissement de sens. Tout lecteur de textes anciens sait qu'il faut recentrer beaucoup de mots dans l'acception de l'époque pour bien les interpréter.
Dans le cas de regretter, souhaiter, vouloir, exiger, ordonner, le subjonctif s'imposerait comme l'expression d'un sentiment personnel, qu'il y ait ou non un doute ; c'est ce qui explique qu'on l'utilise pour un fait passé ou à venir :
- je regrette qu'il n'ait pas été reçu
- j'exige qu'on me rende mon bien.
Ce n'est pas une loi, c'est la constatation d'un usage et une tentative d'explication.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
(Montaigne - Essais, I, 24)
- Klausinski
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La chose a peut-être été envisagée sous cet angle à une époque donnée. Il est possible qu'on ait ressenti que le verbe « espérer » excluait tout doute et qu'on ait donc préféré employer l'indicatif à sa suite. Les grammairiens du XVIIe siècle ont dû traiter ces questions. Il faudra que je me renseigne. Cependant, il est très probable que les essais de rationalisation aient laissé passer des incohérences même à cette époque et, aujourd'hui, dire que le subjonctif est le mode de l'incertitude ne convient plus à notre usage de la langue.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
Exactement. Un exemple flagrant est représenté par le fait que, qui « peut être suivi de l’indicatif ou du subjonctif, sans qu’il soit toujours possible de voir une nuance. » (Grevisse, Le bon usage, 14e, §1126 f, 2°) Dans une phrase telle queKlausinski a écrit :…aujourd'hui, dire que le subjonctif est le mode de l'incertitude ne convient plus à notre usage de la langue.
(1) Le fait que vous soyez là est une preuve de votre intérêt
il n’y a pas la moindre incertitude ou marque de subjectivité. De même, dans
(2) Qu’il soit homme, cela va de soi. (Beauvoir, cité dans Grevisse)
La dislocation à gauche favorise le subjonctif, qui disparaît si l’on formule la phrase en inversant l’ordre des propositions :
(3) Il va de soi qu’il est homme.
Et il y a sans doute d’autres cas où le subjonctif n’a rien à voir avec l’expression du doute, de la volonté, du sentiment, etc.
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A contrario l'absence d'incertitude ne justifierait plus l'emploi obligé de l'indicatif après "après que" ?
L'affaire vaut d'être examinée puisque les journalistes semblent avoir assimilé l'indicatif dans ce cas.
L'affaire vaut d'être examinée puisque les journalistes semblent avoir assimilé l'indicatif dans ce cas.
Dernière modification par jarnicoton le dim. 18 nov. 2012, 18:00, modifié 1 fois.
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