Non, petite effrontée !Anne a écrit :On ne peut donc pas disputer de ce rouge tape-à-l'œil ?Perkele a écrit :Je propose que nous nous penchions sur la formule "des goûts et des couleurs il ne faut disputer"
Verbiage, vous avez dit verbiage ?
- Jacques-André-Albert
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- Localisation : Niort
Le respect des valeurs d'autrui, appliqué de façon excessive, peut aboutir à la production de discours complètement aseptisés, puisque face à la diversité des opinions et des goûts, il vaudra mieux ne rien exprimer plutôt que de risquer de vexer tel ou tel. De l'agressivité des idées exprimées sans retenue on passe à la tyrannie de la bien-pensance. C'est tout à fait dans l'air du temps.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
(Montaigne - Essais, I, 24)
Pour moi, le respect et la tolérance ne peuvent jamais être appliqués de façon excessive...Jacques-André-Albert a écrit :Le respect des valeurs d'autrui, appliqué de façon excessive...
Ce sont des idéaux vers lesquels on tend, sans jamais les atteindre. Il ne saurait donc y avoir d'excès dans cette propension, toujours imparfaite, au respect et à la tolérance.
Ce que vous décrivez là est un discours d'eau tiède qui n'a rien à voir, selon moi, avec le respect.
Par exemple, nous sommes loin d'être toujours d'accord, vous et moi, et nous pouvons contre-argumenter de manière assez directe, sans hypocrisie, mais cela ne m'empêche pas de vous respecter, non seulement pour votre grande et précieuse érudition, mais aussi pour la solidité de vos positions, fussent-elles différentes des miennes.
Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet (Courteline)
"""Pour moi, le respect et la tolérance ne peuvent jamais être appliqués de façon excessive... """
Je crois bien que si, malheureusement... Lorsque l'on pousse trop loin la tolérance, sous prétexte de respect pour tout, l'on va quelquefois dans une mauvaise direction.
Bien que nouveau sur le site, j'ai conscience d'être un invité et ne voudrais pas être impudent, mais je tiens à dire que je ne suis pas choqué par les propos de Jacques; j'ai le sentiment désagréable que certains lui font un vilain procès d'intention.
Je ne m'attendais pas à rencontrer ce genre d'échanges sur ce site où il y a tant de choses éminemment intéressantes...
Cordialement à tous.
Je crois bien que si, malheureusement... Lorsque l'on pousse trop loin la tolérance, sous prétexte de respect pour tout, l'on va quelquefois dans une mauvaise direction.
Bien que nouveau sur le site, j'ai conscience d'être un invité et ne voudrais pas être impudent, mais je tiens à dire que je ne suis pas choqué par les propos de Jacques; j'ai le sentiment désagréable que certains lui font un vilain procès d'intention.
Je ne m'attendais pas à rencontrer ce genre d'échanges sur ce site où il y a tant de choses éminemment intéressantes...
Cordialement à tous.
- Klausinski
- Messages : 1295
- Inscription : mar. 12 déc. 2006, 23:54
- Localisation : Aude
Reprenons ce fil dans la sérénité !
JAA, Chabert, j'avais envie, hier, de parler de la tolérance.
Je crois comprendre votre point de vue. Claudel a exprimé cela fortement : « La tolérance, il y a des maisons pour ça. » Aujourd'hui, un certain nombre d'écrivains, parfois d'un grand talent, nous expliquent que la démocratie est devenue une hyperdémocratie, que la liberté est devenue permissivité, que l'égalité s'est muée en égalitarisme et que la tolérance est maintenant un prétexte pour tout accepter ; ils nous montrent que cette mise à bas des hiérarchies, cette absence de retenue, cette expression éhontée de soi, cette volonté de mettre tout le monde au même niveau réduit à néant les notions de politesse, de culture et de civilisation. Je résume, car la pensée qu'ils développent est extrêmement intéressante.
Cependant, je ne crois pas que Cyrano voie la tolérance sous cet angle. Si l'on admet qu'il s'agit d'une vertu, elle ne peut pas être excessive et ne sera donc jamais une acceptation, une justification de tous les comportements. Si elle devient cela, elle perd son nom ; on peut alors l'appeler lâcheté, soumission ou hypocrisie suivant les cas. Je voudrais vous donner en exemple les dialogues de Platon : Socrate remet en question des principes fondamentaux pour ses interlocuteurs ; pourtant, il le fait toujours sans violence et en tâchant de voir les choses à travers leurs yeux, en cherchant à comprendre leur démarche. Pour moi, c'est cela que doit être la tolérance, quand elle porte bien son nom. Elle ne justifie pas, n'accepte pas, n'excuse pas ; elle cherche à comprendre l'autre et ne veut pas le brusquer. Bien sûr, dans certaines occurrences, il peut être utile de parler fort pour sortir quelqu'un de sa torpeur, mais c'est lors d'un second mouvement, quand la tolérance a montré ses limites.
