C'est... que...
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C'est... que...
Entendu à la télévision : "Ce sont dans les eaux stagnantes que les moustiques pondent leurs œufs."
Bien que le sujet ait déjà été traité ici, cette phrase me semble y ajouter un exemple de sur-correction fautif. "C'est... que" devient seulement "Ce sont... que" quand il amène un attribut du sujet "c'" ("ce") ("Ce sont amis que vent emporte"), et non quand il est suivi d'un complément.
Je remarque aussi que certains écrivains accordent cette tournure au présent et ne le font plus au passé : on est gêné par "C'est les enfants qui ont fait cela", on l'est moins par "C'était les enfants qui avaient fait cela".
Et je tends personnellement à dire et écrire "C'est eux..." et non "Ce sont eux..." D'un point de vue strictement grammatical j'ai sans doute tort.
Bien que le sujet ait déjà été traité ici, cette phrase me semble y ajouter un exemple de sur-correction fautif. "C'est... que" devient seulement "Ce sont... que" quand il amène un attribut du sujet "c'" ("ce") ("Ce sont amis que vent emporte"), et non quand il est suivi d'un complément.
Je remarque aussi que certains écrivains accordent cette tournure au présent et ne le font plus au passé : on est gêné par "C'est les enfants qui ont fait cela", on l'est moins par "C'était les enfants qui avaient fait cela".
Et je tends personnellement à dire et écrire "C'est eux..." et non "Ce sont eux..." D'un point de vue strictement grammatical j'ai sans doute tort.
Dernière modification par André (G., R.) le mar. 06 févr. 2018, 9:19, modifié 2 fois.
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J'ai toujours aussi été frappé par l'illogisme de cet accord, et je pense que vous n'avez pas tort. Jadis, on disait bien c'est eux, et non ce sont eux ; je ne sais plus de quand date cette mode, mais de nos jours, si paradoxal que cela puisse sembler, c'est eux est considéré comme du langage familier. Le véritable sujet du verbe être est bien le neutre ce, qui est singulier. On ne dirait pas cela sont eux, mais bien cela est eux ; si cette formule n'est pas orthodoxe, elle éclaire le raisonnement.
Dernière modification par Jacques le lun. 08 juil. 2013, 10:02, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Voyez la fragilité de l'affaire. Je cite Difficultés et pièges du français de Larousse :
Dans les phrases négatives et interrogatives, c'est est admis : Ce n'est pas eux qui ont pris l'initiative. Est-ce vraiment eux qui ont pris l'initiative ? L'accord vaut surtout à l'oral et à l'écrit très soutenus. Devant une indication de quantité, on emploie généralement c'est : Pour obtenir cette attestation, c'est trois heures d'attente ; C'est cinquante euros d'économisés.
Robert des difficultés :
Quant l'attribut de ce est au pluriel, le verbe s'accorde de façon très variable.
On notera qu'en phrases négatives, l'emploi du verbe au singulier semble plus naturel : Non, ce n'était pas des livres qui l'intéressaient (Anouilh). Mais cette phrase de Dorgelès mélange les deux accords : Ce n'était pas seulement mes yeux qui admiraient, c'étaient aussi les vôtres.
Nous sommes donc en droit d'estimer que cet accord insolite au pluriel est sujet à caution, et que le singulier ne devrait pas être considéré comme du seul domaine de la langue familière.
Dans les phrases négatives et interrogatives, c'est est admis : Ce n'est pas eux qui ont pris l'initiative. Est-ce vraiment eux qui ont pris l'initiative ? L'accord vaut surtout à l'oral et à l'écrit très soutenus. Devant une indication de quantité, on emploie généralement c'est : Pour obtenir cette attestation, c'est trois heures d'attente ; C'est cinquante euros d'économisés.
Robert des difficultés :
Quant l'attribut de ce est au pluriel, le verbe s'accorde de façon très variable.
On notera qu'en phrases négatives, l'emploi du verbe au singulier semble plus naturel : Non, ce n'était pas des livres qui l'intéressaient (Anouilh). Mais cette phrase de Dorgelès mélange les deux accords : Ce n'était pas seulement mes yeux qui admiraient, c'étaient aussi les vôtres.
Nous sommes donc en droit d'estimer que cet accord insolite au pluriel est sujet à caution, et que le singulier ne devrait pas être considéré comme du seul domaine de la langue familière.
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- Jacques-André-Albert
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Ce procédé est pourtant attesté dès le seizième siècle :
« ce sont les devoirs dus au roi notre sire »,
Plusieurs exemples sur cette page de 1792,
Ici, en 1723 : « ce sont des clous »,
etc.
« ce sont les devoirs dus au roi notre sire »,
Plusieurs exemples sur cette page de 1792,
Ici, en 1723 : « ce sont des clous »,
etc.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Jacques
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Une sorte d'aberration qui a la vie dure, donc. Mais l'usage actuel, qui tend à se reporter sur le singulier, finira peut-être par s'imposer comme règle. Nous verrons bien, quand l'Académie publiera son 10e dictionnaire, dans un siècle ou un peu plus. :D
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Ce sujet me rappelle un passage du Français pratique où est cité un extrait d'un article de Jean Dutourd (France Soir, 25-26 février 1979) :
« On me querelle sur la forme : “C'est eux…” que j'emploie souvent. On m'explique que c'est une formule fautive et qu'il faut dire : “Ce sont eux.” Eh bien, pas du tout, chers censeurs, c'est moi qui ai raison et c'est vous qui avez tort. Du reste, cette phrase même vous le prouve. J'écris : “C'est vous” et non pas “C'êtes vous” comme je devrais le faire si j'allais au bout de votre logique. En l'occurrence, le verbe est commandé par “ce”, qui est singulier, et non par “eux”, qui est pluriel. “Ce” est l'équivalent de “il”. […] Lisez les bons auteurs. Tous écrivent : “c'est eux”. Balzac entre autres. Je crois qu'il n'emploie pas une seule fois la forme “ce sont”, “c'étaient” ou “ce furent” tout au long de la Comédie humaine. »
Le Français pratique reconnaît le caractère convaincant de l'article, mais donne des exemples de bons auteurs ayant écrit « ce sont » : Molière, Musset, Hugo. Pour ce dernier, on cite l'extrait suivant :
Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ; ce sont
Ceux dont un dessein ferme emplit l'âme et le front.
(Châtiments, IV, IX)
Je pense aussi au tour si ce n'est, que j'imagine mal employé au pluriel : Rien ne le divertissait, si ce n'est quelques émissions idiotes.
« On me querelle sur la forme : “C'est eux…” que j'emploie souvent. On m'explique que c'est une formule fautive et qu'il faut dire : “Ce sont eux.” Eh bien, pas du tout, chers censeurs, c'est moi qui ai raison et c'est vous qui avez tort. Du reste, cette phrase même vous le prouve. J'écris : “C'est vous” et non pas “C'êtes vous” comme je devrais le faire si j'allais au bout de votre logique. En l'occurrence, le verbe est commandé par “ce”, qui est singulier, et non par “eux”, qui est pluriel. “Ce” est l'équivalent de “il”. […] Lisez les bons auteurs. Tous écrivent : “c'est eux”. Balzac entre autres. Je crois qu'il n'emploie pas une seule fois la forme “ce sont”, “c'étaient” ou “ce furent” tout au long de la Comédie humaine. »
Le Français pratique reconnaît le caractère convaincant de l'article, mais donne des exemples de bons auteurs ayant écrit « ce sont » : Molière, Musset, Hugo. Pour ce dernier, on cite l'extrait suivant :
Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ; ce sont
Ceux dont un dessein ferme emplit l'âme et le front.
(Châtiments, IV, IX)
Je pense aussi au tour si ce n'est, que j'imagine mal employé au pluriel : Rien ne le divertissait, si ce n'est quelques émissions idiotes.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
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