Nouveaux verbes pronominaux
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Nouveaux verbes pronominaux
Sur un réseau social, sous la plume ou dans la bouche d'une femme politique connue : Dans les banlieues, la situation s'est empirée.
D'où vient cette mode consistant à rendre pronominaux des verbes qui ne le sont pas traditionnellement, donc à se compliquer la vie ? Je pense aussi à « se finir » ; je suis même à peu près sûr d'avoir rencontré « se commencer ».
D'où vient cette mode consistant à rendre pronominaux des verbes qui ne le sont pas traditionnellement, donc à se compliquer la vie ? Je pense aussi à « se finir » ; je suis même à peu près sûr d'avoir rencontré « se commencer ».
Eh bien, l'on peut dire que cette personne suit le dictionnaire de l'Académie
:
![[rigole] :lol:](./images/smilies/icon_lol.gif)
http://www.cnrtl.fr/definition/academie9/empirer☆3. V. pron. Devenir pire. Leur situation s'empirait inexorablement.
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Le CNRTL a-t-il quelque chose à voir avec l'Académie ?
En tout cas, merci de cette information, qui est une surprise pour moi : j'ignorais cet emploi pronominal, que le Larousse n'atteste pas. Mais je viens de trouver « s'empirer » aussi dans le Robert en six volumes. Quoi qu'il en soit, ne ressentant aucune différence de sens entre s'empirer et empirer intransitif, j'éviterai l'emploi pronominal.
En tout cas, merci de cette information, qui est une surprise pour moi : j'ignorais cet emploi pronominal, que le Larousse n'atteste pas. Mais je viens de trouver « s'empirer » aussi dans le Robert en six volumes. Quoi qu'il en soit, ne ressentant aucune différence de sens entre s'empirer et empirer intransitif, j'éviterai l'emploi pronominal.
Vous ferez bien. Malgré la caution de l'Académie, l'emploi pronominal n'est pas toujours bien vu :
http://parler-francais.eklablog.com/empirer-a5642118
Le portail du CNRTL permet un accès commode à des versions électroniques de différents dictionnaires, dont trois éditions (4e, 8e, 9e) du Dictionnaire de l'Académie. Mais ce n'est pas lié directement à l'Académie. Il donne aussi accès à la version électronique du TLF.
http://parler-francais.eklablog.com/empirer-a5642118
Le portail du CNRTL permet un accès commode à des versions électroniques de différents dictionnaires, dont trois éditions (4e, 8e, 9e) du Dictionnaire de l'Académie. Mais ce n'est pas lié directement à l'Académie. Il donne aussi accès à la version électronique du TLF.
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D'ailleurs, je lis dans le Robert DHLF à l'entrée PIRE :
EMPIRER [...] Le verbe, d'abord attesté au participe passé ampairet (sic) (v. 1050), a eu un emploi transitif pour «rendre pire», encore employé dans un style littéraire. Il est resté courant au sens intransitif de «devenir pire» (v. 1155), qui a pratiquement supplanté la forme pronominale s'empirer (mots mis en gras par moi).
Je me demande si la femme politique dont j'ai parlé est au courant de cela ou subit l'influence de « se finir », mais je penche pour la seconde possibilité.
EMPIRER [...] Le verbe, d'abord attesté au participe passé ampairet (sic) (v. 1050), a eu un emploi transitif pour «rendre pire», encore employé dans un style littéraire. Il est resté courant au sens intransitif de «devenir pire» (v. 1155), qui a pratiquement supplanté la forme pronominale s'empirer (mots mis en gras par moi).
Je me demande si la femme politique dont j'ai parlé est au courant de cela ou subit l'influence de « se finir », mais je penche pour la seconde possibilité.
Je parierais volontiers pour cette hypothèse, mais il n'empêche, le tour est correct. D'ailleurs, la dame a pu consulter Littré, plutôt que l'Académie !
Il y aurait une étude de fond à faire sur les verbes pronominaux inhabituels. Elle a été probablement déjà faite.
J'ai remarqué chez des amis anglophones parlant presque parfaitement le français la tendance à pronominaliser certains verbes comme exploser, éclater ; ils disent la bombe s'est éclatée, la bombe s'est explosée, au lieu de la bombe a éclaté, la bombe a explosé.
