Improbabilités

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Anne
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Message par Anne »

cyrano a écrit :
Perkele a écrit :Quant à moi, je comprendrais volontiers "invraisemblable jargon" ; "incroyable jargon" ce qui, je le crois ne dérangerait personne.
Mais ces usages résultent eux aussi d'une extension de sens! Ce qui est invraisemblable, c'est ce qui ne semble pas vrai (une nouvelle invraisemblable). Quand Maupassant parle d'un "invraisemblable chapeau", il utilise déjà cet adjectif dans un sens élargi (le TLFI dit "Par exagération: qui surprend par son côté extravagant, ridicule" car il est difficile de penser qu'un chapeau n'est pas "vrai".

La seule différence, c'est que cette extension de sens est aujourd'hui communément admise (la patine du temps...) alors que celle que subit improbable se déroule là, en direct, sous nos yeux.

Dans le cas d'invraisemblable, l'extension de sens ne porte que sur le fait qu'un objet, en principe, n'est pas vrai, mais réel, et il devrait sembler irréel plutôt qu'être invraisemblable.

Dans le cas d'improbable, non seulement la notion de probabilité ne peut s'appliquer qu'à un évènement et non à un objet, mais en plus elle ne peut s'appliquer que pour un évènement futur. C'est ces deux directions à la fois qui rendent difficilement acceptable l'extension de sens.
jarnicoton
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Message par jarnicoton »

cyrano a écrit :N'ayez crainte, Jarnicoton: il fut bien un temps où formidable signifiait "effrayant", par exemple. Ce sens s'est perdu dans l'usage courant à partir de la moitié du 19e siècle
La marquise de Grand-Air encourageait le beau langage... Chez elle, l'humble Bécassine vers 1920 fait le reproche à Loulotte d'employer "formidable" à mauvais escient ! (je n'ai pas la référence)
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Jacques
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Message par Jacques »

Bordas (Pièges et difficultés) met en garde contre les emplois dans les sens suivants, qu'il considère comme abusifs, de l'adjectif formidable :
– très grand, très élevé ;
– très bon, très agréable, excellent, vraiment remarquable ;
– très habile, très fort ;
– très sympathique, agréable, épatant.
Il conseille également d'éviter, dans la langue surveillée, l'emploi de l'adverbe formidablement.

L'Académie accepte : Qui étonne par son intensité, sa puissance, sa taille.
D'une manière générale, je me méfie de cet adjectif que je n'utilise jamais, sauf pour exprimer une idée de quelque chose d'impressionnant, proche de son sens d'origine (qui provoque une grande frayeur).
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Claude
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Message par Claude »

Vous me rappelez l'émission de Pierre Bellemare : « Vous êtes formidables ». :wink:
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JR
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Message par JR »

Le générique :

L’ignorance est mère de tous les maux.
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Claude
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Message par Claude »

Tout à fait JR !
cyrano
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Message par cyrano »

Claude a écrit :J'en profite pour attirer de nouveau l'attention sur l'emploi de conséquent pour dire important, et ça je ne le supporte pas... encore. :wink:
Je l'évite aussi (et je le corrige encore à l'occasion). Il n'y a en effet aucun enrichissement linguistique par rapport à important ou considérable, et au contraire une perte de sens par rapport à la signification première de conséquent.

Comme pour alternative, j'ai néanmoins conscience qu'il s'agit d'un combat d'arrière-garde et que, si nous sommes une poignée d'irréductibles Gaulois, nous n'avons pas de potion magique pour arrêter la déferlante... C'est ainsi, la langue évolue, tantôt pour le meilleur, tantôt pour le pire. La société aussi, d'ailleurs... :wink:
Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet (Courteline)
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Claude
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Message par Claude »

cyrano a écrit :[...] si nous sommes une poignée d'irréductibles Gaulois, nous n'avons pas de potion magique pour arrêter la déferlante [...]
En ma qualité de petit Gaulois agité en marge des messages, je vais demander à Panoramix d'y pourvoir.
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Jacques
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Message par Jacques »

Justement pour alternative, bien que restant sur cette position, je m'interroge : cet emploi « déviant » n'est-il pas, pour une fois, justifié ? Il n'y a pas de mot pour exprimer l'idée d'une autre manière de procéder, d'un choix différent, d'un produit de remplacement. Quand on vous dit « Les médicaments génériques sont des alternatives aux produits d'origine plus onéreux » ou « l'agriculture biologique est une alternative à la culture chimique nocive pour l'environnement naturel », nous pouvons bien critiquer cet emploi, mais que proposer à lui substituer ?
C'est le vide lexical qui fait son succès, et là nous sommes vaincus. Dans un siècle ou davantage, quand l'Académie sortira son nouveau dictionnaire, elle l'entérinera peut-être, comme elle a fini par accepter l'orthographe chausse-trappe, en violation de l'étymologie.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Jacques a écrit :Bordas (Pièges et difficultés) met en garde contre les emplois dans les sens suivants, qu'il considère comme abusifs, de l'adjectif formidable :
...
L'Académie accepte : Qui étonne par son intensité, sa puissance, sa taille.
D'une manière générale
Victor Hugo l'emploie souvent dans ce sens.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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Jacques
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Message par Jacques »

Vous voulez bien dire que tonton Victor utilise l'adjectif formidable comme synonyme d'impressionnant ?
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Jacques-André-Albert
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Message par Jacques-André-Albert »

Oui, et j'ai toujours ressenti cet usage comme très particulier. Voici quelques exemples :

« Un paquet de mer étant venu frapper le sabord, la caronade mal amarrée avait reculé et brisé sa chaîne, et s'était mise à errer formidablement dans l'entre-pont.»
« Pourtant l'homme luttait. Même, par instants, c'était l'homme qui attaquait le canon ; il rampait le long du bordage, sa barre et sa corde à la main ; et le canon avait l'air de comprendre, et, comme s'il devinait un piège, fuyait. L'homme, formidable, le poursuivait. »
« Juillet s'écoula, août vint, un souffle héroïque et féroce passait sur la France, deux spectres venaient de traverser l'horizon, Marat un couteau au flanc, Charlotte Corday sans tête, tout devenait formidable. »
(Quatre-vingt-treize)
« Entre chaque créneau se dressait, formidable,
Une corne de buffle ou de rhinocéros; »
« Sans un cri, tant la mort formidable est subite,
Il expire. »
« Il est muré, selon le rite assyrien,
Dans un trou formidable où l'on ne voit plus rien. »
(La légende des siècles)
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
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Jacques
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Message par Jacques »

Il y a là plusieurs emplois douteux, et qui semblent s'inscrire dans la liste des usages prohibés de Bordas.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Manni-Gédéon
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Message par Manni-Gédéon »

Claude a écrit :Vous me rappelez l'émission de Pierre Bellemare : « Vous êtes formidables ». :wink:
... et la chanson du grand Charles...
L'erreur ne devient pas vérité parce qu'elle se propage et se multiplie ; la vérité ne devient pas erreur parce que nul ne la voit.
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Claude
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Message par Claude »

Eh oui ! Elle ne nous rajeunit pas.
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