Si un modérateur estime que je m'écarte trop du sujet principal de ce forum, la langue française, je supprimerai ce message sans faire de difficultés.
JAA, Chabert, j'avais envie, hier, de parler de la tolérance.
Je crois comprendre votre point de vue. Claudel a exprimé cela fortement : « La tolérance, il y a des maisons pour ça. » Aujourd'hui, un certain nombre d'écrivains, parfois d'un grand talent, nous expliquent que la démocratie est devenue une hyperdémocratie, que la liberté est devenue permissivité, que l'égalité s'est muée en égalitarisme et que la tolérance est maintenant un prétexte pour tout accepter ; ils nous montrent que cette mise à bas des hiérarchies, cette absence de retenue, cette expression éhontée de soi, cette volonté de mettre tout le monde au même niveau réduit à néant les notions de politesse, de culture et de civilisation. Je résume, car la pensée qu'ils développent est extrêmement intéressante.
Cependant, je ne crois pas que Cyrano voie la tolérance sous cet angle. Si l'on admet qu'il s'agit d'une vertu, elle ne peut pas être excessive et ne sera donc jamais une acceptation, une justification de tous les comportements. Si elle devient cela, elle perd son nom ; on peut alors l'appeler lâcheté, soumission ou hypocrisie suivant les cas. Je voudrais vous donner en exemple les dialogues de Platon : Socrate remet en question des principes fondamentaux pour ses interlocuteurs ; pourtant, il le fait toujours sans violence et en tâchant de voir les choses à travers leurs yeux, en cherchant à comprendre leur démarche. Pour moi, c'est cela que doit être la tolérance, quand elle porte bien son nom. Elle ne justifie pas, n'accepte pas, n'excuse pas ; elle cherche à comprendre l'autre et ne veut pas le brusquer. Bien sûr, dans certaines occurrences, il peut être utile de parler fort pour sortir quelqu'un de sa torpeur, mais c'est lors d'un second mouvement, quand la tolérance a montré ses limites.
Si un modérateur estime que je m'écarte trop du sujet principal de ce forum, la langue française, je supprimerai ce message sans faire de difficultés.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
- Claude
- Messages : 9173
- Inscription : sam. 24 sept. 2005, 8:38
- Localisation : Décédé le 24 août 2022. Humour et diplomatie. Il était notre archiviste en chef.
Ce serait dommage de le supprimer ; JAA et Chabert sont invités à se manifester puis nous passerons à autre chose (tiens, je me prends pour l'animateur d'une émissionKlausinski a écrit :[...] Si un modérateur estime que je m'écarte trop du sujet principal de ce forum, la langue française, je supprimerai ce message sans faire de difficultés.
![[clin d'oeil] :wink:](./images/smilies/icon_wink.gif)
Je trouve la discussion intéressante et beaucoup d'arguments échangés ici me font réfléchir, c'est pourquoi je me permets de la prolonger.
Réflexion faite, je vois sans doute mieux où vous voulez en venir en parlant de tolérance ou de respect excessifs: faut-il tolérer les extrémismes, les intégrismes, les totalitarismes, les perversions morales? Faut-il tolérer l'intolérance, en somme?
Je suis d'accord avec vous pour penser que notre tolérance doit s'arrêter aux limites de l'espace démocratique et des principes des droits de l'homme qui caractérisent nos sociétés dites modernes ou avancées. L'Histoire nous a montré qu'il ne servait à rien, et qu'il était même dangereux, d'être trop tolérant avec ceux qui sortent délibérément de ce cadre-là. C'est une précision que j'aurais dû apporter.
Mais à l'intérieur de cet espace qui est tout de même très vaste - par exemple sur les "goûts et les couleurs" en matière d'art, ce qui a été le point de départ de ce fil - je maintiens ma position: il s'agit d'un idéal que nous devons poursuivre sans relâche et sans limites. Il n'est pas correct de se fonder sur l'argument précédent pour parler aussi d'un "respect excessif" dans des situations courantes de la vie quotidienne, où notre tolérance trouve beaucoup plus souvent à s'exercer vis-à-vis d'un beau-frère admirateur de Mylène Farmer, de la famille musulmane d'en face ou d'un collègue homosexuel que du dictateur syrien.
