Plaît-il ?
- Islwyn
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Plaît-il ?
On m'a vite fait savoir, lors de mon premier séjour en France (années soixante), que le « plaît-il ? » que je marmonnais à tout bout de champ, et que m'avait enseigné un manuel scolaire du début du siècle (vers 1910 !) ne se disait plus. Ces solécismes, source d'un embarras passager, se perdent vite.
- Jacques
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Ce n'est pas un solécisme, celui-ci étant un vice de construction. Si une personne dit je m'en rappelle au lieu de je me le rappelle, c'est un solécisme. Ou encore il s'est en allé au lieu de il s'en est allé. La formule « plaît-il ? » est correcte mais idiomatique et passée de mode ; on l'employait encore quand j'étais enfant. Elle demande à quelqu'un de répéter quelque chose qu'on n'a pas compris. Aujourd'hui on dit : « Pardon ? ».
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques
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Vous pensez qu'il existe des solécismes sociaux ? Expliquez-moi. Dans le cas de l'expression plaît-il, il s'agit d'un archaïsme, dont l'emploi crée une sorte d'anachronisme. C'est peut-être ce que vous voulez dire.Islwyn a écrit : Comment ? Je pensais moins à un solécisme grammatical qu'à un solécisme social.
Soles était une ville d'Asie mineure célèbre pour ses parfums. C'était une colonie de Rhodes, et ses habitants avaient la réputation de massacrer la langue grecque. On appelait solécisme la façon de parler des indigènes de Soles.
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- Jacques
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Je me demande où le TLFi est allé chercher que solécisme s'applique à toute faute contre la règle dans n'importe quel domaine. Les dictionnaires d'usage, de même que le dictionnaire de rhétorique, ne donnent que le sens strict de faute de syntaxe. Ce sont des élucubrations de ce genre qui m'ont amené à supprimer de mes favoris le lien vers le TLFi. Ce n'est pas parce que de rares auteurs (il en cite deux) ont employé une extension de sens de ce mot par une hardiesse de style métaphorique que cela en fait une règle.Islwyn a écrit :TLFi, extension du sens primitif de solécisme : Faute contre la règle, la norme, dans quelque domaine que ce soit.
L'emploi de plaît-il ? pour pardon ? ou comment ? serait une faute contre la norme du français moderne. Mais je ne suis que trop content de renoncer à poursuivre !
Je répète que l'emploi de plaît-il ? n'est pas une faute mais un archaïsme (je l'ai expliqué plus haut). Ressusciter une expression tombée en désuétude ne constitue pas une faute.
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- Klausinski
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Cela remonte tout de même au moins à Molière et à la réplique fameuse des Femmes savantes :Jacques a écrit :Ce n'est pas parce que de rares auteurs (il en cite deux) ont employé une extension de sens de ce mot [solécisme] par une hardiesse de style métaphorique que cela en fait une règle.
Le moindre solécisme en parlant vous irrite ;
Mais vous en faites, vous, d’étranges en conduite.
Cela dit, si ce mot est utilisé pour désigner des fautes de langue, il est recommandable de ne pas l'employer dans son sens étendu, car cela créerait des ambiguïtés et une approximation non désirables.
Pour le TLFi, je crois que la règle est la suivante pour accepter une acception à la limite de la métaphore : si cette acception se rencontre assez souvent, ou bien si elle risque de ne pas être comprise immédiatement, elle est donnée avec les quelques exemples qui l'illustrent. En l'occurrence, la métaphore est employée relativement souvent, ce n'est plus une trouvaille, dans certains emplois, elle n'est plus sentie comme une métaphore mais comme une variante soutenue de « faute ». Si un lecteur rencontrant ce mot employé dans ce sens, cherche ce qu'il veut dire dans le dictionnaire et ne trouve que la première définition, il risque de ne pas comprendre. L'ambition du TLFi est d'être un recours dans ce genre de cas. Le dictionnaire de l'Académie française est moins utile que le TLFi quand on lit un roman du XIXe siècle et que l'on veut en comprendre toutes les subtilités. À chaque dictionnaire son usage.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Je sais que vous êtes un chaud partisan du TLFi, et jetez un regard méfiant vers l'Académie. J'occupe exactement la position inverse.
La citation de Molière a bien l'air d'être une métaphore : si vous ne supportez pas les écarts de langage, vous en faites dans votre conduite.
Le TLFi a le tort de laisser croire que ce sens « étendu » est d'usage courant, alors qu'il doit être manié avec des pincettes. Molière savait ce qu'il faisait en jouant avec les figures de rhétorique. Il est dangereux de faire croire au commun des francophones qu'il peut agir de même.
Définir le solécisme comme faute contre la règle dans quelque domaine que ce soit, c'est un excès qui peut mener loin. Exemple : la règle en sports d'hiver est de skier sur les pistes autorisées. Selon cette définition, qui pratique le ski hors piste commettrait un solécisme.
Ilswyn est parti dans cette mauvaise direction, pour lui tout comportement en dehors des règles est un solécisme, puisqu'il nomme solécisme l'emploi d'un archaïsme et parle de « solécisme social ».
Littré dit : figuré et familièrement faute quelconque, puis il donne votre citation. Figuré : donc métaphore, image symbolique par comparaison.
Et l'Académie : Il se dit figurément et par plaisanterie d'une faute quelconque. Un solécisme en conduite.
La définition sans réserves ni mise en garde donnée par le TLFi est une incitation à l'erreur.
La citation de Molière a bien l'air d'être une métaphore : si vous ne supportez pas les écarts de langage, vous en faites dans votre conduite.
Le TLFi a le tort de laisser croire que ce sens « étendu » est d'usage courant, alors qu'il doit être manié avec des pincettes. Molière savait ce qu'il faisait en jouant avec les figures de rhétorique. Il est dangereux de faire croire au commun des francophones qu'il peut agir de même.
