Ô combien (savoir)…
- Klausinski
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Ô combien (savoir)…
Je lis cette expression : Dieu sait ô combien elle me fait peur.
Pour moi, on ne peut pas employer ici l'expression « ô combien » qui signifie « à un point extrême », car le mot « combien » a un rôle grammatical bien précis. Ce serait différent si l'on écrivait simplement « Ô combien elle me fait peur ! », car « combien » n'aurait là qu'une fonction adverbiale.
Qu'en pensez-vous ?
Pour moi, on ne peut pas employer ici l'expression « ô combien » qui signifie « à un point extrême », car le mot « combien » a un rôle grammatical bien précis. Ce serait différent si l'on écrivait simplement « Ô combien elle me fait peur ! », car « combien » n'aurait là qu'une fonction adverbiale.
Qu'en pensez-vous ?
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
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- Jacques
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Je pense la même chose. Il y a faute de construction. Dieu sait combien je le déteste est la seule forme recevable.
D'après Bordas, ô combien placé derrière un adjectif ou un verbe est de style familier (je le souhaite, ô combien).
Il vient naturellement à l'esprit ce passage du Cid : Ô rage, ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! d'où je déduis qu'en style soutenu, ô doit se placer seulement devant un nom.
J'hésite, mais le deuxsième exemple me donne l'impression qu'il faudrait écrire Oh ! combien elle me fait peur ! ou Oh, combien elle me fait peur !
D'après Bordas, ô combien placé derrière un adjectif ou un verbe est de style familier (je le souhaite, ô combien).
Il vient naturellement à l'esprit ce passage du Cid : Ô rage, ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! d'où je déduis qu'en style soutenu, ô doit se placer seulement devant un nom.
J'hésite, mais le deuxsième exemple me donne l'impression qu'il faudrait écrire Oh ! combien elle me fait peur ! ou Oh, combien elle me fait peur !
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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- Jacques-André-Albert
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- Jacques
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Je ne crois pas. Pour moi on devrait dire Dieu sait combien... Ô a une valeur exclamative, il ne peut pas s'introduire dans une phrase affirmative. Selon Bordas il « s'emploie devant un nom mis en apostrophe. Il est toujours suivi d'un pronom, d'un nom ou d'un adjectif précédant un nom. Ô combien appartient à la langue familière : il est sûr de lui, ô combien ! Il prend son temps, ô combien ! » Nous voyons selon ces exemples, que l'expression est toujours en fin de phrase. Elle peut aussi être en incise, comme expliqué plus haut, selon l'Académie : Loc. Ô combien ! en incise ou en fin de phrase, à quel degré. Nous avons aimé votre ouvrage ô combien ! Il est adroit, ô combien ! dans tout ce qu'il fait.Jacques-André-Albert a écrit :Une tournure acceptable serait : Dieu sait ô combien elle me fait peur, ô combien !
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- Klausinski
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Merci de vos réponses. Vous confirmez mon intuition. Je pense que JAA a laissé passer une coquille et qu'il voulait écrire : « Dieu sait combien elle me fait peur, ô combien. » Dans ce cas, oui, cela me paraît acceptable.
En langage moderne, j'ai l'impression que cette tournure modifie moins souvent un verbe, comme c'est le cas dans tous les exemples donnés ici, qu'un adjectif : les règles ô combien subtiles, un homme ô combien sympathique, un manuscrit ô combien mystérieux, etc. Ces expressions-là me paraissent courantes alors que je ne crois pas avoir jamais entendu « je l'aime, ô combien ! » ou des choses de ce genre.
En langage moderne, j'ai l'impression que cette tournure modifie moins souvent un verbe, comme c'est le cas dans tous les exemples donnés ici, qu'un adjectif : les règles ô combien subtiles, un homme ô combien sympathique, un manuscrit ô combien mystérieux, etc. Ces expressions-là me paraissent courantes alors que je ne crois pas avoir jamais entendu « je l'aime, ô combien ! » ou des choses de ce genre.
Excusez-moi, je ne comprends pas bien votre déduction, Jacques. Le fait que ô se place souvent devant un nom ne nous permet pas de déduire qu'il ne doit se placer que devant un nom, il me semble. Du reste, si Girodet dit que « ô combien » est familier derrière un adjectif ou un verbe, qu'en est-il quand cette tournure est placée devant un adjectif ou un nom ? On en trouve de nombreux exemples, même chez nos classiques.Jacques a écrit :D'après Bordas, ô combien placé derrière un adjectif ou un verbe est de style familier (je le souhaite, ô combien).
Il vient naturellement à l'esprit ce passage du Cid : Ô rage, ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! d'où je déduis qu'en style soutenu, ô doit se placer seulement devant un nom.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
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- Jacques-André-Albert
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Vous avez vu juste : c'était une étourderie.Klausinski a écrit :Merci de vos réponses. Vous confirmez mon intuition. Je pense que JAA a laissé passer une coquille et qu'il voulait écrire : « Dieu sait combien elle me fait peur, ô combien. » Dans ce cas, oui, cela me paraît acceptable.
