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Lleolyn
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Message par Lleolyn »

Bonsoir ! :)

Cela fait un petit moment que je ne suis pas venue, mais j'ai été assez occupée ces derniers temps ! Cependant, je ne reviens pas les mains vides car j'ai une petite question à vous soumettre. :)

Le pronom Y permet de remplacer des noms non animés.
Toutefois la phrase suivante : "Je donne un coup de peinture à la porte" sera transformée en "je le lui donne".

Est-ce parce que "la porte" ici n'est pas un COI mais un COS ?

Dernière chose, comment analyseriez-vous le "y" dans la locution "il y a" ? Le considérer comme un pronom qui remplacerait un complément de lieu me semble parfois redondant. C'est par exemple le cas, à mon sens, dans la phrase "il y a un chat dans le garage".

Merci à vous. :D
André (G., R.)
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Message par André (G., R.) »

« À la porte » est un datif, un COIS, du fait du verbe « donner », et doit bien, me semble-t-il, être remplacé par « lui ». Si c’était un complément de lieu, il faudrait le remplacer par « y » :
« Tu as été mis à la porte ?
— Oui, j’y ai vraiment été mis. »
Par contre, « un coup de peinture » doit devenir « en… un » et non « le » : « Je lui en donne un ».
À cette même rubrique « Grammaire, conjugaison et syntaxe » le fil COD D’ « IL Y A » ? ne traite bizarrement pas la fonction du pronom « y ». Difficile d'y voir autre chose qu'un complément de lieu. Mais difficile aussi de séparer les éléments de la tournure.
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Jacques
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Message par Jacques »

La subtilité avec Y c'est qu'il est, selon les circonstances, soit adverbe soit pronom.
– À quoi lui sert cette remise ? Il y entrepose du bois. Adverbe complément de lieu (il entrepose là) ;
– Avez-vous l'intention de repeindre cette porte ? Oui, j'y pense. Pronom (je pense à cela).
Ne pourrions-nous pas considérer il y a comme une locution verbale ?
On n'analyse pas les termes d'une locution verbale. Si on veut essayer, il faudra admettre que Y est adverbe de lieu : il (pronom impersonnel) a (existe, se trouve) y adverbe (là).
Mais cette analyse n'a pas grand sens dans la réalité, car il y a est devenu une abstraction, et ne mentionne pas forcément l'existence de quelque chose situé quelque part.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Hippocampe
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Message par Hippocampe »

Jacques:
"Ne pourrions-nous pas considérer il y a comme une locution verbale ?"

Il me paraît que ça vaut mieux. "Il y a" me semble être une bizarrerie que l'histoire de notre langue nous a transmise telle quelle.
Son sens est global et ne s'explique pas par ceux des mots qui la composent.

Savez-vous, je m'adresse aux piliers de notre cher forum, quand cet "il y a" est apparu et ce qu'il avait comme ancêtres ?

Cette expression est à comprendre globalement mais n'est pas pour autant figée: il y aura, il y avait, et le banal "qu'il y eût eu".

Ça me fait penser à une autre expression tellement banale qu'un enfant de quatre an la connaît mais qui est dure à expliquer à des étrangers :
qu'est-ce que c'est ?
ou mieux :
qu'est-ce que c'est que ça ?
(amusez-vous à traduire cette dernière expression mot à mot en anglais puis dites à un Anglais que c'est comme ça que nous parlons par chez nous autres; ou... en russe... à un Russe... ou....

L'un ou l'autre pilier connaît-il la genèse de ce... est-ce un gallicisme ?

Dans le série des bizarreries banales, trouve-t-on d'autres amusements ?


PS:
Ce n'est pas pour me vanter mais aujourd’hui il fait vraiment beau.
Car le feu s'est éteint, les oiseaux se sont tus et Ceinwen est partie.
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Jacques
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Message par Jacques »

Je donne un embryon de réponse ; qu'est-ce que c'est ? est une tournure familière. Dans la langue soignée on dit Qu'est-ce ?
Je crois que c'est dans Cyrano de Bergerac : Un baiser, mais à tout prendre qu'est-ce ?
Il doit bien y avoir d'autres de ces formules de type populaire.
Le Dictionnaire historique de la lange française confirme que il y a est une expression non analysable. Elle serait apparue en français en l'an 1040. C'est donc un idiotisme, et plus précisément un gallicisme. L'origine et la genèse d'un grand nombre de ces expressions restent un mystère.
Dernière modification par Jacques le mer. 24 avr. 2013, 12:45, modifié 1 fois.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Je tente une explication, peut-être fausse, mais plausible : on serait parti de la désignation d'un bien appartenant à une personne précise ; par exemple « le sieur Guillaume a une maison à Paris », ce qui donne « il y a une maison ». L'expression se serait figée en devenant impersonnelle.

