Perles d'inculture 3
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Voici un bilan succinct de quelques recherches, elles-mêmes modestes, que je viens de faire.
Il semblerait que le mode conditionnel dans la subordonnée de condition n'ait jamais été de règle en français, en particulier en ancien français, où on en trouve cependant de rares exemples. Dans la Chanson de Roland (XIIe siècle) les phrases hypothétiques de l'irréel comportent essentiellement des verbes au subjonctif, aussi bien dans la principale que dans la subordonnée, ou bien un verbe au subjonctif dans la subordonnée et un verbe au conditionnel (comme aujourd'hui) dans la principale :
S’i fust li reis, n’i oüssons damage.
(Avec les mots d'aujourd'hui : Si y fût le roi, n'y eussions dommage), c'est-à-dire :
Si le roi y était, nous n’y aurions pas de dommage.
Se vedissons Roland...
Ensemble od lui i donrions granz colps.
(Avec les mots d'aujourd'hui : Si vissions Roland... Ensemble avec lui y donnerions grands coups), c'est-à-dire :
Si nous voyions Roland... Ensemble, avec lui, nous y donnerions de grands coups.
(Je crois qu'il s'agit de donner des coups à quelque chose.)
L'imparfait et le plus-que-parfait de l'indicatif dans la subordonnée de condition apparaissent à la fin du XIIe siècle :
S’il le saveit, vos seriés vergondé. (Huon de Bordeaux), c'est-à-dire :
S’il le savait, vous seriez honni.
Huon de Bordeaux est une chanson de geste composée par un trouvère dont on ne connaît pas le nom.
Il semblerait que le mode conditionnel dans la subordonnée de condition n'ait jamais été de règle en français, en particulier en ancien français, où on en trouve cependant de rares exemples. Dans la Chanson de Roland (XIIe siècle) les phrases hypothétiques de l'irréel comportent essentiellement des verbes au subjonctif, aussi bien dans la principale que dans la subordonnée, ou bien un verbe au subjonctif dans la subordonnée et un verbe au conditionnel (comme aujourd'hui) dans la principale :
S’i fust li reis, n’i oüssons damage.
(Avec les mots d'aujourd'hui : Si y fût le roi, n'y eussions dommage), c'est-à-dire :
Si le roi y était, nous n’y aurions pas de dommage.
Se vedissons Roland...
Ensemble od lui i donrions granz colps.
(Avec les mots d'aujourd'hui : Si vissions Roland... Ensemble avec lui y donnerions grands coups), c'est-à-dire :
Si nous voyions Roland... Ensemble, avec lui, nous y donnerions de grands coups.
(Je crois qu'il s'agit de donner des coups à quelque chose.)
L'imparfait et le plus-que-parfait de l'indicatif dans la subordonnée de condition apparaissent à la fin du XIIe siècle :
S’il le saveit, vos seriés vergondé. (Huon de Bordeaux), c'est-à-dire :
S’il le savait, vous seriez honni.
Huon de Bordeaux est une chanson de geste composée par un trouvère dont on ne connaît pas le nom.
- Islwyn
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- Localisation : Royaume-Uni (décédé le 9 mars 2018)
Il semble que ce soit l'ambiguïté de l'imparfait du subjonctif dans les phrases conditionnelles qui explique sa disparition. Un de mes manuels cite les phrases suivantes :
Si j'osasse parler, je demendasse, signifiant ou « si j'osais, je demanderais » (et je le ferai peut-être) ou « si j'avais osé, j'aurais demandé » (mais je n'ai pas osé).
Par contre, on trouve dans un des premiers poèmes épiques :
s'il pleuvait, je ne sortirais pas.
Ainsi voit-on, comme signalé ci-dessus, une évolution fortement marquée, même dans des textes de presque pareille date.
Si j'osasse parler, je demendasse, signifiant ou « si j'osais, je demanderais » (et je le ferai peut-être) ou « si j'avais osé, j'aurais demandé » (mais je n'ai pas osé).
Par contre, on trouve dans un des premiers poèmes épiques :
s'il pleuvait, je ne sortirais pas.
Ainsi voit-on, comme signalé ci-dessus, une évolution fortement marquée, même dans des textes de presque pareille date.
