Abasourdi
- Jacques
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Abasourdi
Il y a deux ou trois jours, un comédien connu a été invité par le présentateur des informations télévisées.
À un moment donné, il a dit : « Je suis abasourdi ». Jusqu’ici rien d’extraordinaire, mais j’ai tiqué car il a prononcé abassourdi.
J’ai toujours dit et entendu dire a-ba-zour-di. Ce n’est peut-être pas logique puisque le mot vient de sourd, mais la règle, si je ne me trompe, veut qu’on prononce Z le S placé entre deux sons vocaliques.
Il me semble que cette faute est assez récente, mais tend à se généraliser.
Elle va d’ailleurs à l’inverse de ce tic installé depuis plusieurs dizaines d’années, qui fait prononcer Z le S mis entre une voyelle et une consonne, ce qui nous donne : mutizm’, fantazm’, tranzmutation, microcozm’, Izraël et bien d’autres, une manie nettement agaçante.
Pourquoi donc toutes ces entorses à la phonétique ? Elles sont au moins aussi déplaisantes que les fautes de syntaxe, d’accord, de vocabulaire qui écorchent le français quotidien.
À un moment donné, il a dit : « Je suis abasourdi ». Jusqu’ici rien d’extraordinaire, mais j’ai tiqué car il a prononcé abassourdi.
J’ai toujours dit et entendu dire a-ba-zour-di. Ce n’est peut-être pas logique puisque le mot vient de sourd, mais la règle, si je ne me trompe, veut qu’on prononce Z le S placé entre deux sons vocaliques.
Il me semble que cette faute est assez récente, mais tend à se généraliser.
Elle va d’ailleurs à l’inverse de ce tic installé depuis plusieurs dizaines d’années, qui fait prononcer Z le S mis entre une voyelle et une consonne, ce qui nous donne : mutizm’, fantazm’, tranzmutation, microcozm’, Izraël et bien d’autres, une manie nettement agaçante.
Pourquoi donc toutes ces entorses à la phonétique ? Elles sont au moins aussi déplaisantes que les fautes de syntaxe, d’accord, de vocabulaire qui écorchent le français quotidien.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Re: Abasourdi
Que le mot vienne de sourd n'est pas certain. Pour le Robert DHLF il est plutôt dérivé « de l'ancien argot bazir «tuer» (1155, dans le procès des Coquillards)... » Mais le dictionnaire ajoute « Quoi qu'il en soit, le verbe s'est plus ou moins croisé avec assourdir en entrant dans l'usage courant (1713), avec le sens de «abrutir, assourdir par des cris, des paroles» puis en général «ahurir». »Jacques a écrit :J’ai toujours dit et entendu dire a-ba-zour-di. Ce n’est peut-être pas logique puisque le mot vient de sourd, mais la règle, si je ne me trompe, veut qu’on prononce Z le S placé entre deux sons vocaliques.
Aucun doute, de toute manière, sur la prononciation sonore du S.
Dernière modification par André (G., R.) le mar. 14 oct. 2014, 12:47, modifié 1 fois.
- Jacques-André-Albert
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Jacques, cette prononciation m'a aussi fait tiquer, dans la bouche de ce comédien. J'ai vérifié sur le moment que l'origine était bien à rechercher dans l'argot ancien « bazir, basourdir », la proximité phonétique et sémantique avec « assourdir » ayant produit la confusion.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Dès les premiers enregistrements que j'ai faits pour une bibliothèque sonore j'ai rencontré abasourdir et vérifié que son S se prononce Z.
Il m'est arrivé deux ou trois fois sur Français notre belle langue de parler de consonnes sonore et sourde. J'espère qu'on ne m'en voudra pas d'insister sur ces mots, qui sont ceux des
linguistes : lorsque l'on pose la main sur sa gorge en faisant le bruit du moustique ZZZZ, on constate une vibration, celle des cordes vocales ; à l'inverse si l'on prononce SSSS, rien ne vibre dans la gorge : dans basse, le son représenté par SS est sourd, dans base, S est sonore. Il y a le même rapport entre B et P, V et F...
Il m'est arrivé deux ou trois fois sur Français notre belle langue de parler de consonnes sonore et sourde. J'espère qu'on ne m'en voudra pas d'insister sur ces mots, qui sont ceux des
linguistes : lorsque l'on pose la main sur sa gorge en faisant le bruit du moustique ZZZZ, on constate une vibration, celle des cordes vocales ; à l'inverse si l'on prononce SSSS, rien ne vibre dans la gorge : dans basse, le son représenté par SS est sourd, dans base, S est sonore. Il y a le même rapport entre B et P, V et F...
Dernière modification par André (G., R.) le mar. 14 oct. 2014, 16:46, modifié 1 fois.
- Jacques-André-Albert
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- Jacques-André-Albert
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- Localisation : Niort
On peut remarquer qu'une consonne sourde, si elle est suivie d'une sonore, se fait contaminer par cette dernière, dans un discours assez rapide :
- Lac de Gaube, si on prête bien l'oreille, se prononce lagdegaube.
- Trace de pas est prononcé trazdepas, etc.
Je ne sais pas ce qu'il en est dans d'autres langues, mais je me souviens, lors des cours d'allemand au lycée, que là où je disais « chfaïne » pour Schwein, certains de mes camarades disaient « jvaïne ».
- Lac de Gaube, si on prête bien l'oreille, se prononce lagdegaube.
- Trace de pas est prononcé trazdepas, etc.
Je ne sais pas ce qu'il en est dans d'autres langues, mais je me souviens, lors des cours d'allemand au lycée, que là où je disais « chfaïne » pour Schwein, certains de mes camarades disaient « jvaïne ».
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Vous aviez raison, vos camarades se trompaient : Le son représenté par Sch l'emporte et contamine effectivement, dans le sens de l'assourdissement, le W qui suit (il devient F).Jacques-André-Albert a écrit :On peut remarquer qu'une consonne sourde, si elle est suivie d'une sonore, se fait contaminer par cette dernière, dans un discours assez rapide :
- Lac de Gaube, si on prête bien l'oreille, se prononce lagdegaube.
- Trace de pas est prononcé trazdepas, etc.
Je ne sais pas ce qu'il en est dans d'autres langues, mais je me souviens, lors des cours d'allemand au lycée, que là où je disais « chfaïne » pour Schwein, certains de mes camarades disaient « jvaïne ».
J'ai eu souvent l'occasion d'expliquer l'incompatibilité entre sourde et sonore en prenant, en français, l'exemple d'une marque de café composée d'un prénom se terminant par le son K et d'un patronyme commençant par un V : le prénom devient « Jague », à moins que l'on marque un temps d'arrêt avant de prononcer le patronyme.
Je tends à croire que c'est une loi universelle.
- Jacques-André-Albert
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Oui, et on appelle cela un sandhi.André (G., R.) a écrit :Je tends à croire que c'est une loi universelle.
Mais vous remarquerez que l'assimilation se fait, en allemand, à l'inverse du français :
- en français on a sourde + sonore donne 2 sonores (sac de riz devenant sagderi)
- en allemand sourde + sonore donne deux sourdes.
Mais dans le premier cas, c'est un sandhi externe, dans le deuxième un sandhi interne.
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(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Jacques
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Pendant que nous y sommes, il y a les nombres qui commencent par dix, qui devient diz dans dix-huit (dizuit') et dix-neuf (dizneuf'). Je me demande si vous avez une explication. Et nous avons un présentateur des informations sur la 2, D.P., qui prononce toujours disshuit' et dissneuf', ce qui m'agace un tantinet.
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