Addition, coordination et juxtaposition

Denis Normand

Message par Denis Normand »

morphée a écrit :Je précise qu'une bonne partie des emplois de tout-à-fait dans le TLF sont des citations de textes du XIXème ou XVIIIème siècle...
J’ai consulté pour vous plusieurs textes du XXe siècle et tous ces auteurs recommandent de ne pas mettre de traits d’union :

Dictionnaire des difficultés du français, J.P. Colin, 1980
Le Bon Usage, Maurice Grevisse, 1980
Encyclopédie du bon français dans l’usage contemporain, Dupré, 1972
Multi Dictionnaire des difficultés de la langue française, Marie-Éva de Villers, 1988
dictionnaire des difficultés de la langue française, A.V. Thomas, 1988
L’anti-fautes Dictionnaire du bon français, Jean Girodet (Bordas) 1981

:wink:
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Jacques
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Message par Jacques »

Je vois que je ne suis pas le seul à être bien équipé.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
morphée

Message par morphée »

J'ai écrit ceci :
morphée a écrit :D'un point de vue grammatical, tout à fait est considéré comme un adverbe... et il est admis qu'il représente une exception à la règle selon laquelle une unité syntaxique s'écrit "comme un seul mot", donc avec des traits d'union. Tout à fait s'écrit donc sans traits d'union... mais très souvent avec... ! (au moins dans le TLF)
et j'écris bien tout-à-fait... comme je le trouve si souvent, et comme cela s'écrivait autrefois.
Comme j'écris anévrysme, et non anévrisme; et grand'chose et quelques autres archaïsmes que je n'ai pas à l'esprit pour l'instant, mais que je ne manquerai pas de signaler lorsque je les retrouverai.

Je ne me sens pas obligé, lorsqu'il y a eu une évolution dans le temps, de me conformer à la règle fixée à un temps t, alors que la règle a été différente avant, et redeviendra différente, probablement, plus tard.
Du moins, pas lorsque la règle manque fortement de logique, n'a pas d'impératif formel, n'est pas un manquement à l'élégance, et peut même signifier un attachement à d'anciennes valeurs (ce que je revendique). Comme disait Georges, "je suis foutrement moyen-âgeux*". Les 75 références du TLF me suffisent comme justification.

* ou moyenâgeux; l'un et l'autre s'écrivent; l'un ou l'autre s'écrit.
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Anne
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Message par Anne »

Merci, cher Morphée : j'écris aussi tout-à-fait avec traits d'union, et vos arguments m'autorisent à ne pas changer cette habitude.
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Marco
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Message par Marco »

L’orthographe n’est pas une question de goût personnel. Tout à fait s’écrit aujourd’hui sans traits d’union, et les écrire constitue une faute, tout comme leur omission était fautive en d’autres périodes historiques.
Denis Normand

Message par Denis Normand »

J’ai reconnu et apprécié votre style dans la description de votre langue médiévale, Morphée.

Toutefois, je suis persuadé que si vous participiez à une dictée où le sans-faute vous vaudrait un bon paquet d’euros, vous retireriez les deux petits traits moyenâgeux.

:roll:
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Jacques
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Message par Jacques »

Si nous nous accrochons à des archaïsmes, nous aurons une tour de Babel de l'orthographe. Il est dit partout que tout à fait doit s'écrire sans traits d'union, nous en avons eu plusieurs preuves. Le critère à retenir est que, dans un examen, on compte une faute à ceux qui l'écrivent autrement. Il faut tout de même bien que nous nous référions à des normes et que tout le monde s'y conforme. On ne peut pas choisir son orthographe en fonction de sentiments personnels.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
Anonyme

Message par Anonyme »

Denis Normand a écrit :Toutefois, je suis persuadé que si vous participiez à une dictée où le sans-faute vous vaudrait un bon paquet d’euros, vous retireriez les deux petits traits moyenâgeux.
Tout-à-fait, absolument, affirmatif et c'est sûr. Tout comme sur un cévé (curriculum) ! [Vénal, moi ?]

Je n'ai nulle part contesté que la règle que vous énoncez fût juste.

Mais dans le contexte d'une phrase évidemment humoristique (par ailleurs totalement redondante), ou dans des contextes où une allusion historique est de mise, un peu de recul vous permettrait de percevoir le caractère particulier de cet emploi. Comme, d'ailleurs, la dérision de la phrase : Je l'écris toujours ainsi, c'est une preuve, non ?

J'ai l'autre jour failli écrire, dans un des fils sur le Français ancien, sçavoir au lieu de savoir. C'est un peu du même ordre.

Reste qu'il y en a 75 exemples dans le TLF, qu'il faut donc vouer aux gémonies. Ainsi que la plupart des auteurs du XIXème, même si ce siècle reste pour moi la référence du "bien écrire". Parmi les références du TLF, je trouve d'ailleurs La Varende (XXème siècle : lui aussi passéiste ?), et Nizan (1938) à l'article... inculte ! (Lui ? Quand même pas.). Et dans la définition même, par le TLF, du mot... parfaitement (qu'on peut ajouter à la liste "tout-à-fait, absolument, affirmatif et c'est sûr").
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Perkele
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Message par Perkele »

Denis Normand a écrit :Toutefois, je suis persuadé que si vous participiez à une dictée où le sans-faute vous vaudrait un bon paquet d’euros, vous retireriez les deux petits traits moyenâgeux.
:roll:
Jacques a écrit :Si nous nous accrochons à des archaïsmes, nous aurons une tour de Babel de l'orthographe.
Pourquoi l'emploi d'une orthographe archaïsante serait-il plus condamnables que des néologismes validés uniquement par leur présence sur Google ?
Il faut faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.
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Marco
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Message par Marco »

Perkele a écrit :Pourquoi l'emploi d'une orthographe archaïsante serait-il plus condamnables que des néologismes validés uniquement par leur présence sur Google ?
Je ne vois pas le sens de la comparaison. L’orthographe est une convention reconnue par la communauté des locuteurs, dont les garants sont les dictionnaires. Les néologismes sont des mots nouveaux, dont le droit de cité dépend largement de l’usage qu’en font les personnes du domaine concerné. Si quelqu’un s’avisait d’employer software au lieu de logiciel, terme désormais établi dans l’usage, il ne pourrait pas l’écrire, par exemple, softouaire dans un contexte formel ou simplement « normal ».
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Bernard_M
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Message par Bernard_M »

...Pourquoi l'emploi d'une orthographe archaïsante serait-il plus condamnables que des néologismes validés uniquement par leur présence sur Google ?
Eh bien tout simplement parce que, comme l'a fort bien dit Jacques, ce qui compte c'est l'orthographe qui a cours au moment où l'on écrit, et qui est ratifiée à l'unanimité par les spécialistes de la langue.

Il fut un temps, quand circulaient dans nos villes et nos villages charrettes à bras, chariots, carrosses, diligences et autres véhicules hippomobiles, on roulait où bon nous semblait, préférentiellement au centre des rues et des routes, essentiellement pour des raisons de commodité. Depuis ces temps, un sens de circulation, un code pour l'usage et le partage de la route ont été établis ; viendrait-il aujourd'hui à l'esprit d'une personne sensée de faire fi de ces règles ?

C'est toute la différence entre l'esprit et la règle qui nous contraint à l'application de règles codifiées, lorsqu'elles existent, et nous autorise, à bon escient, l'emploi de néologismes pour lesquels les règles ne sont pas encore établies.
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Anne
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Message par Anne »

J'ai du mal à croire que l'orthographe sans trait d'union de tout à fait ait été ratifiée à l'unanimité par les spécialistes de la langue. Qu'une majorité ait jugé bon d'ôter les traits d'union, peut-être, et alors je me demande encore bien pourquoi ils ont fait ce choix, qui n'a, à mon sens, aucune justification logique, mais j'imagine qu'au moment où a été faite cette réforme certains de ces spécialistes ont raisonné comme Morphée et moi.

Ce n'est pas en fonction de sentiments personnels que j'avais "choisi" l'orthographe avec traits d'union : jusqu'à présent j'ignorais qu'elle était autre, n'ayant rencontré que celle-là dans mes lectures, mais à présent c'est par raisonnement que j'affirme préférer l'ancienne orthographe.

Je veux bien me plier à la règle, et je m'efforcerai d'écrire "tout à fait", ainsi que "tout à l'heure", et je suppose qu'il faut aussi écrire "c'est à dire" (la suppression des traits d'union dans ce dernier cas me semblerait à la rigueur justifiée), mais je le fais de mauvaise grâce, du moins tant qu'on ne m'a pas donné d'explication satisfaisante concernant cette règle.
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Jacques
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Message par Jacques »

Chère Anne, ce n'est pas, hélas ! aussi limpide que vous l'envisagez. La règle n'est pas fixe, elle change au fil du temps. C'est déconcertant, mais le principal responsable est l'usage. Nous devons nous plier à celui du moment, bien qu'il n'y ait pas d'obligation formelle, parce que si nous ne le faisons pas, ou bien nous passerons pour des ignorants aux yeux d'autrui, ou bien, si nous nous présentons à un examen, nous écoperons d'une faute.
Qu'il y ait ou non des traits d'union, qu'il y en ait eu par le passé, ce n'est pas fondamentalement important, et pour ma part je n'y vois rien de grave. Je suis comme vous, comme nous tous, obligé de me plier à la dictature de l'usage. En ce qui concerne ce maudit trait d'union qui donne lieu à polémique, il est constamment instable. Voyez l'anarchie qui règne dans les mots composés. Peut-on avoir une explication logique au fait que certains d'entre eux se sont soudés au fil du temps ? Par exemple : gendarme, mainlevée, entracte... L'usage, c'est en fait le peuple qui le forge. Pour tout à fait, vous vous interrogez. Denis et moi vous avons cité tous les spécialistes qui le condamnent.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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Anne
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Message par Anne »

Je ne suis pas aussi bien équipée que vous et Denis Normand. Je ne puis consulter les ouvrages cités.
Mais le texte du lien fourni par Morphée énonce cette règle sans en expliquer la logique, alors que Morphée argumente les raisons qui le poussent à ne pas l'appliquer.
J'admets difficilement une règle que je ne comprends pas.
Pour moi, tout à fait est un adverbe, donc un mot, et je serais moins choquée qu'on se mette à l'écrire toutafait, que je ne le suis de devoir l'écrire sans trait d'union.
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Jacques
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Message par Jacques »

Je souhaite informer les uns et les autres que, si le nom de morphée a été remplacé par Anonymous, c'est que l'intéressé, indisposé par les messages qui lui apportaient la contradiction, m'a mis un mot en privé pour me demander de le désinscrire.
Je n'ai jamais banni personne du forum, hormis les gens qui s'inscrivaient quotidiennement des USA pour nous mettre des pourriels (des spams, si certains préfèrent), ainsi que quelques trolls, et un activiste qui donnait des liens vers des sites flamingants où l'on traînait dans la boue la France et les Français. Ajoutons-y un personnage à l'esprit dérangé, paranoïaque, qui acccusait tout le monde de lui vouloir du mal, et dont les participants d'alors m'avaient demandé de les débarrasser.
Le bannissement ne doit pas être une arme facile utilisée dans un mouvement d'humeur, ou pour motif personnel, comme c'est le cas sur un certain forum d'informatique où l'on se fait exclure pour un rien.
Si haut qu'on soit placé, on n'est jamais assis que sur son cul (MONTAIGNE).
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