Ne me parlez plus de ma Môman !
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Ne me parlez plus de ma Môman !
C'est le titre d'un petit article dans mon quotidien. J'en parle ici parce qu'il ne concerne pas que la prononciation, mais aussi la stylistique et la grammaire. Le voici :
L'autre jour, un présentateur de France 3 interrogeait Lydie Salvayre sur son prix Goncourt, pour le livre Pas pleurer : « Vous l'avez écrit en pensant à votre maman ? » « Oui, à ma mère qui n'est plus là. » « Votre MAMAN qui parlait espagnol », insistait le journaliste. « Oui, ma MÈRE... », répliquait l'écrivaine de 66 ans, visiblement peu adepte de cette mode régressive qui pousse les adultes à parler comme un enfant de 7 ans, dès qu'il est question de nos géniteurs.
Dans les médias, au bureau, à la boulangerie... Doucereux : « Et votre Môman, ça va mieux ? » Affirmatif : « Papa ne pêche que du bar ! » L'emploi du mot père témoignerait-il d'un manque d'affection ? Pas d'accord. Comme beaucoup de gens, j'aime mes parents. Mais les jolis mots intimes de « papa » et de « maman », je les garde pour eux.
François CHRÉTIEN
Les passages en gras le sont dans le journal. Les mots notés en bleu par moi concernent des sujets qui nous sont chers.
Mais l'auteur de l'article ne tombe-t-il pas dans le travers qu'il dénonce en qualifiant « papa » et maman » de « jolis » mots ?
L'autre jour, un présentateur de France 3 interrogeait Lydie Salvayre sur son prix Goncourt, pour le livre Pas pleurer : « Vous l'avez écrit en pensant à votre maman ? » « Oui, à ma mère qui n'est plus là. » « Votre MAMAN qui parlait espagnol », insistait le journaliste. « Oui, ma MÈRE... », répliquait l'écrivaine de 66 ans, visiblement peu adepte de cette mode régressive qui pousse les adultes à parler comme un enfant de 7 ans, dès qu'il est question de nos géniteurs.
Dans les médias, au bureau, à la boulangerie... Doucereux : « Et votre Môman, ça va mieux ? » Affirmatif : « Papa ne pêche que du bar ! » L'emploi du mot père témoignerait-il d'un manque d'affection ? Pas d'accord. Comme beaucoup de gens, j'aime mes parents. Mais les jolis mots intimes de « papa » et de « maman », je les garde pour eux.
François CHRÉTIEN
Les passages en gras le sont dans le journal. Les mots notés en bleu par moi concernent des sujets qui nous sont chers.
Mais l'auteur de l'article ne tombe-t-il pas dans le travers qu'il dénonce en qualifiant « papa » et maman » de « jolis » mots ?
Dernière modification par André (G., R.) le mer. 12 nov. 2014, 13:29, modifié 1 fois.
- Jacques
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Nous posons le doigt sur quelque chose qui m'irrite au plus haut point. Père et mère ont l'air d'être, depuis quelques années, des mots à ne pas dire comme si, ainsi qu'exprimé ici, ils dénotaient un manque d'affection, une sécheresse de cœur.
Le fait est que papa et maman, qui jadis étaient spécifiquement enfantins, versent carrément dans l'infantilisme et la régression quand ils concernent une personne, par exemple, de 60 ans ou plus, qui parle ou à qui on parle de ses parents. Le mal se répand, je suis agacé de l'entendre dans la bouche de gens très largement adultes, eux-mêmes parents, voire grands-parents.
C'est déjà exaspérant, mais là où nous atteignons le comble de l'absurde, c'est qu'on les utilise couramment à propos des animaux. Qu'on les emploie dans une conversation avec un enfant de six ans soit, on se met alors à portée de son niveau de langage qui garde un côté affectueux. Mais parler à des adultes de la « maman ours » et du « papa lapin », de grâce arrêtez le massacre ! Cela me met sérieusement mal à l'aise.
Lorsque nous évoquons entre nous, mon frère et moi, ceux qui nous ont mis au monde tous les deux, nous disons papa et maman. Mais quand ils viennent dans la conversation avec ma femme, c'est « ma mère » et « mon père ». Il y a donc là un haut degré d'intimité.
Le fait est que papa et maman, qui jadis étaient spécifiquement enfantins, versent carrément dans l'infantilisme et la régression quand ils concernent une personne, par exemple, de 60 ans ou plus, qui parle ou à qui on parle de ses parents. Le mal se répand, je suis agacé de l'entendre dans la bouche de gens très largement adultes, eux-mêmes parents, voire grands-parents.
C'est déjà exaspérant, mais là où nous atteignons le comble de l'absurde, c'est qu'on les utilise couramment à propos des animaux. Qu'on les emploie dans une conversation avec un enfant de six ans soit, on se met alors à portée de son niveau de langage qui garde un côté affectueux. Mais parler à des adultes de la « maman ours » et du « papa lapin », de grâce arrêtez le massacre ! Cela me met sérieusement mal à l'aise.
Lorsque nous évoquons entre nous, mon frère et moi, ceux qui nous ont mis au monde tous les deux, nous disons papa et maman. Mais quand ils viennent dans la conversation avec ma femme, c'est « ma mère » et « mon père ». Il y a donc là un haut degré d'intimité.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques-André-Albert
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J'abonde dans votre sens à tous les deux. L'utilisation par et envers des adultes des mots papa et maman relève de l'infantilisme et de l'infantilisation et frise le ridicule.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Jacques-André-Albert
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Difficile de ne pas parler du sketch de Raymond Devos.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Quelle merveille ! Quelle maîtrise des mots !Jacques-André-Albert a écrit :Difficile de ne pas parler du sketch de Raymond Devos.