J'ai lu récemment plusieurs tomes de l'histoire de la Révolution et de l'Empire par l'historien Louis Madelin (1871 - 1956)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Madelin
Je note que cet auteur plutôt conservateur affectionne la graphie "ce pendant" qu'il emploie régulièrement là où tout le monde l'écrit en un mot soudé. Ces ouvrages datent des années 1920 et 1930. Quelle fut l'évolution de ce mot et depuis quand faut-il voir une position quelque peu originale à l'écrire comme Madelin ?
(A noter que cet auteur très pudique à la fois aime à rapporter les gros mots des grands hommes et ne le faire qu'avec force points de suspension, mais, observation amusante... perd sa pudeur s'il pense ne s'adresser qu'à des lecteurs savants : ainsi quand Bonaparte s'exclame "que coglione !" à propos de Louis XVI, Madelin l'écrit en toutes lettres alors qu'il se serait coupé un bras plutôt que de le retranscrire en français si Bonaparte l'avait dit en français.)
D'un apparent archaïsme de bon goût
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Re: D'un apparent archaïsme de bon goût
TLFi :jarnicoton a écrit :Je note que cet auteur plutôt conservateur affectionne la graphie "ce pendant" qu'il emploie régulièrement là où tout le monde l'écrit en un mot soudé. Ces ouvrages datent des années 1920 et 1930. Quelle fut l'évolution de ce mot et depuis quand faut-il voir une position quelque peu originale à l'écrire comme Madelin ?
Parfois, on trouve, au lieu de la forme soudée du mot, ce pendant (que), toujours au sens temporel. 1. Comme adv. : Ce pendant, le poète avait déplié un de ses petits papiers, et il lisait (Miomandre, Écrit sur de l'eau, 1908, p. 154). [Henriette] Bonjour, vous deux! Bonjour ma chérie! [Gabrielle] Comment vas-tu, ma chérie? Ce pendant elles s'embrassent (Bernstein, Le Secret, 1913, I, 4, p. 6). 2. Comme loc. conj. a) En poésie : Certes, sa peine est forte, et rude est sa navrure, De n'ouïr plus chanter la céleste serrure, Ce, pendant qu'Astaroth et Mammon, très contents, Ouvrent la flamboyante issue à deux battants, Et que, la crosse au poing, dans les obédiences, Le prince des damnés donne ses audiences! (Leconte de Lisle, Poèmes barbares, Les Paraboles de Dom Guy, 1878, p. 324). Et beaucoup, aimantés par cet appel propice, Perclus, entrent dans l'eau comme on entre à l'hospice, Puis meurent. L'eau les lave et les ensevelit Dans ses courants aussi frais que de fines toiles; Et c'est enfin vraiment pour eux la bonne mort. Ce pendant que, le soir, autour du corps qui dort, L'eau noire allume un grand catafalque d'étoiles (Rodenbach, Le Règne du silence, Le Cœur de l'eau, 1891, p. 63). Mais, ce pendant que votre main cruelle et sûre, Sûre et cruelle fait vibrer dans ma blessure L'inexorable trait, ma Dame, ma Douleur, Il faut que je vous loue et que je vous célèbre, Et que je tresse la gemme rare et la fleur Dans vos cheveux qui sont couleur de la ténèbre (Moréas, Les Cantilènes, Funérailles, Pleurer, 1886, p. 108). b) En prose : Il serra la main des deux hommes en leur souhaitant bon voyage et il s'en revint à ses lares, ce pendant que La Guillaumette, point dupe de cette comédie grossière, faisait siffler entre ses dents serrées le mot de situation : − Va donc, eh vache! (Courteline, Le Train de 8 h 47, 1888, I, 7, p. 87). Malgré que je ne goûtasse que médiocrement l'ironie tant soit peu insistante du Napolitain, j'estimai honnête de dissimuler sous un vague sourire le dépit que j'en ressentais; ce pendant que le traître Pinamonte (...) poursuivait son récit en ces termes... (Milosz, L'Amoureuse initiation, 1910, p. 47). Des consommations passent au-dessus de votre tête, ce pendant que la machine à faire des javas et même des rumbas trompette et piétine, pareille à une batteuse (Fargue, Le Piéton de Paris, 1939, p. 134).
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L'histoire de la préposition pendant est intéressante. C'est sur FNBL que j'ai découvert sa parenté avec pendre, dans le sens être en suspens, être en instance. Je crois avoir compris que « pendant un mois » a été précédé de « un mois pendant », dans le sens approximatif « un mois de délai étant nécessaire » : à ce premier stade « pendant » n'était donc pas exactement synonyme de « durant », dont elle n'a pris le sens qu'en 1442 (Robert DHLF).
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On a un certain nombre de prépositions qui nous viennent d'un participe présent : durant, pendant, nonobstant, etc.
Le pronom démonstratif "ce" pouvait assez librement se combiner avec un participe présent dont il était sujet (ce pendant, ce étant,...) ou objet (ce faisant, ce disant, ce nonobstant,...).
Le pronom démonstratif "ce" pouvait assez librement se combiner avec un participe présent dont il était sujet (ce pendant, ce étant,...) ou objet (ce faisant, ce disant, ce nonobstant,...).