Quantum mutatus ab illo
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Je tends aussi à croire que l'imparfait du subjonctif représentait une ambigüité entre l'hypothèse dans le présent (ou le futur) et l'hypothèse dans le passé. Cette ambigüité disparaît avec l'utilisation de l'indicatif, dont l'imparfait s'est alors imposé pour l'hypothèse dans le présent (votre exemple), son plus-que-parfait (votre autre exemple) devenant le temps de l'hypothèse dans le passé.Islwyn a écrit :Si j'osasse parler, je demendasse, signifiant ou « si j'osais, je demanderais » (et je le ferai peut-être) ou « si j'avais osé, j'aurais demandé » (mais je n'ai pas osé).
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Une phrase dans un titre de journal : N'attendons pas les fêtes de fin d'année pour se faire plaisir avec la saint-jacques.
Se faire plaisir est tellement employé que l'on oublie qu'il est concerné par la concordance des personnes. Un journaliste, dont l'outil est la langue française, ne devrait pas commettre cette erreur.
Je serai plus indulgent avec les minuscules aux initiales de saint-jacques. On admet, je crois, que les toponymes donnant leur nom à des vins (un grand saint-estèphe) perdent alors leurs majuscules. Peut-être n'est-il pas scandaleux d'appliquer une règle comparable à la coquille Saint-Jacques... quand on la prive de sa coquille !
Se faire plaisir est tellement employé que l'on oublie qu'il est concerné par la concordance des personnes. Un journaliste, dont l'outil est la langue française, ne devrait pas commettre cette erreur.
Je serai plus indulgent avec les minuscules aux initiales de saint-jacques. On admet, je crois, que les toponymes donnant leur nom à des vins (un grand saint-estèphe) perdent alors leurs majuscules. Peut-être n'est-il pas scandaleux d'appliquer une règle comparable à la coquille Saint-Jacques... quand on la prive de sa coquille !
- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Cette non-concordance des pronoms est devenue un classique, preuve que des tas de gens parlent sans se préoccuper de la justesse de leur vocabulaire.
Pour la Saint-Jacques, je ne fais pas autorité mais je suis perplexe à propos de votre supposition. La Saint-Jacques, c'est une ellipse pour la coquille Saint-Jacques, mais évidemment la coquille ce n'est pas l'animal.
Pour la Saint-Jacques, je ne fais pas autorité mais je suis perplexe à propos de votre supposition. La Saint-Jacques, c'est une ellipse pour la coquille Saint-Jacques, mais évidemment la coquille ce n'est pas l'animal.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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L'ellipse en tant que telle ne justifie probablement pas les minuscules. Mais un grand saint-estèphe, sauf erreur, constitue également une ellipse, celle de un grand vin de Saint-Estèphe. Pour le Robert, qui ne connaît toutefois pas d'ellipse de coquille Saint-Jacques, les noms de grands crus, de fromages (des saint-nectaires) et de poissons (un saint-pierre, appelé anciennement un poisson de Saint-Pierre) formés ainsi ne prennent pas de majuscules. Tout porte à croire que le Robert écrirait saint-jacques s'il acceptait le mot. Mais je me perds en conjectures !Jacques a écrit : La Saint-Jacques, c'est une ellipse pour la coquille Saint-Jacques, mais évidemment la coquille ce n'est pas l'animal.
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- Perkele
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Sans aucun doute ! :DAndré (G., R.) a écrit :On voulait peut-être parler, par exemple, de la faute de celui qui écrit N'attendons pas les fêtes de fin d'année pour se faire plaisir ! :Djarnicoton a écrit :Sur France-Info, une journaliste vient de nous dire que dans le monde "70% des crimes de journalistes restent impunis."
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Pour trouver la réponse, il faut chercher à coquille et Robert écrit bien coquille Saint-Jacques. L'explication, ce n'est un secret pour personne, venant de ce qu'il s'agit de Saint-Jacques de Compostelle. Mais nous tournons dans un cercle vicieux : pourquoi camembert, champagne et Saint-Jacques ? Dans tous les cas il s'agit de noms de lieux.André (G., R.) a écrit :L'ellipse en tant que telle ne justifie probablement pas les minuscules. Mais un grand saint-estèphe, sauf erreur, constitue également une ellipse, celle de un grand vin de Saint-Estèphe. Pour le Robert, qui ne connaît toutefois pas d'ellipse de coquille Saint-Jacques, les noms de grands crus, de fromages (des saint-nectaires) et de poissons (un saint-pierre, appelé anciennement un poisson de Saint-Pierre) formés ainsi ne prennent pas de majuscules. Tout porte à croire que le Robert écrirait saint-jacques s'il acceptait le mot. Mais je me perds en conjectures !Jacques a écrit : La Saint-Jacques, c'est une ellipse pour la coquille Saint-Jacques, mais évidemment la coquille ce n'est pas l'animal.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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