L'a dit ? L'a pas dit ?
- Jacques
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L'a dit ? L'a pas dit ?
C’est le plus français de tous les mots. Je ne peux pourtant pas l’écrire ici : le filtre de censure s’y oppose. Tenez, j’essaye : glup, glup, glup !
Le vicomte Pierre Cambronne a-t-il réellement lancé ce mot volontiers associé à son nom ? L’intéressé a toujours laissé planer une incertitude qui l’arrangeait : l’anecdote lui conférait une célébrité qui ne pouvait se refuser. Le général, emprisonné, se taillait sa part de succès en racontant à ses camarades de détention la scène où, disait-il, poussé à l’exaspération par l’insolence d’un officier anglais, il lui montra son postérieur en criant sa fameuse réplique.
Venu du latin vulgaire sous une forme à peine altérée (le a final s’est mué en e), ce n’était à l’origine qu’un nom commun, avec le même sens matériel qu’aujourd’hui. Il semblerait qu’il apparut pour la première fois au XIIe siècle, dans le Roman de Renart. En l’utilisant comme interjection, on lui fait exprimer des sentiments de natures diverses : agacement, dépit, colère, impatience, exaspération, étonnement, admiration, incrédulité… L’Académie française n’hésita pas à l’inscrire dans la première édition de son dictionnaire, en 1694. Mais dans la deuxième (1718) elle ajoute prudemment : Les honnestes gens evitent avec soin d'employer ce mot dans la conversation.
Hugo fut vilipendé pour l’avoir écrit dans son roman Les Misérables.
Et le grand Victor de répliquer : « L’homme qui a gagné la bataille de Waterloo, c’est Cambronne. Foudroyer d’un tel mot le tonnerre qui vous tue, c’est vaincre. » Il ajoutait : « Son mot entrait de droit dans mon livre. C’est le misérable des mots. » Mais Tristan Bernard exprimait avec humour une autre opinion :
Cambronne, on y songe avec peine
Ne s’est pas montré bien français
En criant aux Anglais le mot qui porte veine :
C’était fatalement assurer leur succès !
Ce qui est historiquement certain, c’est qu’un autre grand homme l’a bel et bien envoyé à la tête de l’un de ses ministres : personnage retors, Talleyrand, après avoir conquis tous les honneurs aux côtés de Napoléon, n’hésita pas à le trahir et à comploter contre lui quand il tomba en disgrâce. Le 28 janvier 1809, en conseil des ministres, Bonaparte entra dans une violente colère, l’abreuvant d’injures et terminant par cette invective qui devait rester à jamais attachée au nom de l’évêque d’Autun : « Vous n’êtes que de la [m…] dans un bas de soie ! »
Le vicomte Pierre Cambronne a-t-il réellement lancé ce mot volontiers associé à son nom ? L’intéressé a toujours laissé planer une incertitude qui l’arrangeait : l’anecdote lui conférait une célébrité qui ne pouvait se refuser. Le général, emprisonné, se taillait sa part de succès en racontant à ses camarades de détention la scène où, disait-il, poussé à l’exaspération par l’insolence d’un officier anglais, il lui montra son postérieur en criant sa fameuse réplique.
Venu du latin vulgaire sous une forme à peine altérée (le a final s’est mué en e), ce n’était à l’origine qu’un nom commun, avec le même sens matériel qu’aujourd’hui. Il semblerait qu’il apparut pour la première fois au XIIe siècle, dans le Roman de Renart. En l’utilisant comme interjection, on lui fait exprimer des sentiments de natures diverses : agacement, dépit, colère, impatience, exaspération, étonnement, admiration, incrédulité… L’Académie française n’hésita pas à l’inscrire dans la première édition de son dictionnaire, en 1694. Mais dans la deuxième (1718) elle ajoute prudemment : Les honnestes gens evitent avec soin d'employer ce mot dans la conversation.
Hugo fut vilipendé pour l’avoir écrit dans son roman Les Misérables.
Et le grand Victor de répliquer : « L’homme qui a gagné la bataille de Waterloo, c’est Cambronne. Foudroyer d’un tel mot le tonnerre qui vous tue, c’est vaincre. » Il ajoutait : « Son mot entrait de droit dans mon livre. C’est le misérable des mots. » Mais Tristan Bernard exprimait avec humour une autre opinion :
Cambronne, on y songe avec peine
Ne s’est pas montré bien français
En criant aux Anglais le mot qui porte veine :
C’était fatalement assurer leur succès !
