Nous ne sommes peut-être pas suffisamment conscients des deux valeurs assez différentes des subordonnées d'hypothèse introduites par « si » et comportant un verbe à l'imparfait :
• Si l'on me donnait un conseil, je n'en tenais pas compte.
• Si l'on me donnait un conseil, je n'en tiendrais pas compte.
Manifestement, la première de ces deux subordonnées, qui concerne le passé, est nettement moins hypothétique que la seconde, qui se réfère au présent ou à l'avenir.
Dans une revue, si je me rappelle bien une lecture récente, on imagine qu'un jour une partie importante de la population laborieuse n'aura plus à se déplacer. Cette sorte d'hypothèse est donc plus proche de ma seconde phrase et demande après « si » un imparfait... malheureusement absent et remplacé par un présent : Et si, en 2050, c'est le travail qui venait à vous ? (mot mis en gras par moi)
« Et si » est facilement interrogatif. Je crois qu'on comprend bien son fonctionnement et son sens si l'on imagine « Et que se passerait-il si... ? »
L'occasion m'est donnée de revenir aussi sur la juxtaposition de deux subordonnées de condition : « Si l'on me donnait un conseil et que je n'en tenais pas compte, je faisais profil bas » est préférable à « Si l'on me donnait un conseil et si je n'en tenais pas compte, je faisais profil bas ».
Je ne me vois toutefois ni dire ni écrire : « Si l'on me donnait un conseil et que je n'en tinsse pas compte, je faisais profil bas ». Pourtant, le Grand Robert explique : Dans le cas où que remplace si, il est toujours suivi du subjonctif. « Si elle regardait et qu'il ne fût pas là, elle en était toute triste » (ZOLA, Le rêve, p. 129). Mais je vais peut-être changer d'avis !
« Si » suivi de l'imparfait
-
- Messages : 7437
- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Re: « Si » suivi de l'imparfait
Dans l'esprit du locuteur, l'imparfait "venait" suffit. Le présentatif "c'est" reste souvent au présent même dans les textes se référant au passé.André (G., R.) a écrit : ↑mar. 09 juil. 2019, 10:45Dans une revue, si je me rappelle bien une lecture récente, on imagine qu'un jour une partie importante de la population laborieuse n'aura plus à se déplacer. Cette sorte d'hypothèse est donc plus proche de ma seconde phrase et demande après « si » un imparfait... malheureusement absent et remplacé par un présent : Et si, en 2050, c'est le travail qui venait à vous ? (mot mis en gras par moi)
C'est l'automne que je préférais quand j'étais jeune.
Voilà pour les circonstances atténuantes. Mais j'aurais bien sûr préféré "c'était" dans la phrase étudiée.
L'obsolescence non programmée mais constatée de l'imparfait du subjonctif rend difficile l'application de cette règle ancienne.André (G., R.) a écrit :L'occasion m'est donnée de revenir aussi sur la juxtaposition de deux subordonnées de condition : « Si l'on me donnait un conseil et que je n'en tenais pas compte, je faisais profil bas » est préférable à « Si l'on me donnait un conseil et si je n'en tenais pas compte, je faisais profil bas ».
Je ne me vois toutefois ni dire ni écrire : « Si l'on me donnait un conseil et que je n'en tinsse pas compte, je faisais profil bas ». Pourtant, le Grand Robert explique : Dans le cas où que remplace si, il est toujours suivi du subjonctif. « Si elle regardait et qu'il ne fût pas là, elle en était toute triste » (ZOLA, Le rêve, p. 129). Mais je vais peut-être changer d'avis !
-
- Messages : 7437
- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Re: « Si » suivi de l'imparfait
On sait ce qu'il en est du subjonctif imparfait en français de 2019.André (G., R.) a écrit : ↑mar. 09 juil. 2019, 10:45 Je ne me vois toutefois ni dire ni écrire : « Si l'on me donnait un conseil et que je n'en tinsse pas compte, je faisais profil bas ». Pourtant, le Grand Robert explique : Dans le cas où que remplace si, il est toujours suivi du subjonctif. « Si elle regardait et qu'il ne fût pas là, elle en était toute triste » (ZOLA, Le rêve, p. 129). Mais je vais peut-être changer d'avis !
• « Il aurait fallu que tu allasses plus vite » est systématiquement remplacé par :
• « Il aurait fallu que tu ailles plus vite ». On conserve le mode, on abandonne le temps.
