Majusculite

[Jacques]

La manie d’abuser des majuscules n’est pas nouvelle. Si on prend des textes du début du XXe siècle, on en trouve déjà beaucoup qui ne devraient pas y être. Je crois que je viens quand même de découvrir le record, dans une revue de notre antépénultième commune, revue dont je fus d’ailleurs le responsable il y a pas mal de temps.
Six pensées sont regroupées dans un tableau. Pour cinq d’entre elles il n’y a rien à dire, mais en voici une qui vaut la peine d’être citée :
Personne Ne Doit Être La Raison De Ton Bonheur, À Part Toi-Même
J'aimerais que l'auteur de cette pensée me donne une justification.

[Klausinski]

C'est une mode sur Facebook. Nombreux sont ceux qui mettent en valeur, dans un cadre mièvre, avec une image mièvre, une citation mièvre affectée de majuscules. Quand on affiche son mauvais goût, il s'agit de ne rien oublier. Vous dites que cela se répand dans des revues en papier ?

[Jacques]

Vous dites que cela se répand dans des revues en papier ?

Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Pas à ce point. En général, où que ce soit, on trouve dans tous les domaines de l'écrit, surtout public (pub, télé, affichages extérieurs, étiquettes de produits) un grand nombre de majuscules injustifiées.

[André (G., R.)]

Nous regrettons souvent que des gens dont la langue est le métier la respectent peu. Il me semble que la majusculite n'est heureusement pas trop leur vice, mais qu'elle est, comme vous le dites, Klausinski, particulièrement répandue sur Facebook et dans les pubs. Une de ses causes, sans doute pas la plus importante, tient au fait que lorsqu'on passe à la ligne pour un titre, dans un programme de traitement de texte, la majuscule est parfois imposée par le logiciel :

Servitude
Et grandeur militaires

La majusculite est d'autant plus étrange que son inverse, la minusculite, sévit tout autant, en tout cas pareillement sur Facebook et dans les pubs. Sur le réseau social je trouve par exemple ce matin :
oh la la !!! noël approche a grand pas . gros bisous a toute la petite famille

[Claude]

[...] oh la la !!! noël approche a grand pas . gros bisous a toute la petite famille

Avec ce texte, l'espace avant le point passe presque inaperçu. On peut observer que miraculeusement il y a deux P à approche.

[André (G., R.)]

[...] oh la la !!! noël approche a grand pas . gros bisous a toute la petite famille

Non, ce n'est pas moi !:lol:

Avec ce texte, l'espace avant le point passe presque inaperçu. On peut observer que miraculeusement il y a deux P à approche.

L'auteur de la phrase les a peut-être écrits spontanément, à moins que le correcteur d'orthographe soit intervenu, ce qui ne serait contradictoire avec aucune des autres fautes, si je ne me trompe.

[Claude]

Non, vous ne vous trompez pas. J'ai testé une phrase sous Word orientée sur Noël : « Le jour de noël approche ». Aucune faute n'a été relevée. Le correcteur doit connaître le noël qui est un chant ; le contexte ne l'intéresse donc pas.

[Ernest de la Coquecigrue]

Non, vous ne vous trompez pas. J'ai testé une phrase sous Word orientée sur Noël : « Le jour de noël approche ». Aucune faute n'a été relevée. Le correcteur doit connaître le noël qui est un chant ; le contexte ne l'intéresse donc pas.

Un correcteur plus puissant, tel qu'Antidote, ne se fait pas avoir.
   

[Claude]

Merci pour ce précieux antidote qu'est Antidote !
Je retiens ce correcteur.

[André (G., R.)]

Il me semble voir un cas de majusculite dans prune d'Ente, mais je n'en suis pas totalement certain, du fait de la persistance de cette graphie que j'observe depuis des lustres.
Ente (nom féminin) est apparenté à enter, qui signifie greffer. Il ne figure jamais dans les dictionnaires que parmi les noms communs. Le Larousse y voit un vieux synonyme de greffe ; le Robert DHLF le définit bizarrement ainsi : terme technique, désigne (v. 1140) un arbre greffé (d'où prune d'ente «pruneau») et équivaut à «greffe». Une ente serait-elle aussi un arbre ?

[Jacques]

Même si on considère qu'il s'agit d'un nom d'espèce, la majuscule est-elle obligatoire ? N'écrit-on pas poire williams ? Je n'en sais rien. Il y a aussi une autre possibilité : les botanistes ont l'habitude de mettre des majuscules aux noms de plantes.

[André (G., R.)]

La williams tient son nom de celui de la personne qui l'a fait connaître. Or malgré cela le mot ne prend pas de majuscule. Il se passe pour elle la même chose que pour le chateaubriand (tranche de viande) et les grands crus (un châteauneuf-du-pape). Donc l'ente mérite, si je puis dire, encore moins la majuscule que le chateaubriand, puisque l'on ne trouve derrière ce mot rien de comparable à Williams ou Chateaubriand. Peut-être la botanique est-elle effectivement à l'origine d'Ente, mais alors dans sa logique il faudrait écrire Prunier d'Ente, Poirier Williams... Mon correcteur d'orthographe refuse châteauneuf-du-pape sans majuscules, il accepte aussi bien prune d'ente que prune d'Ente. Une part de mystère me semble subsister pour ces mots.