Réflexion faite, je vois sans doute mieux où vous voulez en venir en parlant de tolérance ou de respect excessifs: faut-il tolérer les extrémismes, les intégrismes, les totalitarismes, les perversions morales? Faut-il tolérer l'intolérance, en somme?
Je suis d'accord avec vous pour penser que notre tolérance doit s'arrêter aux limites de l'espace démocratique et des principes des droits de l'homme qui caractérisent nos sociétés dites modernes ou avancées. L'Histoire nous a montré qu'il ne servait à rien, et qu'il était même dangereux, d'être trop tolérant avec ceux qui sortent délibérément de ce cadre-là. C'est une précision que j'aurais dû apporter.
Mais à l'intérieur de cet espace qui est tout de même très vaste - par exemple sur les "goûts et les couleurs" en matière d'art, ce qui a été le point de départ de ce fil - je maintiens ma position: il s'agit d'un idéal que nous devons poursuivre sans relâche et sans limites. Il n'est pas correct de se fonder sur l'argument précédent pour parler aussi d'un "respect excessif" dans des situations courantes de la vie quotidienne, où notre tolérance trouve beaucoup plus souvent à s'exercer vis-à-vis d'un beau-frère admirateur de Mylène Farmer, de la famille musulmane d'en face ou d'un collègue homosexuel que du dictateur syrien.
Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet (Courteline)
Pour ce qui est de l'art en général, je crois qu'il faut partir du principe que "tous les goûts sont dans la nature", et s'en tenir à ça.
Je suis d'accord avec Anne sur le fait que ce forum doit rester totalement apolitique, mais il est évident que le thème de la tolérance (artistique au départ) ne pouvait que glisser sur ce terrain en raison du contexte actuel.
Je crois par ailleurs que la réflexion d'Anne s'applique aussi à tout ce qui touche aux croyances religieuses.
Bon dimanche à tous.
Je suis d'accord avec Anne sur le fait que ce forum doit rester totalement apolitique, mais il est évident que le thème de la tolérance (artistique au départ) ne pouvait que glisser sur ce terrain en raison du contexte actuel.
Je crois par ailleurs que la réflexion d'Anne s'applique aussi à tout ce qui touche aux croyances religieuses.
Bon dimanche à tous.
- Jacques-André-Albert
- Messages : 4645
- Inscription : dim. 01 févr. 2009, 8:57
- Localisation : Niort
Il y a, de toute évidence, une méconnaissance du mot « tolérance ».
L'Académie le définit ainsi :
C'est donc un mot qui est détourné de son sens. À l'époque de Bossuet la tolérance était considérée comme une faute.
La vertu que vous appelez de vos vœux, cyrano et Klausinski, pourrait être désignée sous les mots de « respect de l'autre », sans oublier que cette notion, si elle s'accompagne de naïveté, peut déboucher sur la soumission à l'autre.
J'ajoute que l'utopie est l'âme de l'idéologie, qu'elle mène à l'aveuglement et à la négation de tout ce qu'elle ne comprend pas (au sens d'inclure). La vie dans la société humaine demande plus de pragmatisme.
L'Académie le définit ainsi :
Le TLFI va dans le même sens :Condescendance, indulgence, action de supporter ce qu'on ne peut empêcher ou qu'on croit ne devoir pas empêcher.
On voit que ce que certains érigent en vertu est très proche de la faiblesse, de la permissivité, et introduit, en outre, un rapport d'inégalité entre celui qui tolère et celui que l'on tolère.Fait de tolérer quelque chose, d'admettre avec une certaine passivité, avec condescendance parfois, ce que l'on aurait le pouvoir d'interdire, le droit d'empêcher.
C'est donc un mot qui est détourné de son sens. À l'époque de Bossuet la tolérance était considérée comme une faute.
La vertu que vous appelez de vos vœux, cyrano et Klausinski, pourrait être désignée sous les mots de « respect de l'autre », sans oublier que cette notion, si elle s'accompagne de naïveté, peut déboucher sur la soumission à l'autre.
J'ajoute que l'utopie est l'âme de l'idéologie, qu'elle mène à l'aveuglement et à la négation de tout ce qu'elle ne comprend pas (au sens d'inclure). La vie dans la société humaine demande plus de pragmatisme.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
(Montaigne - Essais, I, 24)