Il est bien possible qu'une tendance analogue existe chez les francophones de naissance.
Je suis personnellement très indulgent pour "se finir", pour deux raisons. La première est que je le dis couramment, et qu'on a facilement l'impression que ce qu'on dit n'est pas fautif ! La seconde est que je pense effectivement que ce n'est pas fautif, malgré ce qu'en disent certains grammairiens trop rigoristes.
Là encore, l'Académie me protège :
Ajoutons-y Littré :
https://www.littre.org/definition/empirerS'empirer, v. réfl. Devenir pire.
"Leur état allait s'empirant", [Bossuet, Hist. II, 1]
"Tout a réussi contre nos pensées, et telle est sa dépravation [de l'âme d'un mourant] qu'elle s'est empirée parmi nos remèdes", [Bossuet, Impénit. 3]
Il y aurait une étude de fond à faire sur les verbes pronominaux inhabituels. Elle a été probablement déjà faite.
J'ai remarqué chez des amis anglophones parlant presque parfaitement le français la tendance à pronominaliser certains verbes comme exploser, éclater ; ils disent la bombe s'est éclatée, la bombe s'est explosée, au lieu de la bombe a éclaté, la bombe a explosé.
Il est bien possible qu'une tendance analogue existe chez les francophones de naissance.
Je suis personnellement très indulgent pour "se finir", pour deux raisons. La première est que je le dis couramment, et qu'on a facilement l'impression que ce qu'on dit n'est pas fautif ! La seconde est que je pense effectivement que ce n'est pas fautif, malgré ce qu'en disent certains grammairiens trop rigoristes.
Là encore, l'Académie me protège :
http://www.cnrtl.fr/definition/academie9/finirIl serait temps que ces bavardages finissent ou se finissent.
Ajoutons-y Littré :
https://www.littre.org/definition/finirSe finir, v. réfl. Prendre fin, cesser.
"Là est le terme du voyage ; là se finissent les gémissements ; là s'achève le travail de la foi", [Bossuet, le Tellier.]
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Ce qui me gêne dans « se finir » employé au lieu de « finir » intransitif est :
• sa prolifération actuelle,
• la complication inutile et
• la confusion avec le passif à forme pronominale. Tous les romans d'X se commençaient dans la joie, s'écrivaient de nuit et se finissaient dans la douleur (Les romans d'X étaient commencés [par lui] dans la joie, écrits [par lui) de nuit et finis [par lui] dans la douleur). La douleur dans laquelle se finit un roman est pour moi celle de son auteur, tandis que s'il s'agit du contenu du roman, je parlerai de la douleur dans laquelle il se termine.
• sa prolifération actuelle,
• la complication inutile et
• la confusion avec le passif à forme pronominale. Tous les romans d'X se commençaient dans la joie, s'écrivaient de nuit et se finissaient dans la douleur (Les romans d'X étaient commencés [par lui] dans la joie, écrits [par lui) de nuit et finis [par lui] dans la douleur). La douleur dans laquelle se finit un roman est pour moi celle de son auteur, tandis que s'il s'agit du contenu du roman, je parlerai de la douleur dans laquelle il se termine.
J'ai peine à voir une complication dans le simple ajout de "se" ! Ou bien légère, vraiment. Plus important est le coté expressif que certains auteurs y trouvent. Au XIXe, siècle, les pronominalisations tournaient à la manie chez certains auteurs : Flaubert (s'alterner, se bomber, se diminuer...) et évidemment Huysmans (s'illimiter, s'inachever, s'inanimer...)
https://books.google.fr/books?id=BTRP8N ... &q&f=false
Il est évident qu'on est là dans une exagération qui peut convenir à l'écrivain et à son style, mais qu'il vaut mieux éviter en temps normal !
https://books.google.fr/books?id=BTRP8N ... &q&f=false
Il est évident qu'on est là dans une exagération qui peut convenir à l'écrivain et à son style, mais qu'il vaut mieux éviter en temps normal !
