CHAUFFEUSE
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
CHAUFFEUSE
À la suite de l'accident de Puisseguin (Gironde), on a appris que le chauffeur du camion était décédé et que sa compagne exerçait le même métier que lui. Dans son édition dominicale, mon quotidien parle de « la compagne du chauffeur, elle-même chauffeuse poids lourds ». Qu'en pensez-vous ?
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
C'est précisément la raison de ma question. J'ai déjà eu maintes fois l'occasion de dire ici pourquoi j'accepte professeure, proviseure et quelques mots comparables. J'ai expliqué alors que pour les noms en -eur dont le féminin en -euse ou en -rice est attesté anciennement il me paraîtrait très anormal de suivre l'Office québécois de la langue française, qui propose par exemple directeure et inspecteure, malgré directrice et inspectrice, mots habituellement utilisés.Claude a écrit :L'ennui est que chauffeuse me fait sourire car je pense avant tout au siège destiné à se réchauffer au coin du feu, mais comme Perkele je le préfère à chauffeure.
L'épicène chauffeur, dont nous n'avions peut-être pas parlé, sera de plus en plus féminisé, mais comment ? Chauffeuse existe certes depuis longtemps, mais c'est un autre mot, vous l'avez dit. Tous deux sont évidemment apparentés au verbe chauffer, mais la chaise basse ou le siège n'ont rien à voir avec la personne qui conduit un camion ou celle qui surveille une chaudière. Quitte à susciter des réactions défavorables, je préconiserais donc plutôt chauffeure, sur le modèle et dans la logique de professeure, lorsqu'il s'agit de la conductrice d'un véhicule lourd.
- Perkele
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- Localisation : Deuxième à droite après le feu
Régulièrement, de nouveaux sens auxquels les francophones ont fini par s'habituer sont nés pour certains mots. Actuellement "liseuse" qui désigne une tablette destinée uniquement à la lecture de livres numériques, me fait immanquablement penser à un gilet de laine fine que l'on porte au lit l'hiver. Mais cela ne me dérange pas.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
- Claude
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- Inscription : sam. 24 sept. 2005, 8:38
- Localisation : Décédé le 24 août 2022. Humour et diplomatie. Il était notre archiviste en chef.
Oui, grâce à la publicité car elle a évolué en formes et en couleurs : constatez cette diversité.Islwyn a écrit :En tout cas, croyez-vous que chauffeuse désignant une chaise basse située au coin du feu soit généralement connu ?[...]
Avatar : petit Gaulois agité (dixit Perkele)
- Jacques-André-Albert
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- Inscription : dim. 01 févr. 2009, 8:57
- Localisation : Niort
Et que dire de la travailleuse que nos mères utilisaient, objet désormais un peu vieillot ?
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Je me permets d'insister sur le fait que ma question ne concernait que les épicènes et que la réponse que je tends à lui fournir ne vaut que pour cette catégorie de mots : « chauffeur » en fait bel et bien partie (en tout cas encore dans un Petit Larousse récent et dans le Robert en six volumes), tandis que « travailleur », à ma connaissance, n'a jamais eu cette caractéristique ; son féminin « travailleuse » désigne depuis très longtemps, je crois, une femme « qui se livre à un travail rémunéré... » (Larousse).
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Si l'on est opposé à toute féminisation d'épicène, et en particulier à celle en -eure, c'est la seule attitude possible. On en a souvent parlé : le suffixe -eur est traditionnellement ressenti comme strictement masculin et on peut trouver contradictoire de le transformer en -eure pour fabriquer des noms féminins.Perkele a écrit :Il faut donc que "chauffeuse" devienne le mot qui désigne naturellement une femme qui exerce le métier qui s'appelle "chauffeur" lorsqu'il est exercé par un homme.
Si l'on accepte professeure, proviseure..., il me semble plus difficile de refuser d'emblée chauffeure. J'ai entendu un jour un élève soucieux de bien faire parler de la « professeuse » et je crois bien avoir commencé ce jour-là à réfléchir aux féminisations des épicènes ; pensant à « professeuse » je tends donc comme vous, Claude, à trouver ridicule « chauffeuse » féminin de chauffeur. Parce que, aussi, l'autre chauffeuse que nous connaissons depuis longtemps, ainsi que nous l'avons vu, n'a rien à voir avec la conduite de véhicules lourds et que c'est un objet.
A contrario, et par souci d'honnêteté, j'admets que l'existence même de chauffeuse peut jouer en faveur de sa modernisation, en quelque sorte.
- Jacques-André-Albert
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- Inscription : dim. 01 févr. 2009, 8:57
- Localisation : Niort
Pourquoi ajouter un -e à ces noms de fonctions au féminin ? Des substantifs féminins en -eur existent déjà : la teneur, la stupeur, l'ardeur, la blancheur, la raideur, etc.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Inscription : dim. 17 févr. 2013, 14:22
Pour deux raisons, je crois.
La première tient au fait que le français moderne éprouve le besoin de préciser le sexe des personnes exerçant les fonctions représentées traditionnellement par les épicènes masculins. Or « assesseur », « auteur » et quelques autres commençant par une voyelle, s'ils gardent leur orthographe traditionnelle alors qu'ils sont passés au féminin, restent ambigus précédés de l'.
La seconde, la plus importante, me semble-t-il, réside dans le fait que, comme je l'ai rappelé ci-dessus, le suffixe -eur, dans les épicènes, est ressenti comme essentiellement masculin : l'arrivée de « la professeure » est précisément la conséquence de ce que bien des gens étaient gênés, à juste titre selon moi, par « la professeur ».
La première tient au fait que le français moderne éprouve le besoin de préciser le sexe des personnes exerçant les fonctions représentées traditionnellement par les épicènes masculins. Or « assesseur », « auteur » et quelques autres commençant par une voyelle, s'ils gardent leur orthographe traditionnelle alors qu'ils sont passés au féminin, restent ambigus précédés de l'.
La seconde, la plus importante, me semble-t-il, réside dans le fait que, comme je l'ai rappelé ci-dessus, le suffixe -eur, dans les épicènes, est ressenti comme essentiellement masculin : l'arrivée de « la professeure » est précisément la conséquence de ce que bien des gens étaient gênés, à juste titre selon moi, par « la professeur ».