Hier en parcourant la page facebook de médiapart, je tombe sur cette phrase: "Directeur de cabinet d'Arnaud Montebourg à Bercy puis secrétaire général adjoint de l'Élysée durant la seconde partie du quinquennat Hollande, Boris Vallaud tente avec ménagement une mission extrême : la ressuscitation du PS…"
Le mot ressuscitation m'interpelle... Est-ce un néologisme ou un mot rarement utilisé ?
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
Bienvenue à vous, Florian.A
Ressusciter signifie revenir à la vie, le fait de revenir à la vie est la résurrection. Il s'agit dans votre exemple de ramener à la vie, qui peut s'exprimer aussi à l'aide du verbe ressusciter. Mais le nom résurrection correspond essentiellement au sens intransitif de ressusciter. Je ne suis toutefois pas certain que j'aurais tiqué si j'avais lu « X tente une mission extrême : la résurrection du PS… ».
On dispose par ailleurs de réanimation, rétablissement, restauration, relèvement, renaissance (même inconvénient que résurrection), renouvellement.
Pour ces raisons, j'éviterais ressuscitation.
On pourrait parler aussi de la reconstruction, de la refonte, de la régénération, de la refondation du Parti socialiste. Mais le journaliste aura trouvé ces mots trop banals... Il faut attirer l'attention !
Il est intéressant de remarquer que l'étymologie donnerait resusciter -> resuscitation, et on peut se demander d'où vient le double s.
L'anglais reste près de la graphie étymologique : resuscitate, resuscitation.
Eh oui, une influence probable de l'anglais dans cette tentative de réintroduire le mot dans notre langue ! L'Académie française l'ignore et on peut lire dans le Robert en six volumes, à l'entrée RESSUSCITER : DER. — Ressuscitation (XIIIe s.) n. f. ou Ressuscitementn. m. (1220) Vx. V. Résurrection. — (Au sens II, 2° de ressusciter). Réanimation.
L'influence anglaise ne me semble pas en cause, puisque comme Islwyn le fait observer, il n'y a qu'un seul "s" en anglais, et que le mot était connu en français depuis très longtemps, même s'il était d'un emploi rare (Cf. des exemples dans ces livres de 1600, 1625 ou 1791.)
En ancien français, Godefroy montre qu'on trouvait diverses orthographes pour re(s)suscitation et re(s)sucitement.
En fait, maintenant que j'y pense, le double s non étymologique en français s'explique par le système phonique caractéristique de cette langue-ci. Autrement on aurait rés- comme en résurrection, c'est-à-dire que pour garder le son s, le double ss est obligatoire. Le système phonique anglais ne l'exige pas.
Un nombre différent de S n'a jamais empêché les anglomanes de sévir !
Il me paraît très peu probable que le commun des mortels francophones, s'il n'est pas influencé par l'anglais et s'il est soucieux de sa langue, s'avise de parler de ressuscitation. Le simple fait que vous ne nous ayez pas présenté ce mot comme rare dans votre langue, Islwyn, alors qu'il est tombé en désuétude en français, me semble aller dans ce sens.
Mais cette influence assez vraisemblable de la langue de Shakespeare sur la tentative de réintroduction du mot n'est pas la raison principale pour laquelle je n'imagine pas de l'employer. J'en ai cité d'autres, auxquelles s'ajoute le fait qu'il est absent de la huitième édition du dictionnaire de l'Académie, celle de 1935, et de la septième, celle de 1877. Je ne suis pas remonté plus loin dans les éditions.
Oui, cela dit, c'est un peu l'histoire de la poule et de l’œuf. Est qu'on prononce un s sourd parce qu'on écrit "ss" ou est-ce qu'on a écrit "ss" parce qu'on prononçait un "s" sourd ?
Si l'on regarde la famille de résurrection, résurgence, on prononce un "s" voisé bien que dans la même famille on ait surgir et même resurgir (variante de ressurgir) avec un "s" sourd.
Leclerc92 a écrit : Est qu'on prononce un s sourd parce qu'on écrit "ss" ou est-ce qu'on a écrit "ss" parce qu'on prononçait un "s" sourd ?
La question se pose sans doute pour quelques mots. Mais il est plus probable, lorsqu'on est en présence de SS, que cela rende compte d'une sourde originelle, pour la bonne raison qu'à l'époque où les mots se sont formés peu de gens savaient lire et écrire. Encore que l'inculture médiévale ait parfois été exagérée.
Oui, mais je pense que "re(s)suscitation" n'était de toute façon utilisé que par des gens qui savaient lire et écrire. Ça a probablement toujours été du domaine religieux ou savant.