Ce qui est historiquement certain, c’est qu’un autre grand homme l’a bel et bien envoyé à la tête de l’un de ses ministres : personnage retors, Talleyrand, après avoir conquis tous les honneurs aux côtés de Napoléon, n’hésita pas à le trahir et à comploter contre lui quand il tomba en disgrâce. Le 28 janvier 1809, en conseil des ministres, Bonaparte entra dans une violente colère, l’abreuvant d’injures et terminant par cette invective qui devait rester à jamais attachée au nom de l’évêque d’Autun : « Vous n’êtes que de la [m…] dans un bas de soie ! »
Dernière modification par Jacques le sam. 20 avr. 2013, 13:32, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Très belle évocation.
À Nantes, où il est né et mort, Cambronne n’est pas si souvent mentionné pour son mot, qui n’en est pas ignoré pour autant ! Ses faits de guerre viennent d’abord à l’esprit, sans qu’on les connaisse dans le détail, et l’on sait que sur le cours Cambronne habitent des Nantais qui ne sont pas les plus pauvres !
Est-ce que le mot de notre général ne passerait pas à travers les mailles du filet si on en séparait les lettres par un trait d’union ?
À Nantes, où il est né et mort, Cambronne n’est pas si souvent mentionné pour son mot, qui n’en est pas ignoré pour autant ! Ses faits de guerre viennent d’abord à l’esprit, sans qu’on les connaisse dans le détail, et l’on sait que sur le cours Cambronne habitent des Nantais qui ne sont pas les plus pauvres !
Est-ce que le mot de notre général ne passerait pas à travers les mailles du filet si on en séparait les lettres par un trait d’union ?
- Jacques-André-Albert
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- Jacques
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Bien sûr, il y a des astuces, mais n'en disons pas trop. Ce n'est pas par pudibonderie que nous filtrons, mais il est arrivé plusieurs fois que des gens se laissent aller à utiliser des termes très vulgaires ou obscènes. Nous devions éditer les messages, remplacer les mots condamnés par des astérisques et faire une remarque sur l'emploi du vocabulaire. Le filtre coupe court à ces écarts.André (Georges, Raymond) a écrit :Est-ce que le mot de notre général ne passerait pas à travers les mailles du filet si on en séparait les lettres par un trait d’union ?
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- Jacques
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Je ne m'en souvenais pas.
Il y a aussi la réplique de Marius dans la trilogie de Pagnol :
Vous savez ce qu'elle vous dit la marine française, monsieur Brun ? la marine française, elle vous dit...
Certains d'entre nous se souviendront de Marie-José Neuville, « la collégienne de la chanson » ; elle en avait écrit une sur le sujet :
À Waterloo il commandait
Un carré de la vieille garde ;
Il était d'une humeur gaillarde
Cet officier au franc parler.
Aux hommes d'un corps diplomatique
De se rendre venus le sommer
Fit une réponse télégraphique
Qu'attendait la postérité (bis)
.................
Et la fin :
Et pour remercier son héros
La douce France polissonne
A fait une station de métro
Au nom du général Cambronne (bis)
Il y a aussi la réplique de Marius dans la trilogie de Pagnol :
Vous savez ce qu'elle vous dit la marine française, monsieur Brun ? la marine française, elle vous dit...
Certains d'entre nous se souviendront de Marie-José Neuville, « la collégienne de la chanson » ; elle en avait écrit une sur le sujet :
À Waterloo il commandait
Un carré de la vieille garde ;
Il était d'une humeur gaillarde
Cet officier au franc parler.
Aux hommes d'un corps diplomatique
De se rendre venus le sommer
Fit une réponse télégraphique
Qu'attendait la postérité (bis)
.................
Et la fin :
Et pour remercier son héros
La douce France polissonne
A fait une station de métro
Au nom du général Cambronne (bis)
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- Claude
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Re: L'a dit ? l'a pas dit ?
Talleyrand, une fois que l'Empereur fut sorti, dit aux témoins de l'altercation : « Quel dommage, Messieurs, qu'un si grand homme soit si mal élevé ! »Jacques a écrit :[...] Le 28 janvier 1809, en conseil des ministres, Bonaparte entra dans une violente colère, l’abreuvant d’injures et terminant par cette invective qui devait rester à jamais attachée au nom de l’évêque d’Autun : « Vous n’êtes que de la [m…] dans un bas de soie ! »
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Dans Un clair de lune à Maubeuge, Bourvil chante le couplet ci-dessous. Je me suis toujours demandé si le dernier vers ne comportait pas un jeu de mots… J'ai peut-être l'esprit mal tourné !