Or il semblerait qu'une telle démarche ne soit guère possible en cas de juxtaposition de subordonnées de condition concernant le passé. On évite, je crois :
• « Si l'on me donnait un conseil et que je n'en tienne pas compte, je faisais profil bas ». Probablement se dit-on que ce subjonctif présent doit être réservé... au présent ! Une phrase comme :
• « Si l'on me donne un conseil et que je n'en tienne pas compte, je fais profil bas » n'attire pas particulièrement mon attention, en tout cas à l'écrit, bien que je sois assez habitué aussi à :
• « Si l'on me donne un conseil et que je n'en tiens pas compte, je fais profil bas ». Question de niveau de langue.
La préférence pour l'indicatif dans la subordonnée d'hypothèse juxtaposée introduite par « que », lorsqu'elle concerne le passé, s'explique peut-être aussi par sa valeur faiblement hypothétique :
• « Si elle regardait et qu'il ne fût pas là, elle en était toute triste » (ZOLA) a un sens proche de :
• « Quand elle regardait et qu'il n'était pas là, elle en était toute triste ». (De fait, il arrivait qu'elle regardât et qu'il ne fût pas là !)
Qu'en est-il de l'autre subordonnée de condition juxtaposée, à l'imparfait, celle qui ne se réfère pas au passé ?
• « Si l'on me donnait (demain ?) un conseil et que je n'en tienne pas compte, je ferais profil bas » ne me gêne pas (à la différence, j'y ai fait allusion, de :
• « Si l'on me donnait un conseil (lorsque j'étais étudiant) et que je n'en tienne pas compte, je faisais profil bas », que j'éviterais).
Le subjonctif convient mieux à la phrase la plus hypothétique. C'est en tout cas ce que je ressens et que je ne suis sans doute pas seul à ressentir !
- Claude
- Messages : 9173
- Inscription : sam. 24 sept. 2005, 8:38
- Localisation : Décédé le 24 août 2022. Humour et diplomatie. Il était notre archiviste en chef.
Re: « Si » suivi de l'imparfait
Sauf erreur je formulerais tout à l'imparfait de l'indicatif : « Si l'on me donnait un conseil (lorsque j'étais étudiant) et que je n'en tenais pas compte, je faisais profil bas ».André (G., R.) a écrit : ↑mer. 10 juil. 2019, 10:09 [...](à la différence, j'y ai fait allusion, de :
• « Si l'on me donnait un conseil (lorsque j'étais étudiant) et que je n'en tienne pas compte, je faisais profil bas », que j'éviterais).
Le subjonctif convient mieux à la phrase la plus hypothétique. C'est en tout cas ce que je ressens et que je ne suis sans doute pas seul à ressentir !
Avatar : petit Gaulois agité (dixit Perkele)
-
- Messages : 7437
- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Re: « Si » suivi de l'imparfait
Oui, c'est probablement l'option préférée par la majorité des gens.
Re: « Si » suivi de l'imparfait
On peut consulter le Bon Usage, §1157 :
https://books.google.fr/books?id=SX0wDQ ... &q&f=false
On y rappelle que l'usage le plus soigné demande le subjonctif après le "que" vicariant, mais que de bons auteurs ont aussi utilisé l'indicatif.
L'usage d'aujourd'hui est clairement en faveur de l'indicatif.
Dans une étude sur le terrain
https://journals.openedition.org/pratiques/2697
les auteurs constatent que « La norme impose si + indicatif et que + subjonctif », mais « Les informants considèrent comme erronée la construction correcte grammaticalement, indicatif puis subjonctif, et lui préfèrent l’emploi de l’indicatif dans les deux cas. »
André a assez finement distingué les cas où l'on peut encore sentir le besoin du subjonctif.
https://books.google.fr/books?id=SX0wDQ ... &q&f=false
On y rappelle que l'usage le plus soigné demande le subjonctif après le "que" vicariant, mais que de bons auteurs ont aussi utilisé l'indicatif.
L'usage d'aujourd'hui est clairement en faveur de l'indicatif.
Dans une étude sur le terrain
https://journals.openedition.org/pratiques/2697
les auteurs constatent que « La norme impose si + indicatif et que + subjonctif », mais « Les informants considèrent comme erronée la construction correcte grammaticalement, indicatif puis subjonctif, et lui préfèrent l’emploi de l’indicatif dans les deux cas. »
André a assez finement distingué les cas où l'on peut encore sentir le besoin du subjonctif.
- Claude
- Messages : 9173
- Inscription : sam. 24 sept. 2005, 8:38
- Localisation : Décédé le 24 août 2022. Humour et diplomatie. Il était notre archiviste en chef.