- Yeva Agetuya
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- Inscription : lun. 22 juin 2015, 1:43
Il est vrai que l'on dira "Son intervention a compliqué les choses" plutôt que "Son intervention a empiré les choses" qui serait plus net si l'on veut souligner une dégradation de la situation.
Quant à "finir", "achever" et "terminer" sont plus nets :
J'achève mon travail tandis que la journée s'achève.
Je termine mon travail tandis que la journée se termine.
Je finis mon travail tandis que la journée finit.
Quant à "finir", "achever" et "terminer" sont plus nets :
J'achève mon travail tandis que la journée s'achève.
Je termine mon travail tandis que la journée se termine.
Je finis mon travail tandis que la journée finit.
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La netteté dont vous parlez réside, je crois, dans le fait que terminer et achever sont uniquement transitifs, tandis que finir s'emploie aussi intransitivement : « Mon voyage finit mieux qu'il a commencé » vaut « Mon voyage se termine mieux... » ou « Mon voyage s'achève mieux... », alors que « J'achève mon voyage », « Je termine mon voyage » et « Je finis mon voyage » sont à peu près synonymes.
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
J'ai l'impression que la langue populaire aime les verbes pronominaux : je pense aussi à « se bouger », « s'écouter (un vieux vinyle) »..., où le pronom réfléchi est inutile, et à « s'exploser », où l'on a affaire à un autre phénomène, inverse en quelque sorte, la suppression du semi-auxiliaire du factitif, faire, mais avec une conséquence identique, la pronominalisation d'un verbe normalement non pronominal.
On connaît la propension des Méridionaux à l'emploi de réfléchis : « Je me suis mangé une bouillabaisse... ! ». « S'écouter (un vieux vinyle) » subit peut-être cette influence.
On connaît la propension des Méridionaux à l'emploi de réfléchis : « Je me suis mangé une bouillabaisse... ! ». « S'écouter (un vieux vinyle) » subit peut-être cette influence.
- Jacques-André-Albert
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- Inscription : dim. 01 févr. 2009, 8:57
- Localisation : Niort
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Ah oui, le fameux « se prendre » !
Vous m'avez signalé récemment, à juste titre, à propos de mon « François 1er », que c'était la numérotation romaine qui convenait. Peut-être ne verrez-vous pas d'inconvénient à ce que je vous dise préférer voir des virgules dans ces phrases : en leur absence, « tandis que » m'y paraît synonyme de « au moment où ».Yeva Agetuya a écrit :J'achève mon travail tandis que la journée s'achève.
Je termine mon travail tandis que la journée se termine.
Je finis mon travail tandis que la journée finit.
Avec "se manger" ou "se boire", l'usage n'est pas seulement méridional effectivement. Il est très courant à Paris et probablement dans toute la France.
Il a un caractère plutôt populaire, comme observé généralement :
https://books.google.fr/books?id=gKhYDw ... &q&f=false
https://books.google.fr/books?id=VWmOCg ... &q&f=false
La question revient assez souvent sur les forums de langue :
http://www.languefrancaise.net/forum/vi ... p?id=12550
https://forum.wordreference.com/threads ... 105/?hl=fr
Ces usages où le rôle du pronom me semble assez proche du datif d'intérêt me paraissent assez différents de "s'exploser" où je vois une véritable transformation en verbe pronominal.
Il a un caractère plutôt populaire, comme observé généralement :
https://books.google.fr/books?id=gKhYDw ... &q&f=false
https://books.google.fr/books?id=VWmOCg ... &q&f=false
La question revient assez souvent sur les forums de langue :
http://www.languefrancaise.net/forum/vi ... p?id=12550
https://forum.wordreference.com/threads ... 105/?hl=fr
Ces usages où le rôle du pronom me semble assez proche du datif d'intérêt me paraissent assez différents de "s'exploser" où je vois une véritable transformation en verbe pronominal.
- Yeva Agetuya
- Messages : 2538
- Inscription : lun. 22 juin 2015, 1:43
Oui, et je ne vois pas où est le problème.André (G., R.) a écrit :Peut-être ne verrez-vous pas d'inconvénient à ce que je vous dise préférer voir des virgules dans ces phrases : en leur absence, « tandis que » m'y paraît synonyme de « au moment où ».