![[embarrassé] :oops:](./images/smilies/icon_redface.gif)
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Jacques
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Ce n'est pas ce que je voulais dire. Le fait que Girodet le considère comme familier derrière un verbe ou un adjectif donne à penser que, selon lui, son véritable emploi correct dans la langue surveillée est devant un nom. C'est une supposition que je tire de ses propos, mais pas une idée personnelle.Klausinski a écrit :Excusez-moi, je ne comprends pas bien votre déduction, Jacques. Le fait que ô se place souvent devant un nom ne nous permet pas de déduire qu'il ne doit se placer que devant un nom, il me semble. Du reste, si Girodet dit que « ô combien » est familier derrière un adjectif ou un verbe, qu'en est-il quand cette tournure est placée devant un adjectif ou un nom ? On en trouve de nombreux exemples, même chez nos classiques.Jacques a écrit :D'après Bordas, ô combien placé derrière un adjectif ou un verbe est de style familier (je le souhaite, ô combien).
Il vient naturellement à l'esprit ce passage du Cid : Ô rage, ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! d'où je déduis qu'en style soutenu, ô doit se placer seulement devant un nom.
J'ai également cité l'Académie française, qui affirme que ô combien se met toujours en fin de phrase ou en incise.
Notons la subtilité : ces emplois concernent la locution adverbiale ô combien, qui signifie « en grande quantité ».
Remarquons d'ailleurs que dans votre lien il est écrit Ô combien d'actions... alors que, dans Oceano nox, Victor Hugo, avec une même construction, écit Oh ! combien de marins, combien de capitaines...
Dernière modification par Jacques le dim. 23 juin 2013, 8:03, modifié 2 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques-André-Albert
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Distinction à souligner, dans une production écrite, sur Internet, où on voit très souvent « et bien » à la place de « eh bien ».Jacques a écrit :Remarquons d'ailleurs que dans votre lien il est écrit Ô combien... alors que, dans Oceano nox, Victor Hugo, avec une même construction, écit Oh ! combien de marins, combien de capitaines...
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Suis-je "plus papal que le pape" ? Même ici, "ô combien" ne me plaît guère : il ne fait pas partie de la phrase complexe (principale et subordonnée), qui s'arrête à "peur" et dont le verbe principal est "sait". Pour moi "ô combien" reprend avec insistance "Dieu sait" et non "elle me fait peur".Klausinski a écrit : « Dieu sait combien elle me fait peur, ô combien. » Dans ce cas, oui, cela me paraît acceptable.
- Klausinski
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je viens de regarder dans le Bordas et je comprends mieux. Girodet n'écrit pas : « Ô combien ! placé après un adjectif ou un verbe, appartient à la la langue familière », ce qui pourrait donner à penser que, placé ailleurs, il serait correct, mais il signale parmi tous les emplois de combien :Jacques a écrit :Ce n'est pas ce que je voulais dire. Le fait que Girodet le considère comme familier derrière un verbe ou un adjectif donne à penser que, selon lui, son véritable emploi correct dans la langue surveillée est devant un nom. C'est une supposition que je tire de ses propos, mais pas une idée personnelle.
J'ai également cité l'Académie française, qui affirme que ô combien se met toujours en fin de phrase ou en incise.
Notons la subtilité : ces emplois concernent la locution adverbiale ô combien, qui signifie « en grande quantité ».
Remarquons d'ailleurs que dans votre lien il est écrit Ô combien d'actions... alors que, dans Oceano nox, Victor Hugo, avec une même construction, écit Oh ! combien de marins, combien de capitaines...
« Ô combien ! placé après un adjectif ou un verbe. Appartient à la langue familière », ce qui suggère en effet que tous les emplois de ô combien sont familiers.
C'est étrange. J'avais plutôt l'impression qu'il s'agissait d'un tour précieux, et l'Académie ne dit pas qu'il est familier.
Pour moi, ô combien se rapporte à ce qu'il est le plus sémantiquement logique qu'il se rapporte. Il est vrai qu'il y aurait dans ce cas-là une ambiguïté, avec des phrases telles que : « Elle m'a aidé à lui faire peur, ô combien ! »André a écrit :Suis-je "plus papal que le pape" ? Même ici, "ô combien" ne me plaît guère : il ne fait pas partie de la phrase complexe (principale et subordonnée), qui s'arrête à "peur" et dont le verbe principal est "sait". Pour moi "ô combien" reprend avec insistance "Dieu sait" et non "elle me fait peur".
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
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- Jacques
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J'ai toujours cru, moi aussi, que cette locution adverbiale appartenait à un niveau de langue élevé. Je trouve que parfois Girodet a des positions déroutantes à propos de certains usages. Hanse signale que ô est suivi d'un pronom, d'un nom précédé ou non d'un déterminant, ou d'un adverbe. Il n'établit pas de disctinction sur le niveau de langue.
Dernière modification par Jacques le dim. 23 juin 2013, 10:58, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Klausinski
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- Localisation : Aude
Alors ne devrions-nous utiliser le mot ô que pour apostropher une personne. Ô mon fidèle client, voulez-vous que je vous prête une liasse ? Et y a-t-il virgule après ô ?
Ou y a-t-il d'autres usages corrects ?
Ô temps, ô moeurs !
Je me pose la question parce que je dois le citer parmi les homophones au, aux, haut, hauts, eau, eaux, os, o, oh, etc.
Ou y a-t-il d'autres usages corrects ?
Ô temps, ô moeurs !
Je me pose la question parce que je dois le citer parmi les homophones au, aux, haut, hauts, eau, eaux, os, o, oh, etc.
Dernière modification par shokin le ven. 28 juin 2013, 20:15, modifié 1 fois.
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