Définir le solécisme comme faute contre la règle dans quelque domaine que ce soit, c'est un excès qui peut mener loin. Exemple : la règle en sports d'hiver est de skier sur les pistes autorisées. Selon cette définition, qui pratique le ski hors piste commettrait un solécisme.
Ilswyn est parti dans cette mauvaise direction, pour lui tout comportement en dehors des règles est un solécisme, puisqu'il nomme solécisme l'emploi d'un archaïsme et parle de « solécisme social ».
Littré dit : figuré et familièrement faute quelconque, puis il donne votre citation. Figuré : donc métaphore, image symbolique par comparaison.
Et l'Académie : Il se dit figurément et par plaisanterie d'une faute quelconque. Un solécisme en conduite.
La définition sans réserves ni mise en garde donnée par le TLFi est une incitation à l'erreur.
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- Klausinski
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Je consulte très souvent le dictionnaire de l'Académie, Jacques, mais pour un usage différent : pour avoir une définition stricte et presque incontestable d'un mot. Le TLFi n'est pas un dictionnaire pour apprendre à parler mais pour explorer la langue dans sa richesse. Il ne produit pas des exemples à partir de définitions, il produit des définitions à partir des exemples, il part de la réalité de la langue, telle qu'il peut la connaître par son corpus. Et il y a du reste bien des choses dans la définition du TLFi que les autres dictionnaires n'abordent pas : l'évolution de la graphie du mot, parfois de sa prononciation, son étymologie et les premiers emplois attestés de chaque acception.
Je vous accorde cependant que certaines personnes voulant parler de manière précieuse piochent parfois dans le TLFi les acceptions les plus rares et finissent par s'exprimer de manière ridicule, disant : « Les éphèbes ont manifesté contre tous les solécismes du gouvernement. »
Je vous accorde cependant que certaines personnes voulant parler de manière précieuse piochent parfois dans le TLFi les acceptions les plus rares et finissent par s'exprimer de manière ridicule, disant : « Les éphèbes ont manifesté contre tous les solécismes du gouvernement. »
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Il vaut donc mieux le prendre comme un inventaire plus ou moins encyclopédique, mais pas comme une référence technique.
Dernière modification par Jacques le ven. 15 mars 2013, 18:57, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Que c'est gentil à vous, Jacques !
Je n'étais pas partie aussi loin que le fils prodigue, et il est inutile de tuer le veau gras pour mon retour... Mais je suis contente de vous retrouver tous !
A dire vrai, je suis allée butiner sur d'autres forums, plus culinaires que linguistiques. Mais mon intérêt pour la langue française me pousse à revenir, même si certaines discussions sont trop ardues pour moi !
Je n'étais pas partie aussi loin que le fils prodigue, et il est inutile de tuer le veau gras pour mon retour... Mais je suis contente de vous retrouver tous !
A dire vrai, je suis allée butiner sur d'autres forums, plus culinaires que linguistiques. Mais mon intérêt pour la langue française me pousse à revenir, même si certaines discussions sont trop ardues pour moi !
- Klausinski
- Messages : 1295
- Inscription : mar. 12 déc. 2006, 23:54
- Localisation : Aude
Précisons par honnêteté que le TLFi consacre tout un encadré à la graphie d'a priori :Calou a écrit :surtout quand on trouve dans le TLFI un affreux "à priori" ! Ce qui nous renvoie à une discussion antérieure... Maintenant, je me méfie de lui...
PS : bonjour à tous après un moment d'absence !
Forme graph. Ac. 1932 écrit à priori (v. de même Ac. 1835, 1878, BESCH. 1845, LITTRÉ, DG, Pt Lar. 1906, QUILLET 1965). Écrivent a priori, sans accent, Lar. 19e, GUÉRIN 1892, ROB., Lar. encyclop., DUB. et Lar. Lang. fr. Nouv. Lar. ill. admet les deux graph., respectivement comme la graph. ,,francisée`` et comme la graph. lat. La graph. apriori, en un seul mot, est exceptionnelle (trois occurr. uniquement des emplois subst. dans le corpus littér. [une occur. ds Schaeffer 1952, supra, et deux ds Renouvier 1864, dont une citée supra]; nombreux ex. des graph. en deux mots [y compris ds Renouvier et Schaeffer], dont une vingtaine d'emplois subst. [aucun ds Renouvier et Schaeffer]). Cf. à posteriori.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
La rédaction de cet encadré, avec tous ces mots abrégés et ces références, n'incite pas à la lecture. On doit se donner du mal pour reconstituer les mots, et on ne se concentre pas sur le sens.
Tous mes dictionnaires et ouvrages didactiques indiquent sobrement que la formule s'écrit en deux mots et sans accent. L'Académie, qui en mettait un dans la 8e édition de son dictionnaire, l'a supprimé dans la 9e.
S'il a existé une tolérance sur la francisation, elle est donc abandonnée.
Le francophone courant ne cherche pas un historique, rédigé qui plus est dans un style pré-SMS, mais une réponse simple à la question : accent ou pas, un ou deux mots ? Et ladite réponse tient en une courte phrase.
Tous mes dictionnaires et ouvrages didactiques indiquent sobrement que la formule s'écrit en deux mots et sans accent. L'Académie, qui en mettait un dans la 8e édition de son dictionnaire, l'a supprimé dans la 9e.
S'il a existé une tolérance sur la francisation, elle est donc abandonnée.
Le francophone courant ne cherche pas un historique, rédigé qui plus est dans un style pré-SMS, mais une réponse simple à la question : accent ou pas, un ou deux mots ? Et ladite réponse tient en une courte phrase.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).