J'ai fait toutes les bêtises
Qu'on peut imaginer
J'en ai fait à ma guise
Et aussi à Cambrai
Je connais toutes les mers
La mer rouge la mer nouère
La mer diterrannée
La mer de Charles Trenet
J'ai fait toutes les bêtises
Qu'on peut imaginer
J'en ai fait à ma guise
Et aussi à Cambrai
Je connais toutes les mers
La mer rouge la mer nouère
La mer diterrannée
La mer de Charles Trenet
- Jacques
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Je ne crois pas. La mer de Charles Trenet c'était la chanson fétiche du « fou chantant ».
L'humour de Bourvil ne portait pas sur des jeux de mots salaces ou osés.
C'étaient assez souvent des petites plaisanteries au premier degré un peu naïves. C'est ce qui est étonnant : il a débuté en chantant des chansonnettes bêbêtes et en jouant des rôles de benêt. Quand il a commencé à jouer des rôles « dramatiques », il a révélé un talent de grande dimension. Il était poignant.
L'humour de Bourvil ne portait pas sur des jeux de mots salaces ou osés.
C'étaient assez souvent des petites plaisanteries au premier degré un peu naïves. C'est ce qui est étonnant : il a débuté en chantant des chansonnettes bêbêtes et en jouant des rôles de benêt. Quand il a commencé à jouer des rôles « dramatiques », il a révélé un talent de grande dimension. Il était poignant.
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Poignant, il l’est aussi dans son dernier film, Le cercle rouge, de Jean-Pierre Melville, pour son rôle et pour la conscience qu’il a alors que ce sera le dernier. Bizarrement Bourvil nous ramène dans la ville natale de Cambronne, dont l’un des conseillers municipaux, Dominique Raimbourg, est son fils.
- Jacques
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Oui, pathétique et minable à la fois. Dans ce film aussi où il interprétait le rôle d'un juge, et Delon celui d'un délinquant. Ses personnages avaient une intensité et une véracité extraordinaires, car il savait créer des émotions et façonner des caractères.Claude a écrit :Dans Le miroir à deux faces par exemple.Jacques a écrit :[...]Quand il a commencé à jouer des rôles « dramatiques », il a révélé un talent de grande dimension. Il était poignant.
Le Cercle rouge, c'est peut-être le point culminant de son talent. Je suis ému rien qu'en l'évoquant. Et quel courage il a eu !
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- Klausinski
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- Inscription : mar. 12 déc. 2006, 23:54
- Localisation : Aude
Je vois que ce sujet en inspire beaucoup. Votre présentation est admirable, Jacques. La référence à Bourvil et à la mer de Charles Trenet me fait penser à une chanson de Brassens, « Tempête dans un bénitier ». Brassens ose une rime quelque peu sacrilège :
Ô très Sainte Marie mère de
Dieu, dites à ces p…
De moines qu'ils nous emm…
Sans le latin.
Ô très Sainte Marie mère de
Dieu, dites à ces p…
De moines qu'ils nous emm…
Sans le latin.
« J’écris autrement que je ne parle, je parle autrement que je ne pense, je pense autrement que je ne devrais penser, et ainsi jusqu’au plus profond de l’obscurité. »
(Kafka, cité par Mauriac)
(Kafka, cité par Mauriac)
- Jacques
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- Inscription : sam. 11 juin 2005, 8:07
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Et cette célèbre chanson (bretonne je crois) :
Au trente et un du mois d'a-oût, (bis)
....
Refrain :
Buvons un coup, buvons-en deux
À la santé des amoureux,
À la santé du roi de France.
Et m... pour le roi d'Angleterre
Qui nous a déclaré la guerre
Au trente et un du mois d'a-oût, (bis)
....
Refrain :
Buvons un coup, buvons-en deux
À la santé des amoureux,
À la santé du roi de France.
Et m... pour le roi d'Angleterre
Qui nous a déclaré la guerre
Dernière modification par Jacques le sam. 20 avr. 2013, 16:22, modifié 1 fois.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).