Simple hypothèse pour faire avancer la réflexion.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Hippocampe
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Message par Hippocampe »

JAA :
"faire avancer la réflexion."
Bonne idée.

"Il y a" se dit dans d'autres langues :

anglais :
there is ou there are
là est

allemand :
es gibt
il (neutre) donne
bizarre aussi

italien :
c'è
c'est ? (je ne parle pas l'italien)

espagnol :
hay
?

Le "il donne" allemand est sûrement à prendre globalement aussi.

Petite remarque pour faire avancer la réflexion.
Car le feu s'est éteint, les oiseaux se sont tus et Ceinwen est partie.
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Perkele
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Message par Perkele »

En italien : c'è = ci è = il y est
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Hippocampe
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Message par Hippocampe »

À tout prendre, "il y est" paraît plus logique qu'"il y a".

Quant à "il donne"...

Que peut vouloir dire "hay" en espagnol ?

Comment disait-on en latin ou en grec ancien ?

Comment dit-on en breton ? Je suis breton mais ne connais que quelques mots de cette langue. Je crois qu'il y a (c'est la cas de le dire) ici un pilier breton (un plus breton que moi, un qui parle).
Car le feu s'est éteint, les oiseaux se sont tus et Ceinwen est partie.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Hippocampe a écrit :Comment dit-on en breton ? Je suis breton mais ne connais que quelques mots de cette langue. Je crois qu'il y a (c'est la cas de le dire) ici un pilier breton (un plus breton que moi, un qui parle).
C'est le verbe être qui est utilisé en breton :
« eur bern traou zo », il y a un tas de choses (mot à mot : un tas choses est)
« amzer zo », il y a le temps (temps est).
De même au passé ou au futur : « amzer oa » « amzer vo ».

(je ne suis pas breton, mais j'ai appris cette langue sur le terrain et à l'université ; est-ce qu'on demande à un germaniste s'il est allemand, ou à un passionné de russe s'il est né à Moscou ou à Saint-Pétersbourg ?)
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Jacques
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Message par Jacques »

Jacques-André-Albert a écrit :(je ne suis pas breton, mais j'ai appris cette langue sur le terrain et à l'université ; est-ce qu'on demande à un germaniste s'il est allemand, ou à un passionné de russe s'il est né à Moscou ou à Saint-Pétersbourg ?)
La question me semble assez naturelle. En dehors des Bretons, y a-t-il beaucoup de gens qui s'intéressent à cette langue ? Je ne crois pas. Donc si vous parlez breton, il y a au moins 99,5% de chances pour que vous soyez de là-bas.
Dernière modification par Jacques le mer. 24 avr. 2013, 19:29, modifié 1 fois.
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

C'est une question qui peut sembler naturelle en France, où les langues minoritaires ont toujours été regardées avec un mépris que le gouvernement central a institutionnalisé sous la révolution.
Il n'en est pas de même dans d'autres pays. Les études celtiques sont une vieille tradition en Allemagne, et j'ai rencontré, en Irlande, des Allemands qui parlaient le gaélique.
Dernière modification par Jacques-André-Albert le mer. 24 avr. 2013, 21:19, modifié 1 fois.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Perkele
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Message par Perkele »

Merci la centralisation et Napoléon Bonaparte. :wink:
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Jacques
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Message par Jacques »

Je vais être très franc avec vous : je ne sais pas s'il y a du mépris envers les langues vernaculaires parlées sur le sol français, je ne les méprise pas mais elles ne m'intéressent pas. La langue du royaume d'abord, puis de la République, depuis François 1er c'est le français. C'est en français que doivent s'exprimer tous les citoyens de ce pays. Je n'accepte pas que dans les administrations alsaciennes on s'exprime en alsacien, que certaines inscriptions soient bilingues (et encore, parce que la loi a fini par imposer le français), que des fonctionnaires alsaciens s'adressent au public dans leur dialecte et pas dans la langue nationale. Je n'accepte pas les menées nationalistes de certains, qu'ils soient alsaciens, basques ou bretons. Ni les actes de terrorisme insulaires.
Nous sommes en France, parlons français. Un Breton m'a dit un jour : « Je suis breton d'abord et français ensuite, parce que je ne peux pas faire autrement ; on m'a imposé la nationalité française sans me demander mon avis ». Le culte de la langue celte favorise ce genre de raisonnement sécessionniste.
Bien entendu, vous n'êtes pas visé et cela ne doit pas vous empêcher de nous parler des particularités de cette langue en rapport avec nos discussions.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Votre réaction m'amène à préciser quelques points :
Jacques a écrit :La langue du royaume d'abord, puis de la République, depuis François 1er c'est le français.
La vérité, c'est que François Ier a voulu imposer le français face au latin dans les documents administratifs, ni plus, ni moins. Le multilinguisme de la France, qui commençait aux portes du palais royal, était un état de fait que personne, à l'époque, ne pouvait imaginer abolir.
Jacques a écrit :C'est en français que doivent s'exprimer tous les citoyens de ce pays.
C'est contraire à la liberté d'expression. Chacun est libre, dans sa sphère privée ou dans ses relations avec les autres, de s'exprimer dans la langue de son choix.
Jacques a écrit : Je n'accepte pas que dans les administrations alsaciennes on s'exprime en alsacien, que certaines inscriptions soient bilingues (et encore, parce que la loi a fini par imposer le français), que des fonctionnaires alsaciens s'adressent au public dans leur dialecte et pas dans la langue nationale.
Je pense qu'après des décennies de pressions de toute sorte sur les populations, de la négation de ce qu'ils avaient de plus intime, il était temps d'assouplir la position officielle. La langue maternelle est indissociable de l'histoire de chacun, est une part éminente de sa personnalité et de sa façon de penser et de sentir.
L'État français a été brutal et méprisant vis à vis de certains de ses concitoyens, allant jusqu'à nier l'existence d'autres langues que le français : dans les années 90, à l'hôpital de Brest, il était prévu, dans le dossier de chaque patient, une rubrique « langue maternelle », une reconnaissance pour les étrangers ou les immigrés. Mais les vieux bretonnants qui maniaient très mal le français n'avaient droit qu'à la mention « française » en face de « langue maternelle » (je le sais de source proche et sûre).
Jacques a écrit :Je n'accepte pas les menées nationalistes de certains, qu'ils soient alsaciens, basques ou bretons. Ni les actes de terrorisme insulaires.
Vous faites un raccourci simplificateur entre revendications linguistiques et terrorisme ; c'est ignorer les actions culturelles et festives, le travail de collecte auprès des anciens, les recherches universitaires, les soirées où les villageois se rencontrent pour échanger dans leur langue, tout cela majoritairement pacifique et la plupart du temps apolitique.
Jacques a écrit :Nous sommes en France, parlons français.
Vous avez raison : la connaissance généralisée du français dans le pays a permis les échanges, la facilité des déplacements.
Mais ce raisonnement, en étant un peu provocateur, je l'appliquerai au monde et à l'anglais, en prenant un exemple. Des investigateurs viennent d'être envoyés en Libye pour enquêter sur l'attentat contre l'ambassade de France. Nous pouvons nous féliciter de ce que tout le monde connaisse l'anglais pour permettre et faciliter ce genre de démarche.
Jacques a écrit :Bien entendu, vous n'êtes pas visé et cela ne doit pas vous empêcher de nous parler des particularités de cette langue en rapport avec nos discussions.
Personnellement, j'ai été confronté à la pauvreté d'une langue (le breton) pour l'expression de la pensée et des activités intellectuelles. Une grande langue de culture, c'est une langue qui s'est imposée dans tous les domaines de l'activité humaine, qui a pu créer une masse de documents de référence pour asseoir son développement.
Le français est une de ces langues qui permettent d'embrasser tous les aspects de la connaissance de l'homme et du monde. Pour autant, fallait-il pousser des millions de gens à se renier eux-mêmes dans ce qu'ils avaient de plus intime, le mode d'expression de leur être et d'échange avec leurs proches ?
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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