Glauque
- Jacques
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Glauque
Commentaire, dans notre magazine de télé, sur un film :
« La seconde partie exploite la noirceur de l'âme humaine et s'aventure aux limites du glauque ». J'interprète sombre, sordide, malsain.
Le glauque est une jolie couleur vert d'eau, la couleur d'une mer d'émeraude légèrement teintée de bleu.
Les dictionnaires, y compris celui de l'Académie, acceptent l'idée « par extension de sens (?) » de quelque chose de triste ou lugubre. J'ai du mal à avaler l'extension de sens. Comment une belle couleur peut-elle être lugubre ?
Bordas dit bien qu'il faut éviter le contresens de trouble, sans éclat. Le Larousse des difficultés : Louche, sordide, malsain, d'apparition récente, appartient au registre familier. Hanse recommande d'éviter l'erreur de sens.
Les dictionnaires, selon moi, ont aujourd'hui changé d'objectif, et celui de l'Académie ne fait pas exception : jadis gardiens du bon usage, ils se veulent de nos jours « observateurs et rapporteurs de l'usage » qu'ils constatent et dont ils font état sans prendre position.
Cela donne bonne conscience aux personnes qui égratignent la langue et emploient des impropriétés. Leur argument classique est : « C'est écrit dans le dictionnaire ».
« La seconde partie exploite la noirceur de l'âme humaine et s'aventure aux limites du glauque ». J'interprète sombre, sordide, malsain.
Le glauque est une jolie couleur vert d'eau, la couleur d'une mer d'émeraude légèrement teintée de bleu.
Les dictionnaires, y compris celui de l'Académie, acceptent l'idée « par extension de sens (?) » de quelque chose de triste ou lugubre. J'ai du mal à avaler l'extension de sens. Comment une belle couleur peut-elle être lugubre ?
Bordas dit bien qu'il faut éviter le contresens de trouble, sans éclat. Le Larousse des difficultés : Louche, sordide, malsain, d'apparition récente, appartient au registre familier. Hanse recommande d'éviter l'erreur de sens.
Les dictionnaires, selon moi, ont aujourd'hui changé d'objectif, et celui de l'Académie ne fait pas exception : jadis gardiens du bon usage, ils se veulent de nos jours « observateurs et rapporteurs de l'usage » qu'ils constatent et dont ils font état sans prendre position.
Cela donne bonne conscience aux personnes qui égratignent la langue et emploient des impropriétés. Leur argument classique est : « C'est écrit dans le dictionnaire ».
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
- Jacques-André-Albert
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Une recherche de « glauque » dans Google images donne d'abord des vues qui illustrent la noirceur.
Le mot est sans doute mal perçu à cause des sons qui le composent. Le GL initial se retrouve dans certains mots à sens rebutant : glaire, gluant, glouton, « glander ». Mais ça n'explique pas tout, puisque le même phonème se trouve au début de glabre, glaçon, glacis, glaïeul, glaive, gloire, glaner, glisser, globe, etc.
Peut-être est-ce l'association avec la finale -auque, qu'on retrouve dans rauque, et quelques rares autres (mon dictionnaire de rimes a omis celle-là).
En faisant une recherche ici, on constate que le mot a surtout été employé en botanique, et que son sens dévoyé n'apparaît que très récemment.
Le mot est sans doute mal perçu à cause des sons qui le composent. Le GL initial se retrouve dans certains mots à sens rebutant : glaire, gluant, glouton, « glander ». Mais ça n'explique pas tout, puisque le même phonème se trouve au début de glabre, glaçon, glacis, glaïeul, glaive, gloire, glaner, glisser, globe, etc.
Peut-être est-ce l'association avec la finale -auque, qu'on retrouve dans rauque, et quelques rares autres (mon dictionnaire de rimes a omis celle-là).
En faisant une recherche ici, on constate que le mot a surtout été employé en botanique, et que son sens dévoyé n'apparaît que très récemment.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
(Montaigne - Essais, I, 24)
D'accord avec Jacques, glauque est un vert tirant sur le bleu, il doit garder ce sens. C'est amusant car j'en parlais hier avec un ami en passant près d'un bassin un peu sale.
Le Gaffiot (français-latin) donne pour glaucus : verdâtre, vert pâle ou gris
également gris pommelé ; mais les Néréides, divinités marines sont appelées sœurs glauques, ce qui rend bien cette notion de couleur de la mer.
Le Gaffiot (français-latin) donne pour glaucus : verdâtre, vert pâle ou gris
également gris pommelé ; mais les Néréides, divinités marines sont appelées sœurs glauques, ce qui rend bien cette notion de couleur de la mer.
J'ai toujours imaginé que la confusion venait de ce qu'on trouve parfois dans la littérature des eaux stagnantes, d'un vert-gris sombre, un peu troubles, qualifiées de glauques à cause de leur couleur sans doute, mais le lecteur ignorant a fini par croire, par association d'idées, que glauque signifiait peu engageant, inquiétant.
- Jacques-André-Albert
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- Inscription : dim. 01 févr. 2009, 8:57
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Il existe, dans les langues celtiques, un mot unique désignant à la fois le vert de la nature, le bleu et le grisâtre : glassos en celtique ancien, glas en breton et en irlandais et en gallois ; cette notion correspond assez bien à glauque.Herdé76 a écrit :D'accord avec Jacques, glauque est un vert tirant sur le bleu, il doit garder ce sens. C'est amusant car j'en parlais hier avec un ami en passant près d'un bassin un peu sale.
Le Gaffiot (français-latin) donne pour glaucus : verdâtre, vert pâle ou gris
également gris pommelé ; mais les Néréides, divinités marines sont appelées sœurs glauques, ce qui rend bien cette notion de couleur de la mer.
Quand bien nous pourrions estre sçavans du sçavoir d'autruy, au moins sages ne pouvons nous estre que de nostre propre sagesse.
(Montaigne - Essais, I, 24)
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- Perkele
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Sans oublier le dieu GLAUCOS, un fils de Poséidon.Herdé76 a écrit :D'accord avec Jacques, glauque est un vert tirant sur le bleu, il doit garder ce sens. C'est amusant car j'en parlais hier avec un ami en passant près d'un bassin un peu sale.
Le Gaffiot (français-latin) donne pour glaucus : verdâtre, vert pâle ou gris
également gris pommelé ; mais les Néréides, divinités marines sont appelées sœurs glauques, ce qui rend bien cette notion de couleur de la mer.
NB : Le prénom Glauco est encore porté en Italie.
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
Je parlais bien sûr des dictionnaires de français. Si vous n'avez pas trouvé cette définition erronée dans les autres langues romanes, cela veut dire que les francophones sont les seuls à faire cette mauvaise interprétation.Brazilian dude a écrit :Les dictionnaires, y compris celui de l'Académie, acceptent l'idée « par extension de sens (?) » de quelque chose de triste ou lugubre.
Je n’ai pas trouvé cette acception dans les dictionnaires d’espagnol, portugais et italien que j’ai consultés pour le mot glauco.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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- Inscription : sam. 06 mai 2006, 19:59
A toutes fins utiles, je mets le lien vers l'article que je viens de rédiger sur glauque.
Mon site Parler français sur les difficultés de la langue française
- Jacques
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- Localisation : Décédé le 29 mai 2015, il était l'âme du forum
C'est fort bien expliqué. Permettez-moi, sans rien dire à personne, d'appeler votre attention sur une petite étourderie :
on attribuait cette teinte verdâtre du fond de l'œil à un trouble de la vision, que l'on a logiquement appelée glaucome. Je pense que c'est le trouble qu'on nomme glaucome.
C'est juste entre vous et moi :D
on attribuait cette teinte verdâtre du fond de l'œil à un trouble de la vision, que l'on a logiquement appelée glaucome. Je pense que c'est le trouble qu'on nomme glaucome.
C'est juste entre vous et moi :D
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Bien vu, Jacques. Je corrige de ce pas.
Mon site Parler français sur